Témoignage du centre de rétention du Mesnil-Amelot, dimanche 20 juin

Publié le par la Rédaction

Le Mesnil-Amelot ce soir
Lors d'un coup de téléphone hier au centre de rétention du Mesnil-Amelot des camarades ont appris qu’une grève de la faim y avait commencé (à la suite du message, le témoignage fait hier à cette occasion). Ce soir, la contestation s’amplifie. On leur a servi de la bouffe périmée, une omelette, préparée le 14, dépassée depuis le 17 ! Les retenus ont discuté ce soir et veulent tous se mettre en grève de la faim. Ils ont appelé un journaliste du Parisien. Un deuxième coup de fil nous apprend que de nombreux retenus sont malades : «la moitié du centre est par terre, on refuse de rentrer dans les chambres, on fait une manifestation». Voilà, chacun, chacune, d’entre nous peut appeler aux cabines (ou des sans-papiers pour ceux qui ont déjà des contacts) pour dire aux gars qu’on est solidaires, qu’on va au moins faire passer l’info…
Liste RESF, 21 juin 2010.

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Voici le témoignage d’un sans-papier prisonnier au centre de rétention du Mesnil-Amelot, témoignage récolté en téléphonant à l’un des numéros de cabine du centre.
Les numéros de cabines au Mesnil-Amelot sont : 
— Bâtiment 1 : 01 49 47 02 41 / 42 
— Bâtiment 2 : 01 49 47 02 43 / 44 / 45
 — Bâtiment 3 : 01 49 47 60 60 / 49 53 / 02 84 
— Bâtiment 4 et 5 (cabines entre les deux bâtiments) : 01 49 47 02 46 / 47 / 48.



Centre de rétention du Mesnil-Amelot, dimanche 20 juin :

 

«Moi je m’en fous, je connais le chemin pour revenir. Jai encore 20 ans. Je suis jeune, mais jai de lexpérience, jai traversé la mer Méditerranée plusieurs fois, je suis allé en prison, jai fait les 400 coups comme vous dites ici en France. Ça fait depuis le 22 mai que je suis là, je suis le plus ancien, il me reste trois jours à tenir ici. Je sors de la prison, je fais la double peine. Ils sont venus me chercher à lintérieur de la prison pour me ramener ici.

 

Ils ont des doutes sur mon origine. À chaque fois que je me fais arrêter, je leur donne un nom différent, quand je suis passé chez la juge elle avait un dossier de 200 pages. Elle ma dit «cest qui tous ces noms ?», je nai rien trouvé à lui dire. Elle ma demandé de quelle origine je suis, je lui ai dit du Maghreb United. Ils mavaient mis sur un vol pour lAlgérie, le consul a donné un laissez-passer après jai dit que je préférais revenir dans mon pays dorigine, mais pas en Algérie, parce que là-bas, ils mettent en prison. Je suis parti voir le chef du centre, je lui ai expliqué que jétais pas Algérien. Ils veulent envoyer les Marocains en Algérie et les Algériens au Maroc. Le consul dAlgérie, même si vous êtes Français, il vous donne un laissez-passer, ce qui lintéresse, cest les 300 euros. Le consul marocain, il fait plein de promesses, il jure quil va aider si on lui dit la vérité. Et en fin de compte, ceux qui disent la vérité, il leur fait le laissez-passer.

 

La Cimade, ils disent rien du tout. Je vois pas comment ils pourraient aider les gens à part faire des rappels. Ils donnent des conseils, ils écrivent des lettres, mais voilà, ils ont pas le pouvoir de sortir les gens dici. Mais la Cimade, je les apprécie bien ils mont aidé.

 

Entre nous on se soutient, mais il y a pas beaucoup de solidarité. Tout à lheure, y a le gendarme qui a commencé à me pousser, jai appelé les gens pour quils viennent avec moi, mais y a personne qui voulait venir, jétais tout seul. Je suis maltraité, ils ont été violents, ils mont poussé et je suis pas le seul, ils font ça avec tout le monde.

 

On peut fumer, toute la drogue rentre ici. Les flics le voient et sen foutent, du moment quon senfuit pas, on fait ce quon veut. Ils donnent pas bien à manger, ils traitent mal, ils tutoient les gens.

 

Ils nous droguent. Ils droguent toute la nourriture, donc tous les retenus. Ils nous mettent des gouttes pour quon dorme : dès quon mange, on est fatigué. Jai commencé à prendre des médicaments alors quavant jen prenais pas. Du rivotril, et le soir, les gouttes. Je me suis plains, alors ils mont emmené chez le psychiatre, je lui ai parlé normalement, il ma juste répondu «je suis pas dealer» et ma rajouté des gouttes pour aller dormir.

 

Il y en a plein qui font des tentatives de suicide. Deux fois jai failli mourir ici, jai fait deux tentatives de suicide. Je suis pas le seul, hier y a une personne qui sest pendue, elle est partie à lhôpital et on a pas de nouvelles depuis. En plus, pour lemmener dans lavion, ils lui ont anesthésié les mains, deux piqûres, il pouvait pas les bouger. Il criait dans l’avion, donc le pilote est sorti et a dit quil lacceptait plus. Quand il est revenu, il sest pendu. On a plus de nouvelles de lui. Il respirait très mal. Ça fait 18 jours quil est là.

 

Y a des gens qui font une grève de la faim, ça fait quatre ou cinq jours. Ils doivent être une cinquantaine. Ils boivent de leau, ils sont mal en point. Y a des médecins, mais si vous allez les voir, ils vous donnent des médicaments pour aller dormir. Ils nous droguent, ils mettent ça dans le café. Tu commences à perdre la raison après.

 

On est 100 dans le centre. On communique avec tous les bâtiments jusquà 20h30, après ils ferment les portes y a plus de cour commune. On est trop nombreux. Des gens dorment là où y a la télé, dautres dorment par terre, y en a même qui nont pas de matelas et dorment sur des couvertures.

 

Y a des gens qui ont été ramenés en bleu de travail, direct des chantiers. Vous voulez vous plaindre à qui ? Le chef, je lai vu 10 fois. Il est gentil, mais il peut rien faire. Si il faut faire quelque chose, je suis le premier à foncer tête baissée, parce que ça va pas pour les gens qui se trouvent ici.»

 

Fermeture des centres de rétention, 21 juin.

 


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