Échos de la réunion des comités

Publié le par la Rédaction


Les 5, 6 et 7 juin dernier, a eu lieu la deuxième réunion des comités de soutien aux inculpés du 11 novembre, à côté de Limoges. Entre 60 et 80 personnes y ont participé, représentant 20 à 30 comités. Quelques réflexions issues des différentes discussions méritent ici d’être évoquées.

Sur limpasse de «lanti-répression». Un constat commun a pu être fait sur les limites de la lutte contre la répression : en tant que «soutien», cest une lutte de réaction, qui napparaît quaprès coup. La question sest alors posée de savoir comment apporter autre chose quun simple «soutien», sans pour autant mettre de côté le pragmatisme de préparation de la défense, de publicisation de laffaire, et de récolte de fonds. Une piste a pu être trouvée en évoquant une thèse forte du texte dA. Brossat «Tous Coupat, tous coupables» : il sagirait de quitter la posture «innocentiste» pour assumer au contraire le caractère résolument antagoniste de nos luttes. Lauteur prend pour exemple la manière dont de nombreux intellectuels ont parlé du livre lInsurrection qui vient, cest-à-dire comme un livre de «poésie révolutionnaire» sans aucune portée pratique ; action qui désamorce radicalement la réalité pour la rabattre sur un pur discours sans conséquence. Si au contraire, ce livre doit être pris pour le pamphlet révolutionnaire quil est, de la même manière, il ny a pas à rabattre les «existences politiques» des inculpés sur de plates figures citoyennes. Il y aurait plutôt à assumer, aux côtés des inculpés et de nombre dautres «prévenus», une réelle hostilité au pouvoir, une certaine «culpabilité» vis-à-vis des «mauvaises intentions» quil nous attribue. Cest-à-dire, finalement, apprendre à habiter concrètement une époque où toute forme de vie hostile au pouvoir est criminalisée comme «association de malfaiteurs»…

Sur le soutien à apporter aux membres des comités eux-mêmes. Plusieurs des personnes présentes avaient fait l
objet dinterpellations et de gardes à vue, dans le cadre de laffaire ou du soutien, au cours des trois derniers mois. Pour les uns, accusés de «menaces de mort» pour avoir pris une photo ; pour une autre, d«association de malfaiteurs» pour avoir prêté sa voiture ; etc. À travers de telles interpellations, et la possibilité quelles se renouvellent, sest alors posée la question du soutien aux membres des comités eux-mêmes. Un soutien «préventif», qui prendrait acte du fait que les membres des comités, et ce quils pourraient faire, se trouvent de fait, tout comme dautres, dans le collimateur de la justice. Et quil y a donc à prévoir tant dêtre placé à un moment en garde à vue, que de soutenir efficacement des proches qui subissent cette répression. En clair, il sagirait de sorganiser pour apporter une réponse adéquate à toute nouvelle attaque du pouvoir : avocats, mobilisation expresse, fonds de soutien, infos et recettes pour ne pas se faire piéger en garde à vue, etc.

Sur les «autres affaires» et «l
élargissement». Antiterrorisme, ennemi intérieur, criminalisation des luttes sociales… tous les comités ont pu faire le constat de lambiance répressive à l’œuvre. À un premier niveau, il est apparu évident que nombre dautres «affaires» méritaient la même analyse que celle «de Tarnac» : «mouvance anarcho-autonome francilienne», «mouvance anarcho-autonome iséroise», inculpés des luttes sociales dun peu partout. Ce qui a posé, par ailleurs, la question de savoir comment on défend des personnes dont la «culpabilité» est évidente, face à une justice qui considère comme criminel tout acte politique qui lui est antagoniste (voir plus haut). À un autre niveau, sest également posée la question de la possible rencontre avec dautres personnes en lutte ou attaquées par la justice ; ce à quoi la manifestation de Paris du 21 juin pourrait apporter une première forme de réponse.

Sur l
action des comités après la libération du dernier incarcéré. Tout le monde est tombé daccord sur le fait que rien nétait réglé. La libération des inculpés ne signifie ni la fin de lenquête, ni la fin des emmerdes judiciaires. Les contrôles judiciaires se poursuivent, les amitiés demeurent interdites. Il reste toujours à obtenir la relaxe pure et simple des prévenus, tout en continuant à sattaquer à ce qui nous écrase. Sur ce dernier point, une autre piste de réflexion a été ouverte : si toute lutte antagoniste au pouvoir est désormais criminalisée, il nous reste encore à inventer les moyens de nous «arroger limpunité»…

Sur le «devenir-organisation» qui nous guette… Dernier point, sur lequel nous nous sommes heureusement à nouveau accordés : ni les comités de soutien, ni leurs assemblées ponctuelles, ne souhaitent se constituer en une énième organisation politique. Des réunions comme celle-ci, qui peuvent éventuellement se reproduire, ne sont que des moments d
échange et de partage visant à faire émerger des points communs et des rencontres. Les comités restent totalement indépendants et libres de leurs actions, dans l’hétérogénéité qui les a caractérisés depuis le début. Et il faudra savoir, le moment venu, se dire que nous sommes allés jusquau bout de ce qui était possible et intéressant, sans regret. Ça valait le coup de le rappeler, au cas où…

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