Racisme ordinaire dans l'Ain
Châtillon-sur-Chalaronne : chronique du «racisme ordinaire»
«Racisme ordinaire dans l’Ain» titre le journal Le Monde, daté du 15 juillet. Patrick Labesse relate l’altercation de samedi soir au final du festival des Temps chauds, donné à Châtillon-sur-Chalaronne. Comme nous l’avons écrit dans notre édition de lundi, deux hommes d’une quarantaine d’années avec femmes et enfants, se sont rendus aux halles où se déroulait le concert des 3 Ma. Selon des témoignages concordants, ils était manifestement là «pour faire du tapage», parlaient haut, avec force commentaires vaseux à connotation raciste.
Entre eux et le public qui leur demandait de se taire, le ton est rapidement monté. Un spectateur (le notaire de Châtillon Didier Rassion) dit avoir reçu deux coups de poing, un autre, mal-voyant, une claque. Notre confrère Patrick Labesse, envoyé spécial du Monde sur l’événement, s’est trouvé mêlé à l’altercation. L’un des provocateurs lui a asséné un violent coup de tête au visage.
«Poignée de main à monsieur le maire»
«Le spectateur agressé, la bouche en sang, ose quelques mots, raconte Patrick Labesse. “Pourquoi cela, qu’est-ce que vous faites ici ?” La réponse jaillit : “Nous, on est chez nous ici, toi retourne chez toi.” Le spectateur a le tort d’avoir la peau un peu trop mate.»
Le journaliste accuse le maire Yves Clayette de connivence. «Évacué sous la tente de la Croix-Rouge pour y recevoir des soins, il (NDLR : le spectateur) revient un quart d’heure plus tard (…) Là, il est surpris d’y trouver les deux agresseurs en conversation au milieu d’un groupe de personnes, dont le maire (UMP) de la commune, Yves Clayette (…) Gérard Arnaud, journaliste présent pour la revue Africultures, entend le maire rassurer les agresseurs : “N’ayez crainte, il n’y aura aucune conséquence.” Tutoiement de connivence, poignée de main à monsieur le maire, entouré de sa police municipale. Les deux tristes sires prennent congé sans être inquiétés.»
«Des mensonges éhontés, une affaire montée en épingle» se défend Yves Clayette (lire par ailleurs). Une affaire qui pourrait finir au tribunal si plainte est déposée contre les agresseurs, tous deux riverains de Châtillon. Le Monde s’y associe et Les Temps chauds ont l’intention de se porter partie civile. «Nous avons des valeurs à défendre» estime le président Laurent Guigon. «Cet incident montre que notre travail est plus que jamais indispensable.»
Racisme ordinaire dans l’Ain
Des spectateurs assis à proximité des perturbateurs leur demandent de se taire. Les visages se renfrognent. Les bras se croisent sur la poitrine en une attitude de défi. Le regard d’un des deux individus croise celui d’un spectateur, debout à proximité, qui s’entend dire d’une voix haineuse «Pourquoi tu me regardes, toi ?» Ledit spectateur reçoit immédiatement un violent coup de poing sur la mâchoire asséné par le second individu, suivi quelques secondes après par un coup de tête encore plus violent, du premier. Le spectateur agressé, la bouche en sang, ose quelques mots : «Pourquoi cela, qu’est-ce que vous faites ici ?» La réponse jaillit : «Nous, on est chez nous ici, toi retourne chez toi.» Le spectateur a le tort d’avoir la peau un peu trop mate.
Évacué sous la tente de la Croix-Rouge pour y recevoir des soins, il revient un quart d’heure plus tard pour rejoindre des amis sur les lieux de l’agression. Là, il est surpris d’y trouver les deux agresseurs en conversation au milieu d’un groupe de personnes, dont le maire (UMP) de la commune, Yves Clayette, élu lors des dernières élections municipales, en mars. Gérard Arnaud, journaliste présent pour la revue Africultures, entend le maire rassurer les agresseurs : «N’ayez crainte, il n'y aura aucune conséquence.» Tutoiement de connivence, poignée de main à monsieur le maire, entouré de sa police municipale. Les deux tristes sires prennent congé sans être inquiétés. Une plainte est déposée. Laurent Guigon, président de l’association productrice du festival et correspondant local du Monde, qui juge les faits «inqualifiables», annonce que celle-ci se porterait partie civile. Plusieurs personnes présentes se déclarent prêtes à témoigner. Le journal Le Monde, qui n’a pu joindre le maire, a aussi l’intention de s’associer à la plainte pour une agression subie par un de ses collaborateurs, signataire de ces lignes.
Blessé lors d’une altercation au festival des Temps chauds, le journaliste du Monde dénonce le caractère raciste de l’agression et accuse le maire de connivence.
«Racisme ordinaire dans l’Ain» titre le journal Le Monde, daté du 15 juillet. Patrick Labesse relate l’altercation de samedi soir au final du festival des Temps chauds, donné à Châtillon-sur-Chalaronne. Comme nous l’avons écrit dans notre édition de lundi, deux hommes d’une quarantaine d’années avec femmes et enfants, se sont rendus aux halles où se déroulait le concert des 3 Ma. Selon des témoignages concordants, ils était manifestement là «pour faire du tapage», parlaient haut, avec force commentaires vaseux à connotation raciste.
Entre eux et le public qui leur demandait de se taire, le ton est rapidement monté. Un spectateur (le notaire de Châtillon Didier Rassion) dit avoir reçu deux coups de poing, un autre, mal-voyant, une claque. Notre confrère Patrick Labesse, envoyé spécial du Monde sur l’événement, s’est trouvé mêlé à l’altercation. L’un des provocateurs lui a asséné un violent coup de tête au visage.
«Poignée de main à monsieur le maire»
«Le spectateur agressé, la bouche en sang, ose quelques mots, raconte Patrick Labesse. “Pourquoi cela, qu’est-ce que vous faites ici ?” La réponse jaillit : “Nous, on est chez nous ici, toi retourne chez toi.” Le spectateur a le tort d’avoir la peau un peu trop mate.»
Le journaliste accuse le maire Yves Clayette de connivence. «Évacué sous la tente de la Croix-Rouge pour y recevoir des soins, il (NDLR : le spectateur) revient un quart d’heure plus tard (…) Là, il est surpris d’y trouver les deux agresseurs en conversation au milieu d’un groupe de personnes, dont le maire (UMP) de la commune, Yves Clayette (…) Gérard Arnaud, journaliste présent pour la revue Africultures, entend le maire rassurer les agresseurs : “N’ayez crainte, il n’y aura aucune conséquence.” Tutoiement de connivence, poignée de main à monsieur le maire, entouré de sa police municipale. Les deux tristes sires prennent congé sans être inquiétés.»
«Des mensonges éhontés, une affaire montée en épingle» se défend Yves Clayette (lire par ailleurs). Une affaire qui pourrait finir au tribunal si plainte est déposée contre les agresseurs, tous deux riverains de Châtillon. Le Monde s’y associe et Les Temps chauds ont l’intention de se porter partie civile. «Nous avons des valeurs à défendre» estime le président Laurent Guigon. «Cet incident montre que notre travail est plus que jamais indispensable.»
Marc Dazy
«Une affaire montée en épingle»
«Des mensonges éhontés ! Je ne les connaissais pas plus que ceux à qui ils ont envoyé des marrons. Je suis arrivé après coup, ils n’arrêtaient pas de me donner du “M. Clayette”. Je leur ai peut-être vendu une chemise à l’occasion, mais ça s’arrête là.
Qu’est-ce que vous voulez que je fasse ?
Je leur ai dit : “Vous feriez bien de rentrer chez vous.” J’aurais peut-être dû appeler les gendarmes et les faire coffrer. Mais je ne le sentais pas. Ils se seraient débattus, ça aurait sûrement envenimé les choses J’étais beaucoup plus préoccupé par la panne d’électricité. Je n’arrivais pas à me concentrer sur cette affaire qui ne me semblait pas très importante. J’ai assisté à quelques bagarres dans ma jeunesse, je peux vous dire que ça saignait autrement !
En tous cas, je trouve un peu fort qu’on m’accuse de couvrir des fachos. Je suis connu pour avoir la fibre sociale plutôt développé. Je suis un humaniste, un gaulliste de gauche, si l’on entend qu’il en reste encore. Les propos racistes, on me les a rapportés. Manque d’éducation peut-être, mais de là à les assimiler à du fascisme. C’est désespérant de monter une telle affaire en épingle. On met l’accent sur des gens pas bien “fût’fut’”, deux clampins avec deux canons de trop, alors que des tas d’autres gens se comportent correctement.
Si les Temps chauds doivent nous apporter ce genre de publicité, on ne reprendra plus les Temps chauds et on fera un loto à la place !»
Propos recueillis par M.D.
Le Progrès (édition de l’Ain), 16 juillet 2008.
Racisme ordinaire dans l’Ain
La scène a eu lieu dans la soirée du 12 juillet, à l’issue du concert de trio 3MA, près des Halles anciennes de Châtillon-sur-Chalaronne, une ville de 5179 habitants, située à proximité des monts du Beaujolais. Le concert est organisée par les Temps chauds, beau festival de musiques du monde, donc venues d’ailleurs, qui a lieu dans plusieurs villes du département de l’Ain (voir le compte-rendu). Ce soir-là, le public est constitué de jeunes gens, de familles curieuses, attentives et enthousiastes. Mais deux hommes qui ne sont pas des gamins, habitant dans une rue proche, apprendra-t-on plus tard, manifestent bruyamment dédain et mépris pour les musiciens sur scène. Des réflexions xénophobes fusent. Ils rigolent, se moquent, peu satisfaits de devoir subir ces «gens-là» — des musiciens africains — jusque sous leurs fenêtres.
Des spectateurs assis à proximité des perturbateurs leur demandent de se taire. Les visages se renfrognent. Les bras se croisent sur la poitrine en une attitude de défi. Le regard d’un des deux individus croise celui d’un spectateur, debout à proximité, qui s’entend dire d’une voix haineuse «Pourquoi tu me regardes, toi ?» Ledit spectateur reçoit immédiatement un violent coup de poing sur la mâchoire asséné par le second individu, suivi quelques secondes après par un coup de tête encore plus violent, du premier. Le spectateur agressé, la bouche en sang, ose quelques mots : «Pourquoi cela, qu’est-ce que vous faites ici ?» La réponse jaillit : «Nous, on est chez nous ici, toi retourne chez toi.» Le spectateur a le tort d’avoir la peau un peu trop mate.
Évacué sous la tente de la Croix-Rouge pour y recevoir des soins, il revient un quart d’heure plus tard pour rejoindre des amis sur les lieux de l’agression. Là, il est surpris d’y trouver les deux agresseurs en conversation au milieu d’un groupe de personnes, dont le maire (UMP) de la commune, Yves Clayette, élu lors des dernières élections municipales, en mars. Gérard Arnaud, journaliste présent pour la revue Africultures, entend le maire rassurer les agresseurs : «N’ayez crainte, il n'y aura aucune conséquence.» Tutoiement de connivence, poignée de main à monsieur le maire, entouré de sa police municipale. Les deux tristes sires prennent congé sans être inquiétés. Une plainte est déposée. Laurent Guigon, président de l’association productrice du festival et correspondant local du Monde, qui juge les faits «inqualifiables», annonce que celle-ci se porterait partie civile. Plusieurs personnes présentes se déclarent prêtes à témoigner. Le journal Le Monde, qui n’a pu joindre le maire, a aussi l’intention de s’associer à la plainte pour une agression subie par un de ses collaborateurs, signataire de ces lignes.
Patrick Labesse
Le Monde, 15 juillet 2008.