Une maspérisation
Dans le numéro 42 de la revue Partisans (juin 1968), consacré au mouvement des occupations, quelques documents alors publiés par l’I.S. et le C.M.D.O. ont été reproduits, comme ils le furent, en plus grand nombre, dans beaucoup de revues et brochures parues en Europe, en Amérique et au Japon.
Mais cette revue Partisans, dirigée par le stalino-castriste Maspero, s’est distinguée de toutes les autres par un truquage qui sent bien cette école stalinienne de la falsification dont il est un éminent diplômé.
Page 76 et 77, le Rapport sur l’occupation de la Sorbonne signé par le C.M.D.O. a été gravement maspérisé : gardant le début et la fin de ce texte, on en a frauduleusement coupé plus de la moitié — tout ce qui constituait justement le rapport précis sur les luttes qui s’étaient déroulées dans la Sorbonne. Évidemment, aucun signe ne marque l’existence d’une quelconque coupure.
Page 103, la maspérisation simplement négative se développe jusqu’à un frappant exemple de maspérisation totale : la falsification qui reconstruit un faux texte en arrangeant une partie d’un texte réel avec des phrases surajoutées qui lui donnent un autre sens. Il s’agit du tract Pour le pouvoir des Conseils ouvriers, qui est reproduit sans son titre, et sans sa date (22 mai) mais avec la signature du C.M.D.O. À partir de la dixième ligne du texte fabriqué par les maspérisateurs, on peut lire la fin du tract en question. Mais son début n’a pas seulement disparu : il a été remplacé par neuf lignes que personne de nous n’a jamais vues nulle part, qui appellent à manifester «aujourd’hui 24 mai», et qui contiennent d’énormes concessions à la C.G.T. («Oui, la C.G.T. veut faire aboutir tes revendications»).
Nous nous contentons de citer ces excès particuliers, sans penser qu’un individu aussi notoirement louche que Maspero mérite d’être puni pour ses truquages. C’est son métier officiel. Il est simplement juste d’y attacher son nom. Nous rappellerons seulement combien il est fantaisiste d’écrire, comme Le Crapouillot de mai-juin 1969, que la revue I.S. fut «diffusée un temps chez Maspero». D’autre part plusieurs personnes ont murmuré que les situationnistes ne méprisent tant Maspero que parce qu’il leur aurait bien plu d’être édités chez lui ! De tels propos jugent leurs auteurs. Nous ne savons pas si un tel bruit a sa source dans l’entourage de cette malheureuse canaille. Nous pouvons seulement dire que, vu le procédé que nous avons relevé ici, cela ne nous étonnerait même pas.
Internationale situationniste no 12, septembre 1969
Dossier Mai 68