Vive le sabotage des gaziers et électriciens en lutte !
Toulouse : Gaziers et électriciens toujours sous tension
Après vingt-deux jours de grève, et une tension de plus en plus palpable contre le «projet d’externalisation», environ trois cents agents grévistes ont mené cette opération escargot qui avait surtout l’allure d’une chenille bleue… Les manifestants se sont rendus jusqu’à l’entrée de l’aéroport à Blagnac provoquant de sérieux ralentissements, avant de venir stationner devant le siège de leur direction opérationnelle, rue de Sébastopol.
Visages encagoulés
Conducteurs grévistes et passagers avaient hier les visages enfouis sous des cagoules, des foulards, des masques blancs, des lunettes et casquettes à bord des camions nacelles, camions plateaux, véhicules légers de dépannage et d’exploitation. «On est obligé de se dissimuler car la direction nous a mis en garde pour le vol des véhicules et nous identifie en photos pour passer en conseil disciplinaire», lâche l’un d’eux au volant. «C’est la perte du service public ! Les fermetures des sites de proximité dans le rural, comme à Carbonne, signe la fin de notre métier. Ils externalisent toutes les activités dédiées à des agents ERDF pour le donner à des entreprises privées», confie Hélène, une syndicaliste.
L’intersyndicale régionale (CGT, CFDT, FO, CFTC) a reconduit hier matin le mouvement de grève à la suite d’une assemblée générale. Il n’y a pas eu cependant de coupures sauvages de gaz ou d’électricité. La direction ERDF-GRDF n’a pas cillé devant cette nouvelle journée d’action, estimant que seul 16% de l’effectif Sud-Ouest était mobilisé. Elle indique que ce mouvement est né «autour d’une réflexion menée en matière de partenariat industriel, dont un programme ambitieux de modernisation du réseau électrique dans la région qui ne vise pas à se substituer aux compétences internes mais qui doit permettre de mobiliser énormément de ressources» comme lors du passage de la tempête Klaus, en janvier. «Chose qui n’avait pas fonctionné car il y avait une méconnaissance totale du terrain des intervenants», a rappelé Marc Courdès, secrétaire régional CGT Énergie. Et sur un camion bleu, une phrase résumait hier le sentiment des grévistes : «La tempête terminée, ils veulent nous lourder».
EDF-GDF : Les syndicats tentent de canaliser la colère
Les syndicats veulent poursuivre le mouvement mais aussi mettre de l’ordre dans les rangs alors que les coupures sauvages sur les réseaux de gaz et l’électricité se sont multipliées au cours des derniers jours. Pour cela, les cinq organisations syndicales de l’énergie ont dévoilé un calendrier précis, avec des temps forts : deux nouvelles journées d’action les 21 et 23 avril.
Les revendications restent les mêmes : augmentation des salaires et protestation contre la «privatisation rampante» des services publics. Mais les syndicats insistent pour dire que cette mobilisation est coordonnée. Ils proposent au passage de nouveaux modes d’action, plus populaires dans l’opinion publique : des remises pour les foyers les plus démunis, des coupures ciblées sur les radars automatiques ou encore le passage aux tarifs de nuit pour les abonnés.
Objectif : en finir avec les coupures sauvages et très critiquées, notamment après avoir touché un hôpital. Au total jeudi, 66.500 clients ont été privés d’alimentation électrique «à un moment ou un autre de la journée», pour une durée moyenne d’une heure environ. À l’origine de ces coupures, des salariés d’ErDF la filiale d’EDF en charge de la distribution d’électricité et de GrDf, la filiale de GDF-Suez en charge de la distribution de gaz. «Il s’agit d’actes isolés de malveillance commis par une minorité de personnes», a assuré une porte-parole d’ErDF.
François Fillon a lui parlé de «sabotage». Le ministre du Travail Brice Hortefeux a souligné que ces coupures ne pouvaient pas «être assimilées à l’exercice du droit de grève» et étaient passibles de «sanctions».
