NPA : Néo pique-niques à Auchan ?

«À l’égard du vin, de l’huile, et des autres choses que l’on est dans l’usage de goûter avant d’en faire l’achat, il n’y a point de vente tant que l’acheteur ne les a pas goûtées et agréées.»
Article 1587 du Code civil.
Il ne s’agit plus d’«autoréductions», mais de marketing publicitaire pour le dernier produit électoral en date.
Ils offrent une dégustation chez Auchan (Amiens)
Une vingtaine de militants du Nouveau parti anticapitaliste ont ouvert les produits pour les proposer aux clients de l’hypermarché.
«Une petite chouquette ?» Face à la boîte tendue par l’une des militantes du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) qui a envahi les rayons du magasin Auchan Amiens-Sud pour une dégustation sauvage, hier après-midi à Dury, cette cliente hésite à peine. «Je suis d’accord avec eux : la vie est trop chère, confie-t-elle. Je suis éducatrice, je fais donc partie de la classe moyenne, et c’est devenu très dur.» S’appuyant sur un article de loi, «on a le droit de goûter avant d’acheter», assure la vingtaine de membres du NPA en ouvrant les boîtes des produits sous le regard médusé des passants. Cette opération de «grande redistribution de la grande distribution» fait suite à une première organisée il y a un mois au magasin Carrefour d’Amiens-Nord.
«Ras-le-bol de payer, payer, payer»
«C’est pas à nous de payer la crise !» scandent les militants. «C’est très bien, ils devraient faire ça plus souvent», approuve un couple en mordant dans des fraises. «Tout le monde en a ras-le-bol de payer, payer, payer, confirment trois mamans spectatrices de la scène. On a l’impression que la crise a bon dos et qu’on s’en sert pour augmenter les prix. Mais nos salaires, eux, n’augmentent pas.» Évidemment, ce manège n’a pas été du goût des vigiles, ni de certains salariés d’Auchan. «Je suis dégoûtée, ils ont saccagé le travail de mes employés», enrage une chef de rayon. Dominique Dupont, directeur de l’hypermarché, tente de convaincre les intrus : «On a baissé les prix, venez voir !», assène-t-il en emmenant ses interlocuteurs devant le rayon des primeurs, «où huit fruits et légumes sont en permanence à moins d’un euro».
La direction du magasin va porter plainte
Après un défilé bruyant devant les caisses du magasin, les militants du NPA ont fini par partir. «Je suis désolé parce qu’on va devoir jeter tous les produits périssables qu’ils ont ouverts et je trouve navrant qu’ils mettent à mal le travail de 500 personnes, qui vont devoir en payer les conséquences, en toute impunité», peut souffler Dominique Dupont. Même si l’article 1587 autorise tout consommateur à goûter les denrées avant d’acheter, le directeur du magasin promet un dépôt de plainte. «On va regarder les images de nos caméras car le problème, c’est qu’ils n’ont rien acheté.» À la suite de la précédente action menée chez Carrefour, un membre du NPA était d’ailleurs convoqué vendredi au commissariat de police d’Amiens.
Presse jaune
(Gweltas Morice - Le Courrier Picard), 1er mars 2009.
Pique-nique révolutionnaire à Auchan Saint-Priest
Grosse agitation hier à midi : des militants du parti d’Olivier Besancenot ont pris des marchandises dans les rayons pour les distribuer aux clients, à l’intérieur de l’hypermarché.
Ils appellent ça «pique-nique de faim de mois». Nouvelle méthode d’action pour forcer les grandes surfaces à diminuer les prix. Dans le tramway qui serpente hier vers Saint-Priest, Camille règle les derniers détails de l’opération en s’interrogeant à haute voix : «On l’a déjà fait à l’automne chez Carrefour à Vénissieux et ça ne s’est pas bien passé. On va voir s’ils seront plus accueillants ici.» Les portes s’ouvrent. Terminus. Il est midi et la quinzaine de militants du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) débarque sur le parking ensoleillé de l’hypermarché Auchan. «Par petits groupes, les gars, par petits groupes, sinon on va se faire repérer» conseille l’un d’eux.
À tour de rôle, ils s’engouffrent dans les allées du magasin, munis d’un panier à courses. «On commence par les bonbons, ça plait aux mômes» glisse un jeune adhérent. Un tour au rayon bio pour du jus de fruit, pendant que les autres font provision de biscuits. Quelques verres en plastique, des assiettes… Le rythme s’accélère, le pouls aussi. «Vite !» presse un militant, «il est bientôt 12h25.» L’heure «H» pour déclencher l’opération. Au centre de l’allée principale, une nappe est déroulée sur une table repérée à l’avance. «On y va !» Une militante prend sa respiration et s’écrie : «Mesdames et Messieurs, c’est la redistribution dans la grande distribution ! Le prix des céréales baisse de 50%, le prix des coquillettes augmente de 32%, à qui le profit ? La grande distribution vous grignote. Venez, c’est Auchan qui offre.» Les sachets s’ouvrent et les verres se remplissent. Stupéfaits, les clients osent à peine s’approcher. Un, puis deux, puis trois, franchissent le pas. Ce sera tout. En moins de deux minutes, les agents de sécurité sont là. «Sortez maintenant ! Vous sortez !» Les militants sont ceinturés et poussés vers la sortie, manu militari. Des clients filment la scène avec leurs portables : «Vous avez vu ça ?» Dans la cohue, des verres tombent par terre, et le liquide se répand au sol. Un employé patine. C’est la chute. Une militante du NPA dérape à son tour. Cris, hurlements. «Non-violence !» répètent ses amis. Cinq clientes applaudissent : «Laissez-les faire, ils ont raison ! Moi, je prends que des premiers prix tellement c’est cher.» Au bout de cinq minutes, tout le monde est dehors, sous bonne escorte. Les policiers ont été prévenus. Deux militants sont embarqués. Ils passeront une partie de l’après-midi en garde à vue. Le magasin a porté plainte au commissariat local, notamment pour «dégradations». «C’est du vol, consommer sur place, c’est illégal et de la marchandise a été saccagée», proteste le directeur de l’hypermarché, Roger Soriano, joint plus tard par Le Progrès. «Leur opération est d’autant plus navrante que nous donnons des marchandises à la banque alimentaire toute l’année !» L’enseigne affirme que «deux de ses employés ont été blessés, l’un étant arrêté pour la semaine». Un militant du NPA se réserve, lui, le droit de porter plainte pour «coups» : il a fait établir un constat médical.
Presse jaune
(Nicolas Ballet - Le Progrès, édition du Rhône), 1er mars 2009.