Appel à soutien : procès 8 décembre, Tours

Publié le par la Rédaction


Le 22 septembre 2009 à l’aube, la maison de retraite «les Glycines», réquisitionnée quelques jours auparavant par des demandeurs d’asile et des SDF, a été expulsée par les forces de l’ordre, laissant une trentaine de personnes à la rue.
Les militant-es soutenant cette occupation, ainsi que les habitant-es sont alors allés manifester auprès de la mairie où ils ont été reçus violemment par les mêmes forces de police que le matin : quatre arrestations avec gardes à vue, une arcade ouverte, des lunettes cassées, des hématomes… (Lire ci-dessous les détails de la journée et une analyse de celle-ci.)
Au final, trois comparutions au tribunal ont lieu pour : résistance avec violence, rébellion avec violence, violence volontaire sur agent, vol.
Ces faits travestis qui leur sont reprochés comme les preuves avancées, construites de toutes pièces par la flicaille pour étayer les accusions les plus fantaisistes, laissent augurer un procès inique, dans la lignée de tant d’autres…
Nous appelons à venir soutenir les camarades, le 8 décembre à 8H30 devant le palais de l’(in)justice de Tours.


Rappel des faits

Tout comme à Calais, mardi 22 septembre la préfecture d’Indre-et-Loire et sa petite armée de fonctionnaires et de flics tourangeaux se sont de nouveau distinguées par leur savoir-faire irréprochable et leur tact, tout compte fait très professionnel.

À 6 heures, ils débutaient la journée à grands coups de pompes pour expulser le squat des «Glycines», jetant à la rue une bonne vingtaine d
occupants, dont pas mal denfants, et bazardant toutes leurs affaires avec, sur le trottoir.

Ce lieu réquisitionné devait permettre de faire face aux marasmes des autorités politiques dites «compétentes», qui ont toutes jusque là refusé de satisfaire à leurs obligations légales en matière de logement des demandeurs d
asile. Toutefois le préfet a fini par se réveiller, découvrant avec encore un bon train de retard cette initiative de différents collectifs, associations, demandeurs dasile et squatteurs… Tous ces occupants quils soient D.A. ou non, se sont rencontrés autour du même sentiment détrangeté face à ce monde qui se maintient de toutes ses forces et sa violence dans une gestion infinie de sa propre déroute.

Une fois jetés à la rue, nous nous sommes tous directement retrouvés, pour que soit au minimum dégagée une solution de relogement pour les familles, sur le parvis d
une de ces autorités «compétentes». Devant les portes de la Mairie, sest alors interposée une rangée de flics et de vigiles, nous refusant toutes possibilités de négociation et de rencontre avec un élu. Nimporte lequel aurait pourtant fait laffaire. Comme à leur habitude, ils nous affirmèrent protéger un bâtiment vide. Pour en être sûrs nous avons donc insisté, frappant dans nos mains et toquant aux vitres de la forteresse socialiste. Peut être certains dentre nous, les éléments les plus «incontrôlables» dira-t-ON, ont-ils dans la confusion des évènements osé chanter ? Nous nen sommes plus très sûrs…

Néanmoins, arrivèrent précipitamment de nombreux renforts évidemment indispensables, nous arrachant un mégaphone pour l
exploser au sol. Lun des flics tenta alors de nous agripper, mais gêné par le zèle de ses coéquipiers, il tomba plutôt maladroitement dans les escaliers. Faut-il ici préciser que nous retrouvions une bonne partie des mêmes troupes, qui lors de lexpulsion des «Glycines», et en maintes occasions déjà, sétaient permis très ouvertement et en public de nous menacer individuellement de représailles. Bref, tout congestionné de colère, le policier se relevant se mit à décocher des coups, frappant lun dentre nous en plein visage, lui éclatant les lunettes et lui ouvrant larcade. Arrêté, il sera ensuite conduit à lintérieur de la mairie. Il aura au moins fallu ça, pour que lun de nous pénètre les murs de cette enceinte fortifiée. Une autre personne se fit rattraper dans un coin de la cour par le même flic. Dautres policiers vinrent alors en faction devant, masquant ainsi les conditions dinterpellation plutôt violentes.

Souhaitant cesser là le massacre, les familles et leurs soutiens partirent par l
une des artères les plus fréquentées de Tours. Mais la BAC, tout de noir vêtus et sans que rien ne permette de les identifier, se jeta de nouveau sur le groupe, Taser à la main, matraque et coups de tonfa dans les genoux, raflant ainsi deux nouvelles personnes au milieu de la cohue.

Les quatre interpellé-e-s seront gardé-e-s 25 heures en garde à vue, leurs auditions n
ayant pris respectivement quun quart dheure chacune. Leur seront reproché entres autres, rébellions, violences sur agents, incitations à lémeute, et le plus magistral de tous : vol dune casquette de flic. Surement simaginent-ils que tout comme eux, nous partageons un certain fétichisme pour les attributs républicains. Toutefois il y a de quoi s’inquiéter, car cette fois-ci, cest une casquette quils ont glissée dans les poches de nos sacs, mais quinventeront-ils la prochaine fois… ?

Entre les blagues vaseuses des policiers et leurs propos habituels sur la fameuse «préférence nationale», l
un dentre eux sest tout de même permis de dire, à un camarade en train de se rhabiller devant lui, suite à une fouille obligatoire : «Rhabille-toi vite avant que je te pète la rondelle».