Électricité : opérations commando des salariés d’ERDF
«Quand la SNCF fait grève, il n’y a pas de trains. Dorénavant, quand on fera grève, il n’y aura plus d’électricité» : c’est le cri du colère lancé dans la nuit de jeudi à vendredi par un électricien d’ERDF, une filiale d’EDF, alors qu’il s’apprêtait à mener une action coup de poing.
Après une journée de mobilisation «classique» jeudi, déjà émaillée par quelques coupures volontaires d’électricité, des salariés d’ERDF ont ainsi mené de véritables actions commando, jeudi, en s’attaquant à plusieurs transformateurs électriques de la région parisienne. Avec pour conséquence des dizaines de milliers de foyers privés d’électricité en région parisienne vendredi matin.
Plusieurs actions du même type ont eu lieu à travers la France. Le nombre de foyers privés de courant vendredi matin est donc sans doute beaucoup plus élevé.
(…)
Couper le courant, «au moins, ça se voit»
66.500 clients d’abonnés coupés d’électricité à un moment ou à un autre de la journée d’hier. Plus de 10.000 foyers privés de gaz mardi, 2000 la veille. Depuis plus de deux semaines, les salariés en grève d’ERDF et GRDF (filiales d’EDF et GDF chargées de la distribution), qui réclament l’arrêt de l’externalisation de leur activité et une hausse des salaires, sont passés à la méthode dure. Voire au «sabotage», comme l’a dénoncé aujourd’hui le Premier ministre François Fillon.
La direction parle de «coupures sauvages», «d’actes isolés de malveillance commis par une minorité de personnes», tandis que le ministre du Travail Brice Hortefeux s’est fait menaçant : «Il s’agit d’un acte illégal qui comme tel peut entraîner des sanctions.»
Les coupures de courant (et, fait plus nouveau, celles de gaz) sont devenues un classique de la contestation syndicale dans l’énergie. Tout en ne restant qu’un mode d’action parmi d’autres : tendance Robin des Bois, la «remise de courant» chez les foyers qui ne peuvent plus se payer l’électricité — entre deux et dix foyers par jours cette semaine en Midi-Pyrénées — ou le passage au tarif «heures creuses» durant la journée — hier pour 7000 abonnés dans le Finistère par exemple. Mais aussi les radars routiers coupés, les compteurs bloqués dans les édifices publics, ou, plus traditionnel, les barrages filtrants pour ne laisser passer que les véhicules techniques qui assurent les urgences…
Pas plus d’une heure et demie
«On n’est pas là pour emmerder les gens. Mais, face à une direction qui fait la sourde oreille, les collègues finissent par se dire que couper le courant d’un centre-ville, au moins, ça se voit», soupire Didier Delaporte, délégué CGT énergie pour la région Nord.
Comment décide-t-on de couper le courant ? Où ? Pour combien de temps ? Le matin en AG, les grévistes discutent des actions du jour et des «cibles» : édifices publics et centre commerciaux, mais surtout coupures «internes» : agences EDF et GDF, système de prélèvement des factures, système informatique… Les coupures n’excèdent pas une heure, une heure et demie, le temps qu’un agent d’astreinte soit envoyé pour réparer les dégâts.
Sauf cibles politiques, comme des membres du gouvernement avaient pu en faire les frais lors du mouvement de 2004 contre l’ouverture du capital d’EDF, les foyers des particuliers ne sont normalement pas les premiers concernés. «Ça dépend de la configuration du réseau, poursuit Didier Delaporte. Par exemple, si on coupe la préfecture de Lille, les bâtiments et maisons alentours en pourront en pâtir». Un dommage collatéral, à l’entendre.
Nouvelles journées d’action
«Les coupures, impopulaires, ne sont pas notre mode d’action privilégié, insiste son homologue pour la région Midi-Pyrénées, Marc Courdes. Ça n’est en tout cas pas les consignes que l’on donne.» Ceci dit, il reconnaît «ne pas l’empêcher non plus, vu le degré d’exaspération des salariés.»
Quand, comme en 2004, c’est le domicile de Jean-Pierre Raffarin qui est touché, l’opinion s’en amuse plus qu’autre chose. Mais un hôpital ? Mercredi, une coupure de 40 minutes a semé la panique à l’hôpital de Douai. Les grévistes ERDF, aussitôt désignés, rejettent toute responsabilité. «On n’aurait jamais fait ça. Ça va à l’encontre de notre démarche, de notre déontologie», assure Didier Delaporte, qui table sur une «avarie du groupe électrogène ou une fausse manœuvre».
Aucun accord n’étant sorti de la rencontre en syndicalistes et direction mercredi, les coupures devraient de poursuivre dans les jours qui viennent. Deux journées d’actions sont prévues pour les 21 et 23 avril.
Polémique autour des coupures d’électricité ou de gaz
Depuis trois semaines, les salariés d’ErDF (filiale d’EDF) et de GrDF (filiale de GDF) sont mobilisés par des grèves et manifestations pour notamment des hausses de salaires. Mais cette mobilisation passe également par des coupures d’alimentation, provoquées par certains salariés.
Jeudi, 66.500 clients ont été privés d’électricité «à un moment ou un autre de la journée», selon ErDF, et 9160 foyers de gaz, selon GrDF.
Des coupures plus faibles ont eu lieu vendredi, mais elles devraient s’amplifier lors de deux nouvelles journées d’actions prévues mardi et jeudi.
François Fillon a qualifié vendredi ces coupures de «sabotage». Le ministre du Travail Brice Hortefeux a souligné qu’elles ne pouvaient pas «être assimilées à l’exercice du droit de grève» et étaient passibles de «sanctions».
«La coupure a toujours été historiquement pour nous le moyen de se faire connaître. (…) Mais là, on est sur autre chose», reconnaît Michel Dumazeau (CGT Île-de-France).
Si ministères, administrations et entreprises sont particulièrement visés, la population est également touchée, reconnaît-il.
Pour les directions d’ErDF et de GrDF, ces coupures sont «des actes isolés de malveillance commis par une minorité de personnes» et «pas du tout en ligne avec l’esprit de service public qui anime la plupart des salariés». Mais «c’est fait par des professionnels qui ont les clés», souligne-t-on à GrDF.
Des plaintes ont été déposées, et des salariés ont été traduits en référé.
«Le gaz, c’est un robinet qu’on ferme, et l’électricité, des manettes qu’on abaisse», dans un des plusieurs dizaines de milliers de postes d’alimentation, souvent peu ou pas surveillés, explique un syndicaliste, sous couvert d’anonymat.
Pour Marie-Claire Cailletaux (CGT), ces coupures sont des «gestes maîtrisés et assumés collectivement», mais les actions prennent aussi la forme «de remises de courant pour les plus démunis, de passage en tarif de nuit pour les usagers ou d’énergie gratuite pour les hôpitaux».
La coupure est «une arme quand même terrible, qu’on n’a pas utilisée depuis un certain temps, mais dont on se sert avec précaution», souligne Max Royer (FO).
«Bien sûr, on ne cautionne pas les coupures dans un hôpital», ajoute-t-il. L’hôpital de Douai a connu mardi une coupure de courant de 40 minutes, couplée à une défaillance des groupes électrogènes, qui «n’était pas due aux grévistes, mais à un problème technique», assure Mme Cailletaux.
Si elle «condamne les coupures sauvages», Marie-Hélène Gourdin (CFDT) soutient aussi "les coupures maîtrisées et ciblées, par exemple sur les administrations».
Tous soulignent le «ras-le-bol» des salariés, notamment des jeunes, très nombreux dans le conflit. «Ils gagnent 1200 euros net par mois (…), alors que pendant la tempête Klaus ils étaient corvéables à merci», souligne M. Royer.
