Élections professionnelles dans l'éducation : voter utile, c'est voter la grève !

Comme tous les trois ans, le ministre de l’Éducation nationale s’offre le luxe d’un pugilat public entre les différentes listes syndicales. Les personnels savent pourtant que ce n’est pas au fond des urnes et dans le cocon de l’isoloir, qu’ils exercent leur métier ou bien qu’ils mènent leurs luttes. Dans ces isoloirs, pas d’élèves, pas d’AG, pas de collègues… et ce n’est pas non plus là que se joue le sort des réformes qui secouent aujourd’hui l’école. Pourquoi faudrait-il qu’ils aillent y puiser un quelconque espoir de jours meilleurs ?
Pourtant, tous les trois ans, ces élections sont l’occasion de découvrir une ribambelle de sigles exotiques et complexes qui retourneront ensuite, pour un certain nombre d’entre-eux, vers une lente et confortable hibernation quadri-annuelle à l’abri des salons cossus de l’administration. Même un vote «oulipien» (par exemple, celui qui a le sigle le plus long, ou sans aucune consonne…) peinerait à bousculer l’inertie paritaire.
Non sans une certaine malice, les services du ministère observent goguenards cet étalage bariolé de listes où s’affichent, dans la plus indescriptible confusion, les subtiles découpages en corps et en statuts, comme autant de divisions entre les personnels (le prof de sport n’a donc pas le même bulletin que son collègue prof de musique… ses «commissaires paritaires» n’hiberneront pas dans la même grotte !).
Comme pour les Jeux olympiques, dont on ne sait plus qui de l’un ou de l’autre détermine le calendrier, les participants se doivent de marquer une trêve : il est interdit de tenir une réunion — conseil de classe, de discipline, réunion parents-profs — le jour du scrutin, sans que personne ne sache vraiment si les expulsions d’enfants scolarisés, les descentes de chiens policiers ou les mises à pied sont également frappées d’interdit pour 24 heures…
L’idéal olympique stimule assurément le goût de l’exploit et du sacrifice chez les concurrents en lice. Ainsi cette année, en intersyndicale et de manière «unitaire» (sic), ils ont suspendu tout mouvement contre le ministre pour économiser leurs forces afin de s’entre-déchirer entre-eux. En déposant les armes pour mieux porter les urnes, peut-être aussi ont-ils craint que les cabines de vote ne parviennent plus à assourdir les cris de colère des personnels… Pourtant, 240.000 comme le 20 novembre dernier — ou même 475.664 [nombre de participants aux dernières élections] — isoloirs en manif, côte-à-côte, ça aurait une autre gueule syndicale, non ?
CNT-FTE, 1er décembre 2008.
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