Deuxième mi-temps

Le 29 janvier. Grève générale.
À saintNazaire, tout le monde s’accorde pour que cette journée soit marquée d’une pierre blanche.
Dès le début, les manifestants sont sous pression ; depuis trop longtemps, la colère bouillonne en l’absence de confrontation. La manif se termine à la préfecture et, devant la présence massive de policiers, quelques-uns lancent des cannettes et des yaourts. Se sentant encerclés, les flics envoient une pluie de lacrymos. La riposte ne se fait pas attendre : plusieurs milliers de personnes, lycéens, dockers, métalos, vieux syndicalistes, se relayent pour tenir les barricades et intensifier les affrontements. Pendant quatre heures, ça pète de partout : un groupe de manifestants est à peine dispersé qu’un autre apparaît, les poches remplies de pierres. Devant l’hétérogénéité des forces qui lui font face, la police, complètement dépassée, répond alors par une centaine de lacrymos et des grenades assourdissantes. L’une d’elles blesse un révolté qui perdra par la suite trois de ses orteils. S’ensuivront quinze procès et deux incarcérations de 2 à 4 mois. Le soutien s’organise rapidement, un collectif se forme et appelle à des rassemblements lors des différents procès.
Dans toutes les têtes se forge une idée : le 19 mars sera le jour de la revanche. Mais cette fois-ci, sentant qu’il suffirait d’une étincelle pour que ça parte, aucun policier n’est visible sur le parcours. L’humeur n’est ni à la balade ni au slogan, et les silences sont ponctués par les détonations des pétards et des fusées. Nombreux sont ceux qui ne veulent pas en rester là. Si les flics ne veulent pas se montrer, il suffit d’aller les chercher là où ils sont. Les manifestants vont donc les attaquer directement à la pierre et au cocktail Molotov. La police recule, tient difficilement ses rangs. Elle parvient à plusieurs reprises à prendre en tenaille des groupes pour arrêter quelques révoltés (dont trois sont aujourd’hui incarcérés). Aux avants-postes, des barricades enflammées se montent tandis qu’à l’arrière on amasse les projectiles et on tient les rues adjacentes Alors que la plupart des arrestations du 29 étaient le fait de flics en civils, cette fois trois BACeux sont tabassés après avoir essayé d’arrêter des gens. Ils se tiendront ensuite à distance, livrant aux émeutiers un territoire dont ils ne récupèreront pas le contrôle. La place sera tenue jusqu’à l’arrivée des renforts appelés de Nantes, une occasion rêvée pour que ça pète aussi là-bas…
Rebetiko no 1, printemps 2009
Chants de la plèbe.