Égypte : Le peuple aux portes du pouvoir / Annonce de la "Déclaration numéro 3" de l'armée
17h03. Moubarak a démissionné — La nouvelle a été annoncée par Omar Souleimane. Le vice-président s'est brièvement adressé à la Nation, et a annoncé la démission du raïs «pour le bien de la République». Il délègue ses pouvoirs au Conseil supérieur des forces armées égyptiennes.
17h. Le nouveau secrétaire général du NPD démissionne — Hossam Badrawi a justifié sa décision en indiquant que l'Égypte avait besoin de nouveaux partis. «C'est une démission de mon poste de secrétaire géénral et du parti. La formation de nouveaux partis, d'une façon qui reflète une nouvelle façon de penser est meilleure pour notre société actuellement», a-t-il indiqué.
16h45. Un relâchement de la sécurité au Caire ? — Selon la BBC, des milliers de personnes scandent devant le Parlement «Ce gouvernement corrompu doit partir». Selon le correspondant de la chaîne sur place, la porte principale est très peu gardée. Al-Jazira fait le même constat devant le siège de la radiotélévision d'État : l'armée a abandonné et laisse les manifestants gérer le flot de personnes dans la zone. Selon CNN, les tanks gardant le palais présidentiel ont détourné leur tourelles des manifestants, suscitant les houras de ces derniers.
Leur presse (20 Minutes).
15h30. Des milliers de manifestants ont pris le contrôle de bâtiments administratifs dans la ville de Suez. Ils ne bougeront pas avant la démission de leur président, selon le journal Al-Arham (Le Parisien).
14h10. Manifestation à Suez — Des milliers de manifestants anti-Moubarak se sont rassemblées autour de dix bâtiments gouvernementaux à Suez après la prière du vendredi, selon des témoins cités par CNN. Les manifestants ne partiront pas avant que Moubarak démissionne, rapporte Al Ahram (20 Minutes).
Suez protesters occupy government buildings
Egyptian anti-goverment demonstrators perform the Friday noon prayer during protests in Cairo's landmark Tahrir Square, February 11, 2011, as they reacted with fury after the military threw its weight behind President Mubarak's attempt to cling on to power despite massive nationwide protests over the past 18 days.
Thousands of protesters in the Canal Zone city of Suez occupied three governmental buildings demanding that President Hosni Mubarak leave.
Eyewitnesses said that tens of thousands of demonstrators gathered after the Friday prayer and marched towards Arbeen Square, where there had been a bloody confrontation between the protesters and the police in late January.
The demonstrators occupied the governorate office, the municipality building and the Arbeen local office. Protesters carried photos of some of the 24 people who were killed in late January during the clashes (Al-Masry Al-Youm, 15h36).
16h25. À El-Arich, dans le Sinaï, des coups de feu ont été échangés entre manifestants et forces de l'ordre, faisant un mort, selon Al-Jazeera. Un millier de personnes ont attaqué un commissariat, lançant des cocktails molotov et brûlant des voitures. — 16h45. Al-Arabiya avance un bilan de 5 morts lors des affrontement à El-Arich, entre manifestants et forces de l'ordre. (Le Parisien).
16h10. Échange de coups de feu entre manifestants et policiers dans une ville du nord du Sinaï — À El Arich, un millier de manifestants s'est séparé du cortège principal, et certains ont lancé des cocktails molotov sur le poste de police, et mis le feu à trois voitures de police, indiquent des témoins à Al-Jzaira. Les policiers sont réfugiés sur le toit du bâtiment (20 Minutes).
Annonce de la «Déclaration numéro 3» de l'armée
Le Caire, 11 février 2011. 16h30. Le Conseil Supérieur des Forces Armées annonce qu'il s'apprête à faire une troisième déclaration. En guise de rappel : la première prenait position en faveur du peuple, la deuxième indiquait que le CSFA se portait garant des promesses faites par le président lors de son allocution télévisée du 10 février.
On annonce également une déclaration de la présidence de la République.
Il y a une forte probabilité que la troisième déclaration du Conseil Supérieur des Forces Armées annonce la mise à l'écart ou le départ pur et simple du président Moubarak ainsi que la mise en place d'un gouvernement de transition démocratique sous la haute autorité de Sami Anan avec un Omar Soliman également écarté.
Sami Anan est le Chef des Armées.
Il semble que ce soit ce scénario qui emporterait, pour un temps, l'adhésion du peuple mobilisé par millions dans les rues de l'Égypte pour un gouvernement civil, résolument civil.
Il nous semble enfin que l'armée déroule depuis hier un plan scénarisé en trois actes :
Acte 1 : Le 10 février, quelques heures avant le discours du président, annoncer dans la «Déclaration numéro 1» que le CSFA est du côté du peuple, tout en donnant au président et à Omar Suleiman l'autorisation d'abattre leur dernière carte (un discours patriotique vibrionnant) — sachant, bien évidemment, que la rue ne désemplira de toute façon pas. Le CSFA sait déjà qu'il ne aucun risque.
Acte 2 : Faire honneur au président, issu tout de même des rangs de l'armée, en faisant la «Déclaration 2» dans laquelle le CSFA se montre respectueux des choix de Moubarak et garant de ses promesses. Pendant ce temps, la rue enfle de plus en plus et Moubarak a déjà perdu tout espoir de restaurer son pouvoir. L'armée aura ainsi respecté son chef suprême tout en lui prouvant qu'elle ne peut plus rien faire pour lui et qu'elle doit maintenant se mettre au service de la nation.
Acte 3 : Étape que nous attendons toujours à 16h30 [heure du Caire, 15h30 heure de Paris]. En toute logique, l'armée devrait dire que, pour répondre à la demande du peuple elle assurera la mise en place d'un gouvernement de transition dont un des principaux objectifs sera la tenue d'élections libres et honnêtes. Nous entrerons alors dans le vif du sujet : clarifier les demandes du peuple et identifier les canaux et les processus plus «formels» par lesquels celui-ci compte se faire entendre (représentation, partis, formations politiques). Dans ce gouvernement, pas d'Omar Soliman, pas d'Hosni Moubarak.
Il y avait un indice dès hier sur la possibilité d'un tel scénario ou, en tout cas, de plusieurs déclarations en chaîne du CSFA. Il nous a semblé curieux, hier soir, qu'une voix de stentor de l'armée annonce à la télévision : «Annonce numéro 1». Que cette annonce soit numérotée (pourquoi serait-elle numérotée ?) laissait envisager qu'on avait peut-être prévu une annonce numéro 2 et numéro 3.
Dénouement et établissement de la vérité dans les heures à venir.
Cris d’Égypte, 11 février 2011 - 15h28.
Des officiers de l'armée se joignent aux manifestants
Le Caire 11 février 2011. 14h15. Après l'escalade de l'inquiétude depuis l'allocution télévisée du président Moubarak du 10 février, après la déclaration inquiétante du Conseil Supérieur des Forces Armées confortant le président dans son choix de ne pas quitter le pouvoir, il faut noter un mouvement de fond qui rend très optimiste sur l'issue que les Égyptiens souhaitent pour eux-mêmes et leur nation.
Depuis 48 heures, le régime semble perdre de plus en plus son emprise sur la presse d'État, sur la télévision nationale et même sur des officiers de l'armée qui se joignent aux manifestants ! Ils sonts 3 ici, 15 là, 16 ailleurs… combien sont-ils au juste ? Des dizaines semble-t-il, et leur nombre augmente d'heure en heure. Ce sont pour la plupart des officiers de rang moyen.
L'un deux qui s'exprime le soir du 10 février à l'antenne d'Al Jazeera est le Major Ahmed Shoman :
«Le gouvernement a perdu sa légitimité ! Monsieur le président, je vous en conjure, quittez le pouvoir ! (…) Ce pays ne vous appartient pas ! (…). J'ai remis mon arme à mes collègues, cette révolution est pacifique ! (…). Notre rôle est de défendre le peuple, pas le régime ! Le Général Tantawi (minitre de la Défense) n'est qu'un élément de ce système ! Vous aussi partez ! Monsieur Sami Anan (chef des armées) accomplissez votre devoir ! (…) Faites-les tous partir ! Monsieur le vice-président Omar Soliman, vous étiez responsable des services du renseignement pour la protection de la nation. Avez-vous protégé les biens de la nation contre le détournement de ses richesses ? Avez-vous défendu la nation ? (…) Ce que je veux dire au peuple (…) c'est que c'est lui qui, aujourd'hui, me protège ! Je vous en prie transmettez ce message : ce régime n'est plus légitime ! Monsieur Sami Anan, chef des armées, je vous en conjure, accomplissez votre devoir !»
Cris d’Égypte, 11 février.