Chauny tu n'es pas un ange
Depuis quelques semaines circulent sur Internet tract et communiqués appelant à une manifestation antifasciste à Chauny, le 27 mars. À l’origine de cet appel, on trouve le groupe UARA (Union, action, révolution, autogestion) Coordination libertaire. Derrière le mot d’ordre de «solidarité antifasciste», c’est un ensemble beaucoup plus large de choses que la coordination entend dénoncer.
La Coordination libertaire vit pour l’instant à l’abri des regards autres qu’électroniques. C’est par le biais d’Internet que nous avons pu joindre un membre de la coordination et obtenir des précisions sur la manifestation.
Qui est à l’origine ?
C’est «un groupe d'individus anticapitalistes, antifascistes participant à toutes les luttes contre les discriminations, explique notre interlocuteur. Les Axonais ou originaires de l’Aisne y sont majoritaires. Nous ne sommes, en tant que groupe, affiliés à personne mais individuellement, certains sont par exemple syndiqués ou membres d’associations diverses», la patte anarchiste restant particulièrement visible dans les propos. Notre interlocuteur assure ne rouler pour aucun parti même si NPA et PCF sont «plus ou moins considérés comme “amis”». Pour Dominique Lestrat, figure axonaise de l’anarchisme, «c’est un collectif créé pour l’occasion».
Côté communication, la coordination se fait pour l’instant discret. Difficile de prendre contact autrement que par le biais d’Internet. «Nous rechignons à transmettre nos numéros de portable quand un SMS peut vous emmener en garde à vue.»
La mobilisation serait en train de se structurer avec plusieurs organisations du département, précise Dominique Lestrat, membre de la Fédération anarchiste qui devrait prendre part au mouvement, s’étant assuré «que ce n’était pas un prétexte pour créer des affrontements».

Pourquoi cette manifestation ?
La tenue d’une telle manifestation peut surprendre, les tensions à Chauny semblant s’être apaisées depuis quelques semaines. «Pour ce que nous savons, l’ambiance n’est pas des plus chaleureuses», objecte le membre de la coordination.
Le titre du tract clair et concis — «Appel à une manifestation antifasciste» —, abrite des intentions beaucoup plus larges. La Coordination libertaire assume son qualificatif : «Notre objectif est de vivre assez vieux pour voir la chute du capitalisme et la disparition de tout pouvoir centralisé, l’abolition des frontières et la liberté de circulation, d’installation, partout et pour tous.»
Le président de la République en prend également pour son grade. «L’État français, et son représentant actuel, est un État qui tend au fascisme. Sarkozy est au service du capital plus qu’à celui du pays.» D’où la décision de programmer la manifestation le 27 mars, le «No Sarkozy day» (www.no-sarkozy-day.fr). Avec le slogan «ni Sarko, ni fachos».
Le rassemblement est pour l’instant prévu à 14 heures à la gare. «Nous voulons une marche en ville, de la gare à l’hôtel de ville afin d’interpeller la municipalité.» Et le cortège pourrait être très hétéroclite. «Les gens qui manifesteront le feront pour certains juste contre le racisme, certains pour les droits de l’homme, d’autres contre Sarkozy et sa politique fascisante, d’autres même contre la municipalité qui ne fait rien sinon filmer sa population sous prétexte de mettre fin à l’insécurité.» Bref, il y en a pour tout le monde !
La sécurité en question ?
Les organisateurs ont-ils peur de dérapages ? «Que de ceux de la police.» Notre interlocuteur garantit que tout s’organise pour qu’elle se déroule au mieux, conscient du risque «que des fascistes viennent dans l’idée de perturber cette manifestation». L’organisateur promet que des contacts seront pris prochainement avec les élus et les forces de l’ordre pour assurer le bon déroulement de ce rassemblement.
Élus et gendarmes dans le flou
«Nous n’avons pas d’élément, aucun contact.» Jean-Pierre Cazé, l’adjoint à la sécurité, prend cet appel à la manifestation avec méfiance. Et incompréhension. «Pourquoi faire ça à Chauny, alors que ça s’est calmé ?» Faute de plus d’informations, l’élu chaunois évoque «des rigolos qui veulent se faire mousser (…), tenter de mettre la pagaille dans Chauny.»
Les gendarmes chaunois, qui auront à assurer la tranquillité de la manif’, sont eux aussi «dans le flou, avoue le major Bassez. On ne sait pas qui est l’organisateur. Et quand on ne sait pas, c’est délicat…»
Leur presse (Rémi Cazamea,
L’Aisne Nouvelle), 3 mars 2010.