Depuis la filialisation de GrDF et ErDF, «il y a eu un grand choc : de plus en plus de sous-traitance, des conditions de travail dégradées, le service public rendu de manière insatisfaisante, et des salaires nettement inférieurs» à ceux d’EDF et GDF-Suez, souligne la CFDT.
Et l’annonce des augmentations mirobolantes des dirigeants de GDF-Suez a «été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase», reconnaissent-ils.
Attention au danger avec le gaz
Pour Alain André, délégué central FO-Énergie-Mines, «les syndicats n’ont jamais appelé à de telles opérations. Ce sont des actes incontrôlées et dangereux, fruits de l’exaspération de quelques poignées d’agents sur le terrain qui ne supportent plus de voir le blocage des négociations salariales. Le problème, c’est que ces coupures sauvages vont à l’encontre de notre principale régle : ne pas mettre en jeu la sécurité des clients.»
«Ces actes sont condamnables»
Si couper l’électricité ne représente aucun danger pour l’abonné, il n’en va pas de même avec le gaz. «Interrompre l’alimentation sur le réseau basse pression peut entraîner des fuites et des risques d’explosion. GrDF doit donc respecter une procédure très stricte avant de rouvrir un réseau. Cela nécessite le passage d’un agent dans chaque logement pour vérifier que tout robinet individuel de gaz est bien fermé, avant la remise en pression d’un immeuble ou d’un résidence par exemple. L’agent devra ensuite repasser chez chaque abonné pour rouvrir le robinet et s’assurer que l’installation reste conforme. En coupant le gaz, les agents savent qu’ils vont perturber l’activité de GrDF, en imposant à l’entreprise un surcroît de travail.»
«Ces actes sont inacceptables et condamnables», martèle la direction de GrDF, bien décidée à ne pas céder à des actions qui «remettent en cause la notion de service public». Depuis plusieurs semaines, les syndicats réclament une prime de 1500 € pour tous les agents, une augmentation mensuelle des salaires de 5% et l’arrêt des externalisations des emplois chez GrDF. Les discussions devraient d’ailleurs reprendre sur ce thème dès lundi.
EDF/GDF : Répression à l’Hôtel de ville de Paris
Ces salariés, en grève depuis le 30 mars, s’étaient présentés à 14h à l’Hôtel de Ville de Paris pour demander à être reçus par un représentant de l’équipe municipale. Ils souhaitaient informer la municipalité du mouvement de grève en cours, et les alerter sur la dégradation du réseau et du service public à Paris, comme dans d’autres régions.
À la différence de certains élus, comme ceux de Labarre qui se sont affichés solidaires du mouvement, la municipalité a refusé de recevoir les grévistes et a fait appel aux forces de l’ordre qui ont précédé à l’arrestation d’une centaine de manifestants.
On attendait plus d’écoute de la part d’une municipalité censée être sensible aux difficultés de ses concitoyens.
L’Union syndicale Solidaires et la Fédération Sud Énergie dénoncent avec la plus grande vigueur cette répression de manifestants venus expliquer leur mouvement.
Elles demandent la libération immédiate des salariés emmenés au commissariat.
En flux tendu et dans un cortège survolté de klaxons, soixante-dix véhicules des électriciens et gaziers d’ERDF et GRDF ont manifesté à nouveau hier matin à Toulouse.
Après vingt-deux jours de grève, et une tension de plus en plus palpable contre le «projet d’externalisation», environ trois cents agents grévistes ont mené cette opération escargot qui avait surtout l’allure d’une chenille bleue… Les manifestants se sont rendus jusqu’à l’entrée de l’aéroport à Blagnac provoquant de sérieux ralentissements, avant de venir stationner devant le siège de leur direction opérationnelle, rue de Sébastopol.
