Troisième jour d'occupation de la halte-garderie Giono - People and Baby
Troisième jour d’occupation de la halte-garderie Giono - People and Baby
Les salariées de la section CNT People and Baby licenciées et mutée ainsi que les parents en sont au troisième jour d’occupation de la halte-garderie Giono. La solidarité des parents et des passants est grandissante face au mépris du PDG Christophe Durieux.
En effet, après une première journée d’occupation sans la moindre ouverture de dialogue avec les salariées en lutte, le PDG a souhaité montrer un autre visage dès le lendemain. Le jeudi 15 avril un renfort de personnel a été envoyé à la halte-garderie par la direction, et les parents ont pu constater les efforts de la direction en matière d’accueil. C’est en effet un vigile, installé dans le hall d’entrée qui accueille les parents et leurs enfants. Ce même vigile a été chargé au cours de la journée de jeudi d’établir le dialogue social en empêchant la représentante de la section syndicale CNT d’accéder à son lieu de travail. Afin d’accélérer les négociations, un deuxième vigile est présent depuis ce vendredi 16 avril. La direction montre une fois de plus que son vernis social se fissure puisque la seule réponse à des demandes de réintégration légitimes, est l’envoi de milices patronales privés.
Nous avons d’ailleurs pu découvrir lors de la conférence de presse qui se tenait jeudi matin que la maltraitance de la direction ne touche pas que la halte-garderie Giono. Que beaucoup trop de salariées souffrent encore en silence et subissent des pressions quotidiennes, qu’elles soient salariées à People and Baby ou à Enfance pour tous, l’association dirigée par Odile Broglin et qui siège dans les mêmes bureaux que la direction de People and Baby.
Du côté des politiques de la ville de Paris, il semble que cette situation devienne embarrassante. Sous prétexte de neutralité mais surtout parce c’est la ville de Paris qui a donné ces marchés publics en gestion à People and Baby, c’est presque le silence radio. Pourtant les sollicitations des parents et des salariées n’ont pas manqué. Parmi les soutiens de la lutte, le groupe PC du conseil de Paris a publié un communiqué dans lequel il demande le retrait de la délégation de service public à toutes les structures People and Baby de la ville de Paris. En tous les cas, le PDG Christophe Durieux, qui nous a dit au début de la lutte qu’on lui cassait son marché, ne semble pas encore avoir pris la mesure de son action. La simple réintégration de toutes les salariées suffirait à mettre un terme au conflit, mais la fierté patronale semble l’emporter sur tout le reste.
L’occupation et la lutte continuent avec une fête de quartier organisée ce vendredi soir à partir de 18h30 devant la halte-garderie au 3 rue Giono (13e arrondissement).
Fédération CNT santé social, 16 avril 2010.
Le blog de la lutte
Alertez les bébés !
Accusées d’avoir laissé traîner de la mort-aux-rats dans les bacs à jouets, cinq employées d’une crèche privée parisienne se sont découvert des soutiens du feu de Dieu en la personne des parents-clients et de quelques activistes inventifs. Les gluants ne sont pas une marchandise !
Le 31 mars à 18 heures, à la halte-garderie Giono dans le XIIIe arrondissement de Paris, Christophe Durieux, patron de People and Baby, présente sa nouvelle équipe de professionnelles aux parents-clients. Arrivé sur sa belle grosse moto, il traverse la petite foule rassemblée là avec tracts et banderoles, faisant mine de ne pas ouïr les solgans qui fusent : «People and Baby exploite et licencie, ça suffit !», «Les patrons licencient, licencions les patrons !» Des drapeaux CNT, NPA, Sud ondoient derrière le comité de soutien créé par des parents. Deux heures après, les darons sortent furax de la réunion. Durieux leur avait menti : pour justifier l’absence des cinq salariées, il avait prétexté des arrêts maladie ou des congés. Lorsqu’il sort à son tour, le patron, pris à partie par la centaine de manifestants exigeant qu’il rencontre l’ancienne équipe, est contraint à regargner la crèche en lâchant : «Vous aller me pourrir mes marchés !» Deux heures plus tard, c’est la police qui l’escortera jusqu’à sa moto, sous les huées de la foule, qui suggère aux flics de passer les menottes à ce «patron voyou».
