Intervention des chômeurs et précaires au conseil municipal de Rennes
Nous faisons circuler l’intervention que nous devions lire au Conseil municipal de Rennes le lundi 7 décembre. Nous avons été empêché d’entrer par la police.
Intervention au Conseil municipal des chômeurs et précaires
Comme dans au moins six autres villes en France, ce samedi 5 décembre avait lieu à Rennes une manifestation organisée par l’assemblée régionale des chômeurs et précaires dans le cadre des marches nationales du chômage et de la précarité.
C’est à 15 heures place de la Gare que nous avons appris que les autorités refusaient cette manifestation sous le prétexte fallacieux de non déclaration et d’une technoparade se déroulant en même temps à Rennes. Nous avons décidé que nous ne pouvions nous laisser exproprier la rue et que nous ferions entendre nos voix coûte que coûte. S’en est suivi ce qu’il est impossible de ne pas nommer un guet-apens. Les forces de l’ordre ont systématiquement bloqué tous les accès au centre-ville jusqu’à nous encadrer de telle manière que nous soyons totalement enfermés. Le cortège a toutefois réussi à rejoindre la Maison des associations place du Champ de mars où devait se tenir une AG des chômeurs, lieu négocié la veille et appartenant à la Mairie.
D’AG nous nous sommes retrouvés dans une souricière où d’un côté la gérante du lieu nous interdisait l’accès à la salle pendant que les flics nous encerclaient de manière de plus en plus serrée. L’attitude de la Mairie à ce moment là a été scandaleuse : elle a permis de nous livrer en pâture à une bande de flics assoiffés de sang qui n’avait pour seule mission, ce jour-là, que de tabasser du militant. Il ne s’est rien passé dans ce défilé et cela n’a pas empêché un déchaînement de violence délirant de la part des forces de l’ordre. Cinq camarades se retrouvent aujourd’hui incarcérés et inculpés. Inculpés, ironie et cynisme de la situation, de violence contre agent, là où c'est une bande de bêtes sauvages qui nous est tombée dessus.
Ce qui s’est passé samedi, pour aussi scandaleux qu’il soit, n’est pas une première à Rennes. Déjà depuis deux semaines, les chômeurs et précaires de Rennes se sont retrouvés face à une impossibilité d’occuper l’espace public : expulsion musclée de la mairie vendredi 27 novembre, fermeture systématique des Pôle Emploi et de la CAF à l’arrivée de deux ou trois d’entre nous. Depuis quelques semaines, les réquisitions du DAL 35 pour le logement des demandeurs d’asile sont suivies d’expulsions. Il y a un mois, la Grivèlerie, au 47 rue de Paris s’est également faite expulser à la suite d’une procédure d’urgence et avec force et moyen alors même que le lieu avait été déserté. Il y a bientôt deux mois la manifestation de soutien aux luttes de l’Ouest était interdite avec un déploiement policier digne d’une armée d’occupation.
Nous sommes là pour vous dire que la Mairie ne pourra se dédouaner de ce qu’il advient de Rennes. Depuis des mois, vous travaillez main dans la main avec la Préfecture pour imposer cette occupation policière. Vous en êtes même à l’initiative. L’épisode de la caravane des quartiers en témoigne. Le récit qu’en donne Le Mensuel de Rennes est très clair. Alors que quelques personnes avaient décidé de manifester à travers un repas sauvage organisé devant une salle où se tenait un débat avec notamment la maire de Rennes, vous n’avez pas hésité à travailler directement avec le ministère de l’Intérieur pour déployer un dispositif policier délirant ne protégeant que vos fantasmes.
Nous savons plus que jamais à qui nous avons à faire en s’adressant à vous. Vous avez décidé de faire de Rennes une ville morte que vous prenez le soin de nommer «ville propre». Votre hygiénisme nous fait horreur. Quand vous utilisez l’argument du respect de la démocratie pour autoriser et légitimer toute action politique, ce que vous tentez d’étouffer, ce sont des sentiments devenus de colère, de rage, de révolte.
Ce que vous appelez démocratie, ce ne sont que les moyens de perpétuer l’état des choses et que jamais ne s’exprime et ne se vive une réelle conflictualité capable de promettre un futur désirable défait de l’emprise de l’économie. Nous ne nous laisserons pas enfermer dans une alternative entre un mouvement social totalement pacifié qui ne menace rien et un conflit ouvert avec des forces de l’ordre que vous encouragez par vos provocations policières. Ce que vous nous refusez, nous le prendrons.
Nous ne sommes pas ici pour quémander quoi que ce soit, nous sommes ici pour exiger.
Exiger ce que vous nous avez refusé samedi, à savoir un espace public, un lieu d’auto-organisation social et politique comme cela a déjà eu lieu à Paris avec la Coordination des intermittents et précaires, ou encore à Dijon avec les Tanneries.
Exiger que la Mairie cesse ses politiques sécuritaires et consciente de sa responsabilité dans les violences policières de samedi, les dénonce et demande la libération immédiate des cinq inculpés et la levée de tous les chefs d’inculpation.
Exiger que la manifestation de samedi prochain soit autorisée et que la salle de la Cité nous soit réservée de 17 heures à 22 heures ou tout autre amphithéâtre situé dans le centre-ville pouvant accueillir 200 personnes.
Nous ne quitterons pas ce lieu public tant que nous n’aurons pas eu de réponse.
Manifestation samedi 12 décembre place de la Mairie 15h suivie d’une assemblée générale des chômeurs et précaires.
Chômeurs et précaires de Rennes.
Engageons dès maintenant une grève des chômeurs contre notre subordination à l’ordre économique
Communiqué de presse suite au refus du Conseil municipal de nous recevoir
Vérités sur notre présence au Conseil municipal de lundi 7 décembre.
Nous rappelons que depuis samedi dernier notre mouvement est victime d’un déchaînement de violences policières suivi d’un acharnement judiciaire. Il y a une volonté flagrante d’étouffer la voix des chômeurs.
C’est donc chargés de sentiments de révolte et de colère que nous nous sommes rendus à quelques dizaines de personnes au Conseil municipal de lundi.
Il s’agissait pour nous de faire admettre à la Mairie ses responsabilités dans les violences policières de samedi dernier, qui en refusant l’accès à une salle réservée pour une AG, nous laissait en pâture à des agents des forces de l’ordre désireux de tabasser du militant.
M. Delavau se prévaut de nous avoir donné l’accès à la salle et à la parole lors du dernier Conseil municipal, au même titre qu’au DAL 35.
La réalité est que si nous nous scandalisions de la restriction d’accès à cinq personnes par collectif, nous n’avons jamais eu la possibilité de rentrer dans la Mairie, même à cinq, l’accès y étant empêché par les forces de l’ordre.
S’en est suivi un vacarme bien légitime là où la légitimité du Conseil municipal n’existait plus pour quiconque soucieux des libertés publiques.
Qu’un morceau de porte ait cédé devant la colère des manifestants est un moindre mal quand la Mairie devient un pouvoir qui menace les libertés publiques.
Manifestation 12 décembre, 15h, à Rennes, place de la Mairie suivie d’une assemblée des chômeurs et précaires
Chômeurs et précaires de Bretagne, 8 décembre 2009.
À Rennes, les manifestants devant la porte de la mairie lors du conseil municipal
Trois délégations avaient demandé à prendre la parole devant le conseil municipal de Rennes, réuni ce lundi soir en séance publique. Pour éviter les débordements survenus lors du dernier conseil, début novembre, le maire avait décidé de ne laisser accéder que cinq représentants de chacune des délégations dans la grande salle du conseil.
À 19 heures, à l’ouverture des débats, le maire a proposé de donner la parole aux trois groupes, en procédant à leur appel. «Y a-t-il des représentants du mouvement des chômeurs et précaires ?» demande Daniel Delaveau. Pas de réponse. «Y a-t-il des représentants du DAL 35 (droit au logement) ?» Pas de réponse. «Y a-t-il des représentants du collectif des habitants de La Poterie ?» Nouveau silence.
«Les représentants de ces mouvements ont été informés qu’ils pouvaient intervenir, à condition qu’ils ne soient pas plus de cinq par délégation, observe le maire. Ils avaient parfaitement le droit d’accéder à cette salle et de s’y exprimer.»