Conducteurs grévistes et passagers avaient hier les visages enfouis sous des cagoules, des foulards, des masques blancs, des lunettes et casquettes à bord des camions nacelles, camions plateaux, véhicules légers de dépannage et d’exploitation. «On est obligé de se dissimuler car la direction nous a mis en garde pour le vol des véhicules et nous identifie en photos pour passer en conseil disciplinaire», lâche l’un d’eux au volant. «C’est la perte du service public ! Les fermetures des sites de proximité dans le rural, comme à Carbonne, signe la fin de notre métier. Ils externalisent toutes les activités dédiées à des agents ERDF pour le donner à des entreprises privées», confie Hélène, une syndicaliste.
L’intersyndicale régionale (CGT, CFDT, FO, CFTC) a reconduit hier matin le mouvement de grève à la suite d’une assemblée générale. Il n’y a pas eu cependant de coupures sauvages de gaz ou d’électricité. La direction ERDF-GRDF n’a pas cillé devant cette nouvelle journée d’action, estimant que seul 16% de l’effectif Sud-Ouest était mobilisé. Elle indique que ce mouvement est né «autour d’une réflexion menée en matière de partenariat industriel, dont un programme ambitieux de modernisation du réseau électrique dans la région qui ne vise pas à se substituer aux compétences internes mais qui doit permettre de mobiliser énormément de ressources» comme lors du passage de la tempête Klaus, en janvier. «Chose qui n’avait pas fonctionné car il y avait une méconnaissance totale du terrain des intervenants», a rappelé Marc Courdès, secrétaire régional CGT Énergie. Et sur un camion bleu, une phrase résumait hier le sentiment des grévistes : «La tempête terminée, ils veulent nous lourder».
Leur presse, 17 avril 2009
(Valérie Sitnikow, La Dépêche)
EDF-GDF : Les syndicats tentent de canaliser la colère
Les cinq syndicats de l’énergie appellent à de nouvelles journées d’action les 21 et 23 avril. Une manière de relancer le mouvement de protestation qui dure depuis plusieurs semaines. Et de canaliser la colère exprimée au cours des derniers jours au travers de coupures sauvages de gaz ou d’électricité.
Les syndicats veulent poursuivre le mouvement mais aussi mettre de l’ordre dans les rangs alors que les coupures sauvages sur les réseaux de gaz et l’électricité se sont multipliées au cours des derniers jours. Pour cela, les cinq organisations syndicales de l’énergie ont dévoilé un calendrier précis, avec des temps forts : deux nouvelles journées d’action les 21 et 23 avril.
Les revendications restent les mêmes : augmentation des salaires et protestation contre la «privatisation rampante» des services publics. Mais les syndicats insistent pour dire que cette mobilisation est coordonnée. Ils proposent au passage de nouveaux modes d’action, plus populaires dans l’opinion publique : des remises pour les foyers les plus démunis, des coupures ciblées sur les radars automatiques ou encore le passage aux tarifs de nuit pour les abonnés.
Objectif : en finir avec les coupures sauvages et très critiquées, notamment après avoir touché un hôpital. Au total jeudi, 66.500 clients ont été privés d’alimentation électrique «à un moment ou un autre de la journée», pour une durée moyenne d’une heure environ. À l’origine de ces coupures, des salariés d’ErDF la filiale d’EDF en charge de la distribution d’électricité et de GrDf, la filiale de GDF-Suez en charge de la distribution de gaz. «Il s’agit d’actes isolés de malveillance commis par une minorité de personnes», a assuré une porte-parole d’ErDF.
François Fillon a lui parlé de «sabotage». Le ministre du Travail Brice Hortefeux a souligné que ces coupures ne pouvaient pas «être assimilées à l’exercice du droit de grève» et étaient passibles de «sanctions».
Électricité : opérations commando des salariés d’ERDF
Des milliers de foyers d’Île-de-France sont privés d’électricité vendredi matin après l'action des salariés d’ERDF, une filiale d’EDF, qui se sont attaqués à transformateurs électriques. Ils réclament des augmentations de salaire.
