Antiterrorisme à Chambéry : les mises en examen

Deux personnes mises en examen
Deux hommes ont été mis en examen jeudi et vendredi dans le cadre de l’enquête sur l’explosion d’un engin artisanal qui a causé la mort d’une jeune femme et blessé grièvement un jeune homme dans la nuit du 30 avril au 1er mai 2009 à Cognin (Savoie), a-t-on appris vendredi de sources policière et judiciaire.
Âgé de 25 ans et actuellement hospitalisé à Lyon, ce dernier a été mis en examen jeudi pour «association de malfaiteurs en vue de préparer un attentat terroriste», «fabrication et détention d’un engin et de produits explosifs» et placé en détention provisoire.
L’un de ses proches, un jeune homme de 24 ans, a été mis en examen vendredi pour «association de malfaiteurs en vue de préparer un attentat terroriste» et «destruction de preuves». Le parquet a requis son placement en détention provisoire. Le 8 mai dernier, un jeune homme du même âge, qui vivait avec lui dans le même squat de Chambéry, avait déjà été mis en examen pour les mêmes motifs et écroué.
Ils sont notamment soupçonnés d’avoir voulu faire disparaître des indices compromettants suite à l’explosion qui s’était produite dans un bâtiment désaffecté proche de Chambéry. Sur place, les enquêteurs de la Sous-direction antiterroriste (SDAT) avaient retrouvé un extincteur vide, un réveil ainsi qu’un mélange de chlorate de soude et de sucre.
Aucun projet criminel précis n’a pour l’instant été mis en lumière. Selon les services de renseignement, la jeune fille victime appartiendrait à la mouvance anarcho-autonome.
Leur presse (AP), 15 mai 2009.
Explosion mortelle en Savoie :
Les juges antiterroristes à Lyon
Gravement blessé, le jeune homme qui manipulait une bombe artisanale a été mis en examen hier.
Mickaël D…, 25 ans, a été mis en examen hier après-midi à Lyon, sur son lit d’hôpital, dans un pavillon d’Édouard Herriot réservé aux grands brûlés. Trois magistrats du pôle antiterroriste de Paris s’étaient spécialement déplacés, pour un premier interrogatoire et une audience du juge des libertés et de la détention, dans le cadre d’une instruction ouverte pour «association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste».
Le jeune homme reste gravement blessé à la suite de l’explosion qu’il a provoquée dans la nuit du jeudi au vendredi 1er mai à Cognin, près de Chambéry (Savoie). Il manipulait du chlorate de sodium et du sucre, composants instables, fréquemment utilisés dans la confection de bombes artisanales. Sa compagne, Zoé A…, 24 ans, a trouvé la mort. Apprentis chimistes ? Pas si simple. Selon nos informations, les produits étaient transvasés dans une bouteille d’extincteur. À proximité de l’usine désaffectée où a éclaté le drame, les policiers ont aussi trouvé du fil, deux retardateurs, deux autres extincteurs. Un ensemble assez élaboré pour susciter des interrogations sur ce que tramaient vraiment les jeunes gens. Préparatif sans suite, action symbolique, acte plus conséquent ? Dans leurs affaires, les enquêteurs de la direction interrégionale de police judiciaire (DIPJ) de Lyon et de la sous-direction antiterroriste (SDAT) ont trouvé de la documentation confirmant leur appartenance à une mouvance radicale, dont des pages à propos d’Action directe, groupe terroriste des années de plomb. Curiosité historique, inspiration à visée contemporaine ? La question taraude les enquêteurs. Autonomes, anarchistes, ultra-gauche, les termes varient pour désigner une jeunesse radicalisée, présente sur les fronts sociaux ou les événements internationaux, qui cultive sa contestation dans des lieux collectifs. La jeune femme était fichée depuis sa participation à une manifestation devant le consulat du Danemark, en 2007 à Nantes. D’origine suisse, musicien, Michaël D… était moins connu. Tous deux fréquentaient des squats dans la région de Chambéry. Un de leurs proches a été mis en examen et écroué pour «destruction de preuves». Un autre était en garde à vue hier. Il reste à déterminer si les jeunes gens se contentaient d’essayer une recette accessible sur Internet ou s’ils s’inscrivaient dans un activisme plus poussé. L’explosion de Cognin renferme une énigme, en lien direct avec une génération mouvante.
Leur presse (Richard Schittly, Le Progrès), 15 mai.
Que se passe-t-il aux Pilos de Chambéry ?
Depuis deux semaines, le site des Pilos est au cœur de l’actualité. Quelles sont les activités de cette ancienne usine ? Qui sont ses habitants ?
D’abord des banderoles et des messages anti-expulsion, puis un fait d’actualité : une explosion à Cognin et des victimes appartenant à un mouvement alternatif. Zoé et Mickaël fréquentaient les Pilos, cette ancienne usine située avenue des Bernardines. Dans ces locaux vit une communauté auto-gérée. Un mouvement qui se proclame apolitique, refusant le système de société actuel, mais qui a reçu, lors de la mobilisation de ce vendredi 8 mai, le soutien du NPA (Nouveau parti anticapitaliste) et de l’association écologiste et alternative «Chiche !» Une situation qui agace certains habitants des Pilos : «Ça fait des mois que l’on vit ici, que l’on organise des évènements. On ne parle jamais de nous. Il a fallu attendre que les flics débarquent pour que les gens s’intéressent à nous» lance l’un d’eux.
Depuis, Chambéry découvre la situation de ces squatteurs, qui logent depuis plusieurs mois à côté de la salle Jean Vilar. Salle qu’ils animent aussi, en proposant des activités culturelles alternatives. «Il y a des concerts ici, des expos, des débats, une bibliothèque… On attire toujours du monde» raconte un autre jeune. Pourtant, quand nous désirons en savoir plus sur ce lieu «ouvert au public», l’accès nous est refusé, sous prétexte que nous sommes journalistes. Le silence semble de mise dans ce lieu un peu particulier où les portes sont refermées à clé après chaque entrée ou sortie d’un habitant. Car le «squat», comme l’appellent ses occupants, est finalement un lieu fermé et filtré. C’est l’omerta quand on veut en savoir plus sur l’auto-gestion de ce lieu et sur ceux qui l’habitent.

Que va devenir le site ?
Le 8 mai, ils étaient 200 dans les rues de Chambéry à se mobiliser pour sauver le lieu de culture alternatif des Pilos, à dénoncer la mise en examen de leur ami Raphaël et tenter de sauver leur habitation : un bâtiment vide, dont la mairie, propriétaire, souhaite se servir pour construire logements, locaux associatifs, bureaux et installer des services municipaux.
Alors dans cette affaire, il faut distinguer l’aspect culturel et toutes les actions menées courageusement par les «Pilotiers» avec des petits moyens ; et de l’autre côté le squat, un lieu auto-géré qui loge un nombre inconnu de personnes. Car ce sont deux combats distincts.
Leur presse (La Vie nouvelle), 14 mai.