Constatant qu’ils ne l’ont pas fait, aux conditions posées par la municipalité, Daniel Delaveau ouvre la séance du conseil municipal vers 19h15. Moins d’une minute plus tard, un groupe de manifestants situés place de la Mairie s’attaque à l’entrée Sud de l’hôtel de Ville, tambourinant violemment contre les portes, jusqu’à enfoncer l’un des deux battants.
À l’étage, salle des débats, le conseil suit son cours. Comme si de rien n’était, malgré le bruit.
Les manifestants se sont retirés vers 19h30, sans nouvel incident. Du côté du DAL, comme de celui des chômeurs et précaires, on jugeait inadmissibles les propositions du maire Daniel Delaveau, de ne laisser entrer que cinq personnes par délégation.
Leur presse (Ouest-France), 7 décembre.
Inquiétantes dérives autoritaires à Rennes
Face à la juste mobilisation des chômeuses-eurs et des précaires qui protestent contre la baisse de la qualité du service rendu au nouveau Pôle Emploi et la montée du flicage, l’État prend peur.
À Brest, à Rennes et dans beaucoup d’autres villes en France, les occupations de mairie, de boites d’intérim et d’agences PE se sont multipliées. À Paris et Lyon, la jonction a été faite avec les travailleurs et travailleuses sans papiers, premières victimes de cette précarité organisée.
À Rennes, la manifestation du 5 décembre, censée être le point d’orgue de ce mouvement a été interdite de fait, par d’incessants blocages policiers. Toute l’après-midi, le cortège a été provoqué, pris dans un étau entre les CRS et mis sous pression par une incroyable présence de la BAC.
À la fin de la manifestation, l’Assemblée Générale a été purement et simplement empêchée par la mairie et la police. Sans aucune gène, devant toute la population venue profiter des Transmusicales, les flics ont tabassé (matraquage, coups de pied contre des gens à terre…) le reste de manifestant-e-s acculé dans un coin et violemment interpellé cinq d’entre eux.
Après les déclarations de Sarkozy du 24 novembre qui envisageaient de «prendre des mesures contre les manifestations sur la voie publique», la violente répression de la manifestation lycéenne nantaise du 1er décembre, cette négation pure et simple des libertés fondamentales de manifester et de se réunir témoigne d’une dérive dangereuse du pouvoir.
Le groupe de Nantes de la Coordination des groupes anarchistes condamne ces agissements anti-démocratiques et apporte son entière solidarité aux camarades injustement interpellés. Nous appelons tout le monde à soutenir et à participer aux prochaines iniatives des chômeuses-eurs et des précaires en lutte.
Nantes, 7 décembre.
Rennes : L’œuf du manifestant était-il une arme ?
Les quatre manifestants interpellés samedi à Rennes, lors du rassemblement des «chômeurs et précaires», n’ont pas été jugés hier en comparution immédiate par le tribunal correctionnel. Les prévenus ont en effet refusé cette procédure, et ont préféré prendre le temps de préparer leur défense. La date de l’audience a été fixée au 18 janvier. Ils ont été laissés en liberté.
Une mixture bizarre
Trois d’entre eux, qui ne s’étaient pas laissé interpeller en douceur, devront répondre de rébellion. Le quatrième, un activiste d’«ultra-gauche» bien connu des services de police pour ses participations aux manifestations «dures» (il a notamment été soupçonné dans l’affaire du jet de lisier sur le président de l’université de Rennes 2, mais n’a pas été poursuivi, faute de preuves), a été placé sous contrôle judiciaire. Il lui est reproché d’avoir lancé des projectiles sur les policiers. Des projectiles dont on ne connaît pas encore précisément la nature : il s’agissait d’œufs, vidés de leur contenu, lequel avait été remplacé par une mixture bizarre, salissante et surtout irritante pour les yeux. Huile de vidange, solvant agressif, mélasse, produit lacrymogène ? La composition précise sera connue lorsque le laboratoire parisien de la police judiciaire aura rendu ses conclusions d’analyse. Selon la dangerosité des produits utilisés, qui pourraient constituer une arme, la qualification pénale du délit pourra être plus ou moins lourde.
Leur presse (Le Télégramme), 8 décembre.