«Quand la SNCF fait grève, il n’y a pas de trains. Dorénavant, quand on fera grève, il n’y aura plus d’électricité» : c’est le cri du colère lancé dans la nuit de jeudi à vendredi par un électricien d’ERDF, une filiale d’EDF, alors qu’il s’apprêtait à mener une action coup de poing.
Après une journée de mobilisation «classique» jeudi, déjà émaillée par quelques coupures volontaires d’électricité, des salariés d’ERDF ont ainsi mené de véritables actions commando, jeudi, en s’attaquant à plusieurs transformateurs électriques de la région parisienne. Avec pour conséquence des dizaines de milliers de foyers privés d’électricité en région parisienne vendredi matin.
Plusieurs actions du même type ont eu lieu à travers la France. Le nombre de foyers privés de courant vendredi matin est donc sans doute beaucoup plus élevé.
(…)
Leur presse (Europe 1), 17 avril 2009.
Couper le courant, «au moins, ça se voit»
Depuis plusieurs semaines, les grévistes d’ERDF et GRDF pratiquent coupures de gaz et d’électricité pour faire entendre leurs revendications. Brice Hortefeux, ministre du Travail, menace de sanctions. Comment se décide ce type d’action ? Explications.
66.500 clients d’abonnés coupés d’électricité à un moment ou à un autre de la journée d’hier. Plus de 10.000 foyers privés de gaz mardi, 2000 la veille. Depuis plus de deux semaines, les salariés en grève d’ERDF et GRDF (filiales d’EDF et GDF chargées de la distribution), qui réclament l’arrêt de l’externalisation de leur activité et une hausse des salaires, sont passés à la méthode dure. Voire au «sabotage», comme l’a dénoncé aujourd’hui le Premier ministre François Fillon.
La direction parle de «coupures sauvages», «d’actes isolés de malveillance commis par une minorité de personnes», tandis que le ministre du Travail Brice Hortefeux s’est fait menaçant : «Il s’agit d’un acte illégal qui comme tel peut entraîner des sanctions.»
Les coupures de courant (et, fait plus nouveau, celles de gaz) sont devenues un classique de la contestation syndicale dans l’énergie. Tout en ne restant qu’un mode d’action parmi d’autres : tendance Robin des Bois, la «remise de courant» chez les foyers qui ne peuvent plus se payer l’électricité — entre deux et dix foyers par jours cette semaine en Midi-Pyrénées — ou le passage au tarif «heures creuses» durant la journée — hier pour 7000 abonnés dans le Finistère par exemple. Mais aussi les radars routiers coupés, les compteurs bloqués dans les édifices publics, ou, plus traditionnel, les barrages filtrants pour ne laisser passer que les véhicules techniques qui assurent les urgences…
Pas plus d’une heure et demie
«On n’est pas là pour emmerder les gens. Mais, face à une direction qui fait la sourde oreille, les collègues finissent par se dire que couper le courant d’un centre-ville, au moins, ça se voit», soupire Didier Delaporte, délégué CGT énergie pour la région Nord.
Comment décide-t-on de couper le courant ? Où ? Pour combien de temps ? Le matin en AG, les grévistes discutent des actions du jour et des «cibles» : édifices publics et centre commerciaux, mais surtout coupures «internes» : agences EDF et GDF, système de prélèvement des factures, système informatique… Les coupures n’excèdent pas une heure, une heure et demie, le temps qu’un agent d’astreinte soit envoyé pour réparer les dégâts.
Sauf cibles politiques, comme des membres du gouvernement avaient pu en faire les frais lors du mouvement de 2004 contre l’ouverture du capital d’EDF, les foyers des particuliers ne sont normalement pas les premiers concernés. «Ça dépend de la configuration du réseau, poursuit Didier Delaporte. Par exemple, si on coupe la préfecture de Lille, les bâtiments et maisons alentours en pourront en pâtir». Un dommage collatéral, à l’entendre.
