Inculpé/es de la révolte du CIE de via Corelli à Milan : quelques nouvelles de Joy et des autres
Joy est une des retenu/es qui ont pris part à la révolte qui a éclaté au CIE (centre d’expulsion et d’identification, appellation des centres de rétention en Italie) de via Corelli à Milan le 13 août 2009. Une des grandes révoltes qui ont éclaté l’été dernier contre l’allongement de la durée de rétention à 6 mois.
Son témoignage lors du procès de cette révolte l’a rendue tristement célèbre puisqu’elle a osé y dénoncer les violences sexuelles infligées par l’inspecteur-chef du centre milanais, Vittorio Addesso, ses plaintes étant corroborées par ses compagnes de cellules et notamment par Hellen, une autre jeune fille inculpée suite à ces émeutes du 13 août.
Au terme du procès pour la révolte, Joy et 13 autres personnes, 4 femmes et 9 hommes, ont été condamnées à 6 mois de prison. Une fois cette peine achevée, tout le monde a été ramené en centre de rétention. Pour 6 mois encore.
Tout au long de cette année, en Italie surtout, mais aussi un peu ailleurs, l’histoire de Joy avait donné lieu à plusieurs mobilisations : rassemblements devant les prisons et les centres de rétention où elle a été enfermée, débats, occupations, présence à chaque fois fortement réprimée dans les manifs d’une banderole «Dans les centres de rétention en Italie la police viole»…
Le 8 juin, Joy et Hellen sont passées devant le tribunal de Milan pour être confrontées à l’inspecteur Vittorio Addesso et surtout pour être jugées pour calomnies envers ledit inspecteur.
Aujourd’hui, nous apprenons avec joie que Joy est enfin sortie du cercle infernal qui depuis 1 an lui faisait faire des aller-retours entre prisons et centres de rétention. Elle a obtenu un permis de séjour en tant que victime de la traite et de l’esclavage humains qui la contraint à rester plusieurs mois enfermée, sans téléphone ni sorties seule, dans une maison protégée gérée par une association afin de l’éloigner des menaces venant, entre autres, du réseau qui l’exploitait. L’ampleur prise par l’histoire de Joy lui a en effet permis d’échapper à l’expulsion et a permis que la justice et l’État italiens «plient» en octroyant ce titre de séjour, mais cela l’a aussi exposée médiatiquement, ce qui à un moment est devenu dangereux pour elle.
En tout cas Joy est contente, c’est cela qui compte et avant de rejoindre la maison protégée elle a voulu laisser un petit message (en plusieurs langues) à celles et ceux qui durant ces longs mois ont, de partout dans le monde, lutté à ses côtés : http://noinonsiamocomplici.noblogs.org/gallery/5927/i%20saluti%20di%20joy.mp3
Parmi celles et ceux qu’on a appelé les révoltés du CIE de via Corelli, Joy, Hellen et Florence sont donc sorties, «grâce» à un permis de séjour humanitaire octroyé au vu de leur situation d’esclavage, Mohammed, qui après la prison ne voulait pas retourner en rétention s’est suicidé en janvier et les autres croupissent toujours dans des CIE. Parmi ces «autres», Debby, Priscilla et Ibrahim qui continuent de lutter contre l’enfermement et l’expulsion. Et d’ailleurs à propos d’expulsion, Debby et Priscilla sont «inscrites» pour le charter européen de Frontex qui demain, jeudi 17 juin, déportera vers le Nigeria des dizaines de personnes ramassées aux quatre coins de l’Europe.
À Turin, où Debby et Priscilla sont enfermées, un rassemblement est prévu devant les portes du centre de rétention, par lesquelles elles doivent être emmenées. À Rome où de nombreux retenus nigerians de Ponte Galleria ont également été informés de leur départ prévu via ce charter frontex, un rassemblement aura lieu ce soir.
Bref, comme disent les camarades, après cette bonne nouvelle de la libération de Joy et Hellen, tant qu’existera le délit de clandestinité et que des personnes seront décrétées indésirables, tout continue.
Liste de diffusion Migreurop, 17 juin 2010.
