Guadeloupe : Un jeune témoigne

Publié le par la Rédaction


Alors que beaucoup s’empressent d’accuser les jeunes du quartier Henry IV d’être responsables de la mort de Jacques Bino, le syndicaliste de la CGTG abattu hier soir à Pointe-à-Pitre, Jean-Marie Nomertin, dirigeant de la CGTG, demande qu’une enquête soit diligentée rapidement pour faire toute la lumière sur cette tragédie. Il indique qu’il y a des zones d’ombre dans cette affaire. Un témoin affirme avoir assisté à la mort de Bino, il préfère témoigner sous couvert d’anonymat. Nous l’appellerons Sonny. Je vous livre son témoignage qui me semble intéressant même si je n’ai pas encore pu recouper ses informations. Il révèle l’état d’esprit inquiétant dans lequel sont ces jeunes.

Je voudrais avant tout replacer l’évènement dans son contexte. Lundi, quand Lollia s’est fait frapper par la police, les jeunes ont dit que ça suffisait et ils ont décidé de «casser la ville», Pointe-à-Pitre. Tout semble avoir été fait pour que la situation dégénère : il n’y avait pas l’ombre d’un gendarme ou d’un policier, la ville semblait livrée à elle-même. Et pour couronner le tout, elle était plongée dans le noir.


C’est alors que des brigades de la BAC sont apparues. Les policiers ont tiré sur les manifestants, à balles réelles, dans les jambes. J’ai assisté à beaucoup de manifs en France et jamais je n’ai vu un truc pareil, jamais… Un rappeur assez connu ici, qui se trouvait dans la rue a été blessé et hospitalisé avec une balle dans la cuisse. C’est à partir de là que les jeunes ont décidé de s’armer. Hier soir, il y avait des échanges de coups de feu entre les jeunes et la police. Les jeunes utilisaient de petits calibres qui faisaient plutôt «traaac», tirant des décharges de chevrotine alors que les policiers utilisaient de plus gros calibres, identifiables à leur détonnation plus forte, «boum». Je ne peux pas prétendre qu’aucun jeune n’avait de gros calibre, je dis juste que je n’en ai ni vu, ni entendu de notre côté.

Le gars qui a été tué était en train de faire demi-tour à un barrage tenu par les jeunes, la balle qui l’a atteint en plein thorax ne venait pas du barrage, mais d’un côté, partie de loin même, avec un «boum» net. L’impact a été si violent que la voiture a bougé. Ca n’est pas clair.

Je suis inquiet pour ce soir, il risque d’y avoir des affrontements très graves. On veut faire porter aux jeunes un chapeau qui n’est pas le leur. Imagine, si on te désigne comme l’assassin d’un membre du LKP, ça fait de nous les pires ennemis du peuple. Ce soir, si les policiers rerentrent dans la cité, des jeunes voudront les buter pour corriger le tir…

Chien créole, 18 février 2009 (23h33).
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