Leurs rapports sont aussi extravagants que maladroits, faisant état de coups de mégaphone portés au visage, etc. Le montage fantaisiste des faux témoignages et des fausses preuves relevant d’un bricolage hasardeux (jusqu’à quand ?), le procureur a du abandonner une partie des chefs d
inculpation, mais afin de ne pas désavouer complètement ce tabassage en règle, les poursuites judiciaires demeurent.

Moralité

Si t
’es flic 2009,
… Blanc, mâle et catholique, t’as carte blanche :
Tu peux t’amuser sans limite avec tes copains, par exemple à écraser les petits gamins des quartiers sur les passages cloutés (cf. par exemple en juin 2007 à Marseille, Nelson, 14 ans, fauché par une voiture de police alors qu’il traversait la rue sur un passage piéton. Verdict : un an avec sursis pour Yohan Bensadoun, le chauffeur, stagiaire à l’époque et désormais titularisé).
Plein d’autres activités ludiques t’attendent (par exemple, organise des «tournantes» avec ta jeune collègue, comme au commissariat de Joué-lès-Tours il n’y a pas si longtemps…), sans oublier les grands classiques (Street Fighter, Happy Hours etc.), tout dépendra de ton imagination.
… Si t’es Arabe, ce sera un brin plus compliqué et il te faudra franchir quelques épreuves éliminatoires avant d’entrer dans la grande famille (cf. les témoignages édifiants sur Regarde à vue : Sans casque ni bouclier et Paroles de policiers).
Et si tes fins de mois sont un peu raides, paie-toi quelques outrages, ça mettra du calva dans le café !

Si t’es manifestant en 2009 :
Mieux vaut pour toi être aux Jeunes Populistes ou faire une cyber-action et militer à coups de clics derrière ton PC.
Mais si jamais l’idée saugrenue te prend d’aller dans la rue à plusieurs («en bandes organisés», donc…), ne serait-ce que pour réclamer l’application de la loi, du droit d’asile et porter assistance à des personnes vulnérables mises en danger, ton humanisme radical n’est pas tolérable, pour toi, ce sera la double, voire la triple peine : coups, insultes, séquestration et enfin, racket légalisé et séjour tout compris à l’ombre des barreaux.
«Le pays des droits de l’Homme», c’est bon pour le folklore républicain, faire venir les touristes et se refaire une santé à la tribune de l’ONU.

Si les tonfas étaient en mousse, si les uniformes étaient juste sortis pour Carnaval, toutes ces représentations grandguignolesques des forces du désordre, ce 20 septembre à Tours comme d’autres jours et ailleurs, prêteraient à rire, tant ces spectacles de rue, au déroulé bien rôdé, s’inscrivent dans la grande lignée du comique troupier de tradition française, entre le gendarme de saintTropez et les Charlots.

Hélas, les figurants de ces représentations s’y croient beaucoup trop, les metteurs en scène manquent de légèreté comme d’inspiration, et une certaine lassitude gagne le public. Hélas, les coups, les insultes, les humiliations et les condamnations sont bien réelles.

Hélas, ces gesticulations pathétiques d’un pouvoir aux abois tentant vainement de faire oublier son discrédit de plus en plus absolu ont des répercussions bien réelles, faites d’humiliations, de douleur et de colère. Mais ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort, et une fois de plus, le pouvoir sème les graines de son effondrement.

Loin de voir dans ces événements l’expression singulière de conceptions spécifiquement sarkozystes du pouvoir, nous voyons au contraire, ici comme ailleurs, derrière son règne, le glissement continu, le dérapage sourd d’une société malade, sans avenir, dont tout ce qui constitue «l’élite» lui intime de courir encore plus vite vers l’abîme. Nous refuserons toujours cette course absurde.

Ces événements illustrent à nouveau que la machine d’État ne sert que les intérêts d’une minorité possédante, confortablement assise sur le cadavre de l’égalité républicaine.

Ils rappellent également l’utilité universelle de boucs émissaires, quand partout l’échec des «réformes» est patent.

Après l’étranger, l’ultra-gauchiste. Après le migrant, le simple quidam qui ose encore s’offusquer que des gamins dorment à la rue, quand tant de maisons sont laissées closes.

Ces catégorisations que tente d
établir l’État et qui sont allègrement reprises dans les médias, visent à marginaliser nos luttes pour une société plus égalitaire, en y distillant la peur et la division. Ce genre de politique qui justifie la recrudescence et la banalisation des violences policières, conduit à nous cloisonner toujours plus, à nous enfermer et parfois pire à dénoncer notre voisin.

Dés lors, la violence et la répression ne s
arrêtent plus même aux murs des commissariats, on les retrouve partout, que ce soit dans le silence citoyenniste du plus grand nombre, ou dans les foyers de micro-fascismes qui parcourent la société.

Explosion des classes dangereuses ou avènement d’une société carcérale ?

Si la population française ne croît que légèrement, il n’en est pas de même du nombre de gardé-e-s à vue (plus de 577'000 gardes à vue en 2008, soit une hausse de 35% en 5 ans !), du nombre de détenus (31'000 en 1981, plus de 50'000 en 2001, plus de 63'000 en 2008) comme de la durée des peines (doublement entre 1975 et 2000, triplement des très longues peines depuis 1996). La population française est-elle devenue si dangereuse ? Il est plus probable que nous nous orientons vers une société carcérale, une société de contrôle, une société totalitaire que l’on voit chaque jour s’esquisser davantage.

On ferme les hôpitaux, les postes et les écoles, conspués comme les vestiges d’une conception «soviétoïde» de la France, mais à la place, on bâtit des nouvelles prisons high-tech. Qui a dit qu’il n’y avait plus de projet de société dans ce pays !

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