Art content pour rien / Pixação

Expo - Fondation Cartier
Né dans la rue, star des musées
La fondation expose des œuvres d’artistes internationaux et explore le mouvement et ses origines : graffiti superstar.
Drôle d’ironie du calendrier, alors que soixante personnes viennent d’être jugées pour avoir tagué des rames de métro, des trains, des murs, le graffiti n’a jamais été aussi célébré… dans les musées. Après T.A.G. au Grand Palais en avril dernier, et plusieurs expos temporaires dans diverses galeries, c’est la Fondation Cartier qui invite les graffeurs. Avec, en préambule, l’avertissement suivant : «La Fondation rappelle que la destruction, la dégradation ou la détérioration de biens appartenant à autrui par inscriptions, graffitis, tags ou gravures sans autorisation préalable est punie de lourdes peines selon le code pénal.»

Dans l’espace urbain, le graff est donc interdit, libre, élaboré dans l’urgence, éphémère. Ici, il est autorisé. Au rez-de-chaussée, dix artistes internationaux invités. Dans Death for glory, Patrice Poch convoque Elvis et Hendrix, James Dean et Kurt Cobain : disparus mythiques, fixés au pochoir. Vitché puise dans les cultures traditionnelles, mêle objets en bois trouvés dans la rue, fer, boue, toile pour un hommage à l’univers du cirque. Ailleurs, des pans de murs, aux œuvres plus lisses.
Le véritable intérêt de l’exposition, c’est la plongée profonde dans l’univers des graffeurs. Une évocation des origines historiques, politiques et sociales du mouvement à New York au début des années 1970, entre films, photos, notes de police — voir le «profil type du délinquant», captivant ! Et surtout une programmation documentaire passionnante, qui nous emmène des États-Unis à la France, en passant par la Suède où les writers étaient considérés comme des aliénés. Ne pas manquer Pixo, film sur les pixadores en action. Leurs tags au goudron sont apparus dans les années 1960, dans les rues de Sao Paulo. Comme beaucoup d’autres, ils motivent leur action par le triple besoin de reconnaissance sociale, d’adrénaline, de protestation. La phrase de l’un d’entre eux claque comme un manifeste : «La voix du peuple est sur les murs».
Né dans la rue - Graffiti, jusqu’au 29 novembre, Fondation Cartier, Paris 14e. Fermé lundi. 01 42 18 56 50.
Leur presse (Nedjma Van Egmond, Le Point), 24 septembre 2009.