Sophie, Virginie, Assia, Marion et Cindy ont été mises à pied le 2 mars, au lendemain d’une grève pour de meilleures conditions de travail, une augmentation de salaires, la suppression des heures sup’ et une convention collective. «Avant la grève, Durieux et ses collaboratrices nous ont proposé de signer des ruptures de contrat. Ils voulaient déjà se débarrasser de nous !», rappelle Sophie. En février, elles avaient créé une section CNT, premier syndicat dans la boîte. Cela a déplu à celui qui se dit «patron progressiste», ayant l’habitude de manier un personnel jeune, féminin et plutôt malléable. À la représentante syndicale qui lui demande un rendez-vous, il lance : «En ce moment, je te vois plus que ma femme !»
Des mises à pied conservatoires [La mise à pied conservatoire est une sanction qui suspend le contrat de travail et prive de fait les employés de leur salaire.] sont alors prononcées pour un manquement à l’hygiène et à la sécurité des enfants, sur la base d’un dossier photo crapuleux et sans valeur légale, montrant entre autres une caisse à jouets contenant de la mort-aux-rats ! Avant ce jour, aucune des salariées n’avait fait l’objet de la moindre sanction. La médecine du travail fera remarquer lors de sa visite que «les anomalies reprochées aux salariées sont du domaine des responsables». par ailleurs, l’inspection du travail s’interroge sur «le caractère consécutif et groupé des procédures». Malgré cela, début avril, trois d’entre elles ont été licenciées et les deux autres réintégrées — une à Giono et l’autre mutée à la Défense, chez Total. À même accusation, traitement différent…
People and Baby a été fondée en octobre 2004 par Odile Broglin, épouse de Durieux, et Thomas Fabius, fils de Laurent, qui a revendu ses parts dans la société avant d’être poursuivi pour escroqueries et malversations en 2009. Ils avaient profité du Plan crèche, devenu Dispositif d’investissement petite enfance (DIPE), qui permet la délégation de gestion par les municipalités, avec une prise en charge de 80% de la création et 60% du fonctionnement par la CAF. À l’heure actuelle, l’entreprise gère une soixantaine de crèches en métropole et dans les DOM-TOM, ainsi qu’en Suisse et au Luxembourg — crèches d’entreprises (Total, Orange, Philip Morris) ou municipales à gestion déléguée. Comme les structures d’accueil pour la petite enfance manquent cruellement, les mairies ont la possibilité, depuis janvier 2004, de confier la gestion des crèches à des privés, sans se soucier du devenir des salariés. Grâce à la Révision générale des politiques publiques, People and Baby emploie plus de 1000 personnes qui ne bénéficient ni de CHSCT [Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.], ni de convention collective et qui sont représentées par une délégation unique du personnel [La Délégation unique du personnel (ou DUP) regroupe les délégués du personnel et les élus du CE. Elle ne peut être mise en place que lorsque l’entreprise compte entre 50 et 199 salariés.].
Pas d’augmentation donc pour les salariées. Du fric, pourtant, People and Baby doit en avoir un peu, puisqu’elle semble être liée de près à People and Business Consulting, boîte de conseil en communication d’entreprises faisant dans l’évènementiel — galas, «Team building», etc. —, hébergée à la même adresse que People and Baby et joignable au même standard, et dont Durieux est également PDG. Comme on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même, la formation dans les crèches People and Baby est assurée par l’association loi 1901 Enfance pour tous, créée en mai 2008, dont la présidente n’est autre que … Odile Broglin ! [Lire article paru dans le Républicain lorrain du 27 février 2010, intitulé «Des relations troublantes».] Association dont les méthodes de gestion du personnel semblent également expéditives.
Au lendemain du rassemblement, un CE devait se tenir au siège de la société, avenue Hoche. Comité d’entreprise perturbé par une vingtaine de trublions. Les revendications sont les mêmes que la veille, mais Durieux a pensé à une alternative : «Je peux vous conseiller pour monter votre propre structure d’accueil associative.» Merci patron ! Quelques heures plus tard, l’intersyndicale (CGT, Sud, CNT) se plantait devant la mairie du XIIIe arrondissement et le siège était occupé par une cinquantaine de personnes. Marion est reçue en délégation avec un parent d’élève : «Le directeur de cabinet nous a clairement fait comprendre qu’il était du côté de People and Baby, en retournant nos arguments contre nous !» Une fois de plus, vers 21h30, Christophe, Odile et leurs sous-fifres font appel à la police, ainsi qu’à une société de sécurité privée, afin de pouvoir quitter les lieux. La pauvreO dile est au bord de la crise de nerfs.
Le 28 mars et le 2 avril, deux fêtes de soutien ont été organisées afin de récolter des fonds pour les licenciées, qui gardent un moral d’acier : «Malgré la violence de la situation, les pressions de la direction et le silence des pouvoirs publics, la section est déterminée à aller jusqu’au bout … et aussi loin qu’il le faudra !»
Charlotte Dugrand et Gwen Hainaux
CQFD no 77, avril 2010.
Des salariées d’une halte-garderie privée ont été licenciées après avoir fait grève
Licenciées. Après plusieurs semaines d’incertitude, la sanction est tombée pour trois des neuf employées de la crèche Giono, dans le XIIIe arrondissement de Paris ; en novembre 2009, elles avaient créé avec trois autres salariées une section syndicale au sein de l’entreprise People and Baby, et venaient tout juste de faire grève pour revendiquer de meilleures conditions de travail. C’était le 1er mars. Le lendemain, les six salariées syndiquées se voyaient signifier leur mise à pied conservatoire.
Raisons invoquées par la direction de People and Baby : «un manquement aux règles d’hygiène et de sécurité» et une «insubordination permanente». Pour les salariées, la Confédération nationale du travail (CNT) ainsi que les parents des enfants accueillis, il s’agit plutôt d’une «atteinte grave à la liberté syndicale».
«J’ai clairement l’impression d’une grosse injustice», explique Sophie Lhenry, membre du comité de soutien de parents aux salariées de People and Baby, mis en place à la fin du mois de mars pour soutenir les employées et demander leur réintégration.
«Lors de notre première réunion de section, on ne pensait pas en arriver là. On souhaitait juste faire respecter nos droits, confie Sophie Bournazel, l’une des salariées à l’origine du syndicat. Ce qui nous arrive aujourd’hui dans le privé, c’est le secteur public qui l’a permis.» Une allusion au fait que, anciennement municipale, la halte-garderie a été confiée en 2006 à People and Baby, à la tête de quelque soixante crèches et huit cents employés.
«Les salariées iront devant les tribunaux. Elles seront quand même virées, mais en ayant raison», prédit Jean Aubel, de la CNT. Il estime qu’au-delà du «cas Giono», c’est le secteur dans son ensemble qui est aujourd’hui menacé. Une inquiétude qui est aussi celle du collectif Pas de bébé à la consigne !, qui a rassemblé près de 10'000 manifestants le 8 avril pour protester contre la politique mise en place dans le secteur de la petite enfance. Augmentation du nombre d’enfants accueillis, privatisation, abaissement du niveau de formation des professionnels encadrants, perte de réels projets pédagogiques… Autant de mesures qui inquiètent professionnels et parents. «L’équipe a complètement changé du jour au lendemain, raconte Sophie Lhenry, la maman de Mathias, 21 mois, il y a des jours où je ne connais même pas les personnes à qui je laisse mon fils.»
Les salariées sont passée devant les prud’hommes. Le jugement ayant été remis en référé, elles devront attendre le 25 juin pour être fixées sur leur sort.
Laurence Texier - Politis, 15 avril.