C'est pas nous, c'est œuf !
Nous publions un tract distribué par la manifestation de samedi dernier (12 décembre) à Rennes, appelée «pour la grève des chômeurs et contre la répression».
À cette occasion, nous, collectif des Bonnets Rouges réitérons un appel à soutien pour organiser la défense du procès (voir article).
La manifestation de samedi dernier a jugé nécessaire de revenir sur les arrestations de la précédente manif des collectifs de chômeurs, nous publions leur tract en intégralité.
Pour mémoire, samedi 5 décembre se tenait la dernière manif des marches de chômeurs à Rennes. Interdite et matraquée, elle s’est terminée sous les coups de tonfa et de rango des méchants UTEQ et baqueux.
Chauffée à blanc par le maquillage improvisé d’un de leurs collègues par un malheureux œuf couleur, la flicaille a traîné quatre camarades devant le tribunal correctionnel. Tous ont demandé un report, accordé au 18 janvier, 14 heures au tribunal de Rennes.
Chefs d’inculpations : une rébellion, trois violences policières avec des ITT de moins de huit jours. Un camarade particulièrement est dans le viseur du procureur qui ne jure que par son incarcération, chargé uniquement par de faux témoignages.
Pour organiser la défense des camarades, nous cherchons activement à regrouper tous témoignages écrits, toutes photos ou vidéos pouvant faire tomber les faux témoignages des flics qui pèsent lourdement dans le dossier.
N’hésitez pas une seconde à nous contacter, nous répondrons rapidement pour vous donner la marche à suivre.
Contact : MCPL / Bonnets rouges
Prochain rendez-vous des Bonnets Rouges : vendredi 18 décembre au bar La Bascule à 14 heures. On y discutera comment s’organiser pour donner de la résonnance à cette affaire, et on pourra parler des questions posés à la fin de ce tract.
C’est pas nous, c’est œuf !
L’absence de quelques-uns d’entre nous aujourd’hui est une protection nécéssaire vu les probabilités qu’il y a pour que la police joue à nouveau les renards dans un poulailler. Cependant, nous tenons à tenir une parole sur les événements récents, suite à notre arrestation le samedi 5 décembre au terme de la manifestation régionale des collectifs de chômeurs. Cette parole n’est pas seulement celle de quatre individus face à la justice, mais celle d’une partie d’un mouvement, dont la manifestation d’aujourd’hui est un nouveau rendez-vous.
Nombreux sont ceux qui sont sous le joug d’institutions qui ont comme but premier le contrôle des individus, en vue de les adapter aux exigences et aux caprices de l’économie. La répression est une condition commune, tant à Pôle Emploi, que dans la rue. Elle existe autant dans les injonctions d’un conseiller d’insertion que dans les élucubrations sécuritaires d’un procureur de la République. La solitude de l’inculpé face à la justice est la même que celle du chômeur face à Pôle Emploi. Voilà en quoi la manifestation d’aujourd’hui prend tout son sens. Il y a du sens à venir en nombre occuper Pôle Emploi pour empêcher des radiations, comme il y a du sens à s’organiser pour arracher à la prison ceux mis en cause par des témoignages douteux de flics aux ordres.
Depuis quelques décennies, disons depuis les «années de plomb», le paradigme politique le plus en vogue est celui du gouvernement par la terreur : il s’agit que les actes, les pensées, les comportements, les réflexes des individus et les décisions des institutions soient gouvernés par ce climat. Depuis l’affaire de Tarnac ou, plus récemment, celle de Poitiers, les gouvernants usent d’une méthode désormais bien huilée, le scandale médiatico-policier, afin de construire la figure de leur ennemi politique ou «ennemi intérieur». La chose qui semble nouvelle, c’est que depuis peu, cette méthode s’auto-entretient, parce qu’elle a déjà fabriqué suffisamment de preuves médiatiques pour qu’au moindre communiqué de la police, tous les médias et les élites politiques s’emballent. Et pour peu qu’elles loupent le coche, ces élites ou dirigeants verront leur place sauter comme ce fut le cas à Sant-Lô : les consignes sont claires, la police doit être à la hauteur.
Il faut toute l’imagination d’un procureur pour voir dans un œuf, «une arme», et donc qu’un poulailler, selon ses propres termes, devienne «un petit atelier de confection». Certainement conscient du ridicule de la situation, il a même dû trouver une description terroristante, à savoir «projectile ovoïdal contenant un produit corrosif», pour qualifier ce que le commun des mortels appelle un œuf. Par-delà ce délire sécuritaire, nous tenons à réaffirmer l’innocence de notre camarade. Et quand bien même : jeter un œuf ne saurait justifier seul un tel acharnement du parquet, de la police et des médias. Nous tenons donc à démentir l’adage juridique «qui jette un œuf, jette un bœuf», car pour nous «qui jette un œuf, jette un œuf », et c’est comme ça. Tout cela peut nous paraître ridicule et risible, sauf qu’en l’occurence, la liberté de quatre personnes est en jeu.
La responsabilité première en incombe à la mairie de Rennes. La directrice de la Maison des associations, rencontrée la veille par le MCPL, s’était engagée auprès d’eux à mettre à la disposition de la manifestation du 5 décembre, l’espace nécessaire à la tenue d’une assemblée générale. En refusant, en toute connaissance de cause, l’entrée aux manifestants, elle a permis au piège policier de se refermer. Tout laisse à penser qu’elle a eu des consignes visant à faciliter les arrestations. Nous ne pouvons pas lui pardonner le cynisme et le mépris dont elle a fait preuve à notre égard… Grâce à elle, samedi dernier, la BAC a eu le champ libre.
Tous ces éléments nous laissent face à plusieurs questions : Qu’en est-il de la nécessité d’occuper l’espace public, comme outil politique indispensable à tout mouvement ? On ne peut pas nier qu’une ligne rouge se resserre autour de nos actes les plus communs. Autre chose : Comment prendre en charge ce que certains annoncent comme le signe de la mort d’un mouvement, à savoir «l’anti-répression», en le liant à une lutte visant à imposer un rapport de force aux institutions ? Ce qui est en jeu dans ces luttes nous est vital.
Indymedia Nantes, 15 décembre 2009.