L'archipel des Robots cops

C’est la question que je me suis posée au regard du nombre impressionnant de policiers qui ont été mobilisés dimanche dernier pour encadrer la manifestation «la prison tue» organisée par l’Arppi et de nombreux autres collectifs, groupes et individus pour demander l’abolition des peines de mort déguisées, des quartiers d’isolement et disciplinaires dans lesquels les morts suspectes sont de plus en plus nombreuses, le non enfermement des enfants, la libération des malades et des handicapés ainsi que le rapprochement familial, affinitaire et géographique des familles et proches de personnes détenues.
Un dispositif inquiétant
À peine arrivée sur le lieu de rendez-vous place de la Bastille, investie par des robots cops en costume de guerre et sourires d’assaut jusqu’au sommet des marches de l’Opéra Bastille, il m’a fallu demander à mon interlocuteur, en prise directe avec la préfecture, que cessent les contrôles d’identité et que les flics provocateurs quittent les marches de l’Opéra.
Une demie heure plus tard j’ai dû réitérer ma demande au responsable pour que cessent aussi les contrôles systématiques dans le métro. Une amie m’a appelé pour me dire que son bus avait été détourné à la gare de Lyon. Une dizaine d’autres personnes, bien qu’elles m’aient appelé pour me dire qu’elles étaient dans le métro en direction de la manifestation ne sont jamais arrivées et la camionnette d’une autre amie, venue de Nîmes pour l’occasion, a été fouillée sept fois.
L’apothéose du dispositif étant le bouclage de la place d’Italie où rues, boulevards et avenues étaient fermées par des doubles rangées de véhicules de police avec, tout autour de celle-ci, une armada de policiers déployée de façon stratégique et impressionnante. Un tous les mètres en long et en large des avenues.
Une amie passant près de la prison de la Santé après la manifestation m’a parlé d’un «mur» fait de palissade et de flics à hauteur de celle-ci, ainsi que de bulldozers blancs marqués police qui remontaient vers la place Denfert-Rochereau en un cortège impressionnant. Puis, en se dirigeant vers son domicile avenue des Gobelins, elle a interrogé des motards sur le pourquoi et les raisons de ce dispositif. Réponse de ceux-ci : «À cause d’une manifestation de dangereux gauchistes qui sont contre la police, contre les matons, contre le gouvernement et qui ont prévu de tout casser.»
Un peu plus loin elle a interrogé d’autres policiers arguant de son inquiétude par rapport à sa fille censée rentrer en métro.
Réponse de l’intéressé : «Ne vous inquiétez pas Madame, c’est une manifestation en soutien aux familles de détenus et pour les gars en prison. C’est du grand n’importe quoi ; on est 3000 pour encadrer quelques pékins, qui défilent dans le calme avec des propos intelligents.»
«C’est complètement disproportionné !» a-t-il ajouté.
Il fallait s’attendre à ce déploiement de force au regard de l’article avant-coureur écrit par deux journalistes félons, Isabelle Mandrot et Caroline Monnot dans un article de politique-fiction paru dans le Monde le 8 novembre où leurs propos délirants accompagnés de photos angoissantes d’autonomes ingérables issus d’une supposée armée de l’ombre annonçaient à l’imparfait la manifestation.
Pour faire cet «article purin» les traîtres étaient venues jusqu’à mon fief de Charenton pour me piéger. Elles s’étaient même fendues d’achats de bibelots, dans le salon de thé de l’ami où je les recevais, pour endormir ma vigilance sur le mode : «On est jeunes et sympas et on voudrait parler des nouveaux acteurs et moyens de résistance actuels.»
Malgré la désapprobation de certains, largement justifiée au regard de tout cela, j’avais insisté pour ouvrir la porte à la «grande presse» pour preuve de notre ouverture quant à la mobilisation. Les deux «jouir-nalistes» étaient donc venues quelques jours plus tard à une réunion de l’Arppi pour infiltrer nos rangs. Probablement déçues de ne pas y trouver l’objet de leur fantasme elles ont pondu cet article de batterie.
Elles ne sont pas les seules d’ailleurs, d’autres ont participé à la curie, notamment Charlie hebdo qui avait annoncé casse et altercations en tout genre quelques jours auparavant d’après des informations émanant de «l’association des services de renseignements».
On voit ainsi très clairement à travers les pratiques de déstabilisation dont l’Arppi (association pour le respect des proches de personnes incarcérées) et autres collectifs font l’objet avec qui ou pour qui tous ces gens travaillent…
En effet, beaucoup de journalistes mais très peu d’images dans les journaux. M6, Bfm, Rmc, Afp, Télé Proche-Orient, télé anglaise, italienne, France info, seuls quelques prisonniers ont réussi à en capter l’essentiel sur France info, M6 ou Bfm tv en se répartissant les médias à regarder ou à écouter sans discontinuer.
Pourquoi ? On n’allait tout de même pas montrer aux Français la démesure des moyens mis en place pour l’occasion, des millions et des millions d’euros dépensés sans vergogne en ces temps de «crise» et de restriction, payés avec leurs impôts, ça ne fait pas très sérieux au regard du calme dans lequel s’est déroulé la manifestation.
Un journaliste a même précisé que seule la casse permettrait de faire passer le sujet aux infos !
Et puis tous ces flics costauds auxquels on a demandé devenir en cette journée dominicale, préparés, entraînés à rencontrer du «terroriste», du casseur, du vandale, de la vermine d’autonome ultra gauchisante, ils ont dû drôlement être déçus de ne rencontrer que des gens tristes et désespérés par un système véritable bras armé d’une société fragile qui a échoué dans toutes ses politiques : banlieues, logement, familiales et éducatives et qui bâtit des murs parce qu’elle n’a aucune réponse ou solution à apporter.
Double chagrin et double peine pour toutes ces familles et proches venues parler au micro de leurs proches morts en détention devant l’Opéra Bastille, une véritable volonté de les éradiquer elles aussi en occultant leur présence et leur parole tous les médias confondus.
Bienvenue en enfer, le monde est une prison, faut se mobiliser pour la grande évasion.
Catherine Charles - présidente de l’Arppi
Indymedia Nantes, 11 novembre 2009.