Nouvelles journées d’action
«Les coupures, impopulaires, ne sont pas notre mode d’action privilégié, insiste son homologue pour la région Midi-Pyrénées, Marc Courdes. Ça n’est en tout cas pas les consignes que l’on donne.» Ceci dit, il reconnaît «ne pas l’empêcher non plus, vu le degré d’exaspération des salariés.»
Aucun accord n’étant sorti de la rencontre en syndicalistes et direction mercredi, les coupures devraient de poursuivre dans les jours qui viennent. Deux journées d’actions sont prévues pour les 21 et 23 avril.
Leur presse, 17 avril 2009
(Cordélia Bonal, Libération)
Polémique autour des coupures d’électricité ou de gaz
Les coupures de gaz et d’électricité par des grévistes des réseaux de distribution, qui se sont multipliées ces derniers jours, ont suscité vendredi une vive réaction gouvernementale, François Fillon parlant de «sabotage», alors que les syndicats justifient ce moyen d’action.
Depuis trois semaines, les salariés d’ErDF (filiale d’EDF) et de GrDF (filiale de GDF) sont mobilisés par des grèves et manifestations pour notamment des hausses de salaires. Mais cette mobilisation passe également par des coupures d’alimentation, provoquées par certains salariés.
Jeudi, 66.500 clients ont été privés d’électricité «à un moment ou un autre de la journée», selon ErDF, et 9160 foyers de gaz, selon GrDF.
Des coupures plus faibles ont eu lieu vendredi, mais elles devraient s’amplifier lors de deux nouvelles journées d’actions prévues mardi et jeudi.
François Fillon a qualifié vendredi ces coupures de «sabotage». Le ministre du Travail Brice Hortefeux a souligné qu’elles ne pouvaient pas «être assimilées à l’exercice du droit de grève» et étaient passibles de «sanctions».
«La coupure a toujours été historiquement pour nous le moyen de se faire connaître. (…) Mais là, on est sur autre chose», reconnaît Michel Dumazeau (CGT Île-de-France).
Si ministères, administrations et entreprises sont particulièrement visés, la population est également touchée, reconnaît-il.
Pour les directions d’ErDF et de GrDF, ces coupures sont «des actes isolés de malveillance commis par une minorité de personnes» et «pas du tout en ligne avec l’esprit de service public qui anime la plupart des salariés». Mais «c’est fait par des professionnels qui ont les clés», souligne-t-on à GrDF.
Des plaintes ont été déposées, et des salariés ont été traduits en référé.
«Le gaz, c’est un robinet qu’on ferme, et l’électricité, des manettes qu’on abaisse», dans un des plusieurs dizaines de milliers de postes d’alimentation, souvent peu ou pas surveillés, explique un syndicaliste, sous couvert d’anonymat.
Pour Marie-Claire Cailletaux (CGT), ces coupures sont des «gestes maîtrisés et assumés collectivement», mais les actions prennent aussi la forme «de remises de courant pour les plus démunis, de passage en tarif de nuit pour les usagers ou d’énergie gratuite pour les hôpitaux».
La coupure est «une arme quand même terrible, qu’on n’a pas utilisée depuis un certain temps, mais dont on se sert avec précaution», souligne Max Royer (FO).
«Bien sûr, on ne cautionne pas les coupures dans un hôpital», ajoute-t-il. L’hôpital de Douai a connu mardi une coupure de courant de 40 minutes, couplée à une défaillance des groupes électrogènes, qui «n’était pas due aux grévistes, mais à un problème technique», assure Mme Cailletaux.
Si elle «condamne les coupures sauvages», Marie-Hélène Gourdin (CFDT) soutient aussi "les coupures maîtrisées et ciblées, par exemple sur les administrations».
Tous soulignent le «ras-le-bol» des salariés, notamment des jeunes, très nombreux dans le conflit. «Ils gagnent 1200 euros net par mois (…), alors que pendant la tempête Klaus ils étaient corvéables à merci», souligne M. Royer.
