Sur le Groupe suisse de l'Internationale lettriste

Publié le par la Rédaction


Éducation européenne

À l’issue des conversations engagées récemment à Paris, un Groupe Suisse de l’Internationale lettriste a été formé le 20 octobre.
Adresse : Charles-Émile Mérinat, Floréal 3, Lausanne (Vaud), Suisse.

Potlatch no 13, 23 octobre 1954.


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Deutschland über alles

Le 5 novembre à Neuchâtel, une conférence du Groupe Suisse de l’Internationale lettriste s’achevait par une rixe entre des éléments réactionnaires et nos camarades. Le lettriste Marcel Zbinden était appréhendé par la police. À la suite de ces incidents deux ecclésiastiques protestants chargés du service de littérature religieuse dans le canton de Vaud, les pasteurs Girardet et Maire, étaient saisis par les lettristes suisses qui fracturèrent la machoire à l’un, et brisèrent un bras à l’autre. Un tract était lancé, qui reproduisait la phrase de Sade : «L’idée de Dieu est le seul tort que je ne puisse pardonner à l’homme.»

Le département fédéral de Justice et Police décrétait alors «l’activité du Groupe Suisse de l’Internationale lettriste illégale et révolutionnaire» ; interdisait sous peine d’emprisonnement la parution de Phosphore, bulletin du Groupe Suisse, la diffusion de Potlatch édité par le Groupe Français, et toute autre publication ou conférence.

Zbinden qui, étant lui-même militaire, s’était battu lors des incidents de Neuchâtel, avec un officier en uniforme, vient d’être traduit devant un tribunal de l’Armée et condamné à six mois de forteresse pour discours subversifs, incitation à la révolte, rébellion.

Les passeports de nos camarades Maurice Crausaz, Gida Croèti, Jean-Pierre Lecoultre, Pierre-Henri Liardon, Claude Recordon, Juliette Zeller leur ont été retirés.

Nous invitons à protester auprès de la Légation de Suisse à Paris, 147, rue de Grenelle (7e), ou auprès des autres légations suisses en Europe, ceux qui désapprouvent cette atteinte à la liberté de l’expression.

Édité par le Groupe Français de l’Internationale lettriste,
32, rue de la Montagne-Geneviève, Paris (5e).
[Tract publié le 26 novembre 1954.]


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Avertissement

À la suite des manifestations en Suisse d’un groupe lettriste, et du tract publié à ce propos le 26 novembre par le Groupe Français, nous signalons que les dernières précisions recueillies sur ces faits nous ont conduits à dénoncer l’accord intervenu le 20 octobre entre nous et les représentants de ce groupe.

Un simple désir d’agitation, privé de fondements idéologiques suffisants, a mené ces gens à des outrances où la provocation n’est pas exclue. Ces agissements se sont achevés par des dénonciations entre Suisses, et l’usage de quelques faux.

Diverses pressions semblent s’être exercées sur eux, avec un plