Tarnac : Lois d'exception et violation des garanties constitutionnelles des libertés

Vendredi 16 janvier 2009, après plus de deux mois de détention, Yldune Lévy a été remise en liberté sous contrôle judiciaire. Les sections franc-comtoises de la LDH se réjouissent avec elle, ses parents et ses amis, de cette décision. Sur les neuf inculpés dans le cadre de l’enquête sur les sabotages SNCF, son ami Julien Coupat reste seul en détention, malgré la décision de remise en liberté du juge des libertés et de la détention, qui s’est vu opposer un appel du parquet.
Rappel des événements : le 11 novembre 2008, devant caméras et journalistes, plusieurs personnes suspectées d’avoir saboté des caténaires SNCF, ont été arrêtées, puis déférées à la Section antiterroriste du parquet de Paris après une garde à vue de 96 heures, instituée par une législation d’exception dite «antiterroriste».
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La Ligue des droits de l’Homme dénonce une procédure qui ne s’embarrasse pas du respect des libertés individuelles et se déroule sous l’œil de médias alimentés d’informations uniquement à la charge des personnes mises en cause. Cette violation, devenue permanente de la présomption d’innocence, y compris par des services de l’État ou par des responsables politiques, marque un affaiblissement inacceptable de l’État de droit et se matérialise notamment par des mises en détention extrêmement longues et injustifiées, alors qu’elles devraient rester l’exception.
La LDH regarde avec inquiétude l’extension de l’accusation de terrorisme à de nombreuses formes de contestation sociale et politique alors même que, dans le cas présent et de l’aveu même de la ministre de l’Intérieur, aucune vie n’a jamais été mise en danger, ni même été susceptible de l’être.
La LDH dénonce une instrumentalisation consentie de la justice et l’entêtement de la ministre de l’Intérieur et du parquet de Paris à vouloir maintenir une qualification des faits volontairement disproportionnée.
La LDH demande que l’affaire soit déqualifiée (retrait des chefs d’inculpation «terrorisme» et «association de malfaiteurs»), et que Julien Coupat soit libéré.
La LDH propose aux élus de notre région de se positionner clairement face à cette méthode de gouvernement qui conduit à exploiter chaque fait divers et à criminaliser les critiques de l’ordre établi pour réduire les libertés civiles et politiques.
Elle incite les citoyens à refuser cette logique sourde de l’arbitraire qui désormais voudrait faire de chacun, sur la base de ses lectures, de ses écrits, de son mode de vie, de ses relations, un terroriste potentiel. Une logique qui voudrait qu’un suspect devienne coupable du simple fait d’avoir été suspecté. Une logique de la terreur dont le message est : si vous ne marchez pas droit, 150 policiers encagoulés risquent de débarquer chez vous au petit matin !
Solidaire avec les neuf interpellés, avec leurs familles et leurs amis, avec les villageois de Tarnac, les sections régionales de la Ligue des droits de l’Homme appellent à manifester leur refus de voir cette dérive s’installer dans notre société en participant à la manifestation qui se tiendra à Paris le 31 janvier, en soutien aux inculpés.
Ligue bisontine des droits de l’Homme, 24 janvier 2009.