Depuis la filialisation de GrDF et ErDF, «il y a eu un grand choc : de plus en plus de sous-traitance, des conditions de travail dégradées, le service public rendu de manière insatisfaisante, et des salaires nettement inférieurs» à ceux d’EDF et GDF-Suez, souligne la CFDT.
Et l’annonce des augmentations mirobolantes des dirigeants de GDF-Suez a «été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase», reconnaissent-ils.
Leur presse (AFP), 17 avril 2009.
Attention au danger avec le gaz
Localisées, sauvages, tournantes… De nombreuses coupures de gaz ont été observées un peu partout en France depuis le milieu de la semaine, en marge des discussions pour la revalorisation des salaires des agents. Rien qu’en Île-de-France, la direction de GrDF, la filiale distribution de GDF Suez, a ainsi comptabilisé plus de 9000 foyers privés d’alimentation en gaz naturel pour la seule journée de jeudi.
Pour Alain André, délégué central FO-Énergie-Mines, «les syndicats n’ont jamais appelé à de telles opérations. Ce sont des actes incontrôlées et dangereux, fruits de l’exaspération de quelques poignées d’agents sur le terrain qui ne supportent plus de voir le blocage des négociations salariales. Le problème, c’est que ces coupures sauvages vont à l’encontre de notre principale régle : ne pas mettre en jeu la sécurité des clients.»
«Ces actes sont condamnables»
Si couper l’électricité ne représente aucun danger pour l’abonné, il n’en va pas de même avec le gaz. «Interrompre l’alimentation sur le réseau basse pression peut entraîner des fuites et des risques d’explosion. GrDF doit donc respecter une procédure très stricte avant de rouvrir un réseau. Cela nécessite le passage d’un agent dans chaque logement pour vérifier que tout robinet individuel de gaz est bien fermé, avant la remise en pression d’un immeuble ou d’un résidence par exemple. L’agent devra ensuite repasser chez chaque abonné pour rouvrir le robinet et s’assurer que l’installation reste conforme. En coupant le gaz, les agents savent qu’ils vont perturber l’activité de GrDF, en imposant à l’entreprise un surcroît de travail.»
«Ces actes sont inacceptables et condamnables», martèle la direction de GrDF, bien décidée à ne pas céder à des actions qui «remettent en cause la notion de service public». Depuis plusieurs semaines, les syndicats réclament une prime de 1500 € pour tous les agents, une augmentation mensuelle des salaires de 5% et l’arrêt des externalisations des emplois chez GrDF. Les discussions devraient d’ailleurs reprendre sur ce thème dès lundi.
Leur presse, 18 avril 2009
(Carole Guechi, Le Parisien)
EDF/GDF : Répression à l’Hôtel de ville de Paris
Une centaine de manifestants d’ERDF et GRDF Île-de-France, ainsi que leurs responsables syndicaux, ont été arrêtés et emmenés au commissariat du 11e ce mercredi 15 avril.
Ces salariés, en grève depuis le 30 mars, s’étaient présentés à 14h à l’Hôtel de Ville de Paris pour demander à être reçus par un représentant de l’équipe municipale. Ils souhaitaient informer la municipalité du mouvement de grève en cours, et les alerter sur la dégradation du réseau et du service public à Paris, comme dans d’autres régions.
À la différence de certains élus, comme ceux de Labarre qui se sont affichés solidaires du mouvement, la municipalité a refusé de recevoir les grévistes et a fait appel aux forces de l’ordre qui ont précédé à l’arrestation d’une centaine de manifestants.
On attendait plus d’écoute de la part d’une municipalité censée être sensible aux difficultés de ses concitoyens.
L’Union syndicale Solidaires et la Fédération Sud Énergie dénoncent avec la plus grande vigueur cette répression de manifestants venus expliquer leur mouvement.
Elles demandent la libération immédiate des salariés emmenés au commissariat.
Union syndicale Solidaires
& Fédération SUD Énergie, 15 avril 2009.