Soutenons la presse libre : Le Courrier
«Le Courrier» lance l’Opération Boomerang
Le Courrier connaît à nouveau une baisse importante de son nombre d’abonnés, bien que paradoxalement le chiffre de son lectorat soit en hausse. Pour survivre, le journal doit impérativement trouver de nouveaux lecteurs, et plus encore de nouveaux abonnés.
Il y a deux ans, en septembre 2007, nous avons lancé une campagne de sauvetage du titre. Notre situation financière était telle que nous manquions de liquidités et n’étions plus sûrs de pouvoir assumer les frais inhérents à notre production. Cet appel retentissant a touché un large public. Nous avons reçu de nombreux messages solidaires et, surtout, notre courbe d’abonnements est remontée très rapidement au-dessus des 10.000 abonnés. Grâce à cette reprise, la vie du Courrier n’était plus menacée. Malheureusement, une échéance plus tard, les abonnements ont été résiliés en nombre, et nous ne comptons aujourd’hui plus que 9401 adhésions. Ce chiffre, trop faible, doit impérativement augmenter sous peine de nous retrouver dans des difficultés insurmontables en 2010. Une nouvelle crise affecterait périlleusement la qualité du journal. Au niveau des ressources humaines, les collaborateurs du Courrier travaillent déjà à «flux tendu» pour un salaire souvent inférieur aux usages, et à des taux d’occupation partiels. Sans omettre les bénévoles et les stagiaires qui fournissent une belle part de travail non rémunéré important pour la bonne marche du journal. La poursuite de cette aventure (oui, il s’agit bien d’une aventure) doit être l’affaire de nous tous, autant de celles et ceux qui le produisent que de celles et ceux qui le lisent, unis dans un effort citoyen pour la sauvegarde et le développement d’une presse libre et indépendante de tout pouvoir économique et politique. L’information libre a un prix, et nous le payons tous les jours. Reste que les campagnes de communication atteignent rarement les objectifs visés, et seuls les appels au secours, souvent relayés par les médias, sont entendus du grand public. De plus, communiquer coûte cher et, contrairement aux autres quotidiens, nous n’avons pas les moyens d’utiliser les supports habituels de communication. D’ailleurs la vente du Courrier ne se prête guère aux techniques classiques coûteuses de télémarketing intrusif et agressif. Au moyen d’une nouvelle campagne d’abonnements qui commence aujourd’hui, nous voulons sortir des schémas classiques et vous proposer un défi : nous aider à trouver de nouveaux lecteurs. En page deux et trois, nous vous présentons un texte inédit de Joseph Incardona, Boomerang, dont le suspense accompagnera chaque semaine l’évolution de notre courbe d’abonnés. Pour nous aider, vous avez la possibilité de faire découvrir Le Courrier à une connaissance gratuitement durant deux semaines, ou bien sûr, d’offrir des abonnements payants. Si chacun-ne s’engage à trouver, dans sa famille, dans son cercle d’amis, connaissances ou collègues, un-e futur-e abonné-e, le but de 1000 nouveaux abonnés deviendra une réalité. En répondant à l’appel que nous lançons aujourd’hui, vous devenez un des nombreux relais engagés dans la lutte pour la survie du Courrier.
Annelise Carrel Diaz, Frédérique Bouchet,
codirectrices administratives et président de la Nouvelle Association du Courrier
Le Courrier, 14 novembre 2009
Quotidien suisse et indépendant.
L’utopie du journalisme non lucratif
Au moment où Le Courrier enregistre son audience la plus élevée depuis la création d’un sondage national sur la presse [Selon la très officielle Organisation de recherche et d’étude des médias publicitaires (REMP), Le Courrier atteint pour la première fois le nombre de 24.000 lecteurs, avec un bond de 15% de l’audience par rapport au sondage précédent. Ce sondage a été publié le 7 septembre dernier.], Le Matin Bleu achève sa météoritique existence. Le gratuit d’Édipresse était un attrape-publicité déguisé en journal d’information, sur lequel les annonceurs détenaient un droit de vie ou de mort. Aux antipodes de ce «modèle» économique, Le Courrier place entièrement son destin entre les mains de ses lecteurs. Qui le lui rendent plutôt bien, puisque ce journal n’a jamais été autant lu. Oppressés par la crise et la perte du pouvoir d’achat, beaucoup renoncent à poursuivre leur abonnement. Mais ce lien n’est pas coupé lorsqu’il se renouvelle au moyen de dons en argent.
Qu’ils soient abonnés ou donateurs (ils sont parfois les deux), nos lecteurs savent que leur apport sert uniquement à financer l’information, non à rémunérer des actionnaires ou à racheter d’autres titres. Quotidien associatif, Le Courrier engage l’ensemble de ses ressources dans la diffusion de nouvelles et dans l’analyse de l’actualité. Il y a là tout le sens du journalisme non lucratif. Le don matérialise la relation particulière que les lecteurs entretiennent avec le journal. C’est pourquoi nous leur adressons régulièrement un bulletin de versement. Si aujourd’hui nous accompagnons ce geste par un éditorial, c’est parce que nous avons besoin d’un substantiel coup de pouce pour terminer l’année, soit un peu plus de 150.000 francs d’ici à fin décembre.
Affligée par les pires tourments, la presse commence timidement à se tourner vers ce modèle de journalisme philanthropique. Avoir comme actionnaire un organisme à but non lucratif, telle est par exemple l’aspiration de la Société des rédacteurs du Monde qui en appelait, au printemps dernier, cette solution pour garantir son indépendance éditoriale. Mais ce modèle n’est pas seulement un bouclier défendant les rédactions de prises de contrôle non sollicitées ou d’influences politiques et commerciales. Soutenu par la générosité des lecteurs, le journalisme non lucratif permet une diffusion plus ample et donc plus sociale de l’information. Aujourd’hui, un exemplaire du Courrier est lu par près de trois personnes, signe que le titre circule de plus en plus largement. Donner, c’est aussi partager l’information libre. Une utopie pour les rédactions sous la coupe de managers sans scrupules. Une réalité pour des journaux comme le nôtre, où tout commence et finit par ses lecteurs.
Fabio Lo Verso, rédacteur en chef - septembre 2009.