Création d'un comité de soutien cévenol pour les inculpé-e-s du 11 novembre

Le 11 novembre au matin, la France retrouve la tranquillité. La Sous-direction anti-terroriste a arrêté le «groupuscule d’ultra-gauche» soupçonné d’avoir commis trois jours plus tôt des sabotages de caténaires TGV. La France pourtant n’a jamais cessé d’avoir peur. Peur qu’un événement vienne troubler le train-train quotidien, que le cours normal des choses soit suspendu, peur que quelque chose arrive. Ici, la paix sociale ne tient qu’à un fil et la dissentrie médiatique qui a surgi avec les arrestations aura eu pour rôle principal de ne pas rompre ce fil.
Là où les actes de sabotage ont pris sens d’eux-mêmes, à la suite des mouvements de cheminots et des blocages étudiants, le pouvoir a du injecter de la confusion, les neutraliser et les rendre purement incompréhensibles. D’abord profiler une «mouvance», inventer une «cellule», démasquer un «leader», puis brandir des «preuves», condamner des «intentions». Cet assemblage monstrueux digne d’un Frankenstein au service des apprentis sorciers de l’État aura vécu un temps par la mauvaise magie des mots comme ceux de terrorisme, lutte armée, commandos… Mais ôtez ces mots du front du monstre et il s’effondre en un tas de poussière. Car on a bien du mal à s’effrayer de sa «menace» malgré tout le sordide spectacle qui a été imposé à la population.
Toute cette machinerie aura avant tout servi à produire des coupables. Produire des coupables et leur coller une image. Et que cette image soit assez repoussante pour que le tri se fasse entre les bons citoyens et tous les autres. On nous ressort alors l’état d’urgence comme à la fin des années soixante-dix, sans dire que l’urgence n’a jamais été levée depuis plus de trente ans. Sans dire que l’exception est devenue la forme légitime de gouvernement mondial, à présent que le pouvoir finit de légaliser l’état d’exception à travers toutes les couches sociales, économiques, politiques et environnementales. Nous accoutumant à accepter sans broncher cette seule vérité : pour créer le droit pas besoin d’être dans son droit.
L’offensive juridique et policière qui s’est mise en place depuis janvier 2008 à travers le desining criminologique de quelque «résurgence anarcho-autonome» est le signe qu’un modèle est en train de s’imposer. Pour donner l’exemple et pour les opérations futures. Car ce modèle servira à traiter les lois ordinaires selon un contexte spécial. Et pas seulement pour les seules «tranches dangereuses» de la population, mais bien pour quiconque tente de s’écarter de la norme. Il n’est pas étonnant dès lors qu’une organisation citoyenne comme RESF ait été qualifiée par la Chancellerie d’organisation quasi terroriste.
Si cela est sans précédent par l’intensité des mesures prises et leur extension potentielle à tout un chacun, la logique est celle toute moderne de la chasse aux sorcières. L’inquisition a perdu son fatras religieux, mais par ces opérations juridiques elle ne cesse de hanter notre époque. Elle vise à faire du magistrat le seul interprète des actes, à créer un bouc émissaire, à accorder des récompenses pour les repentis et les collaborateurs, à distribuer des châtiments pour les autres, à donner un pouvoir discrétionnaire à l’État, et finalement à transformer la détention prolongée en une machine à faire avouer.
La répression ne fonctionne pas si le masque du coupable n’est pas modifiable à souhait. Pour les sorcières c’était le «diable», aujourd’hui c’est la «cellule invisible». Médias et juges coordonnent ainsi le sens de cette justice inquisitoire, donnant à voir à ceux qui en doutaient encore qu’entre l’état de droit et l’état d’urgence il n’y a plus de séparation. Certains pourront encore s’indigner de ces dérives en y dénonçant un «problème social». Mais il faut plutôt admettre que c’est cette société qui est devenue le problème.
Renversant le réel, médias et juges demandent maintenant à une révolte qui veut répondre à tout de répondre de tout. De répondre de ses idées. De répondre de ses affinités. De répondre de ses amitiés. De répondre de son mode de vie. Bref de répondre de ce qu’elle est bien plus de ce qu’elle a fait.
Pourtant cette révolte n’est pas prête de jouer le sale rôle qu’on voudrait lui infliger. Elle prend corps, elle se met en mouvement, telle une vague. Et c’est cette vague, plus large et plus forte, qui est visée dans ce que nous devons considérer comme une déclaration de guerre.
Le but direct de ce comité de soutien est l’aide financière et morale des prisonniers, la libération immédiate de toutes les personnes inculpées dans le cadre d’une instruction anti-terroriste depuis janvier 2008 et la fin de toute poursuite judiciaire à leur encontre : Ivan, Bruno, Isa, Farid, Juan, Damien ainsi que les neuf arrêtés le 11 novembre dont deux sont encore aujourd’hui en prison. Le comité vise ensuite à casser la machinerie juridico-médiatique anti-terroriste en lançant une réflexion sur ce qui se prépare en matière de lois d’exception. Le comité propose de fabriquer des vidéos, des films et tout autre moyen pratique de diffusion d’idées.
Première réunion publique le jeudi 18 décembre à 18 heures
au Transfo à Ganges (Hérault) rue de l’Albarède
au Transfo à Ganges (Hérault) rue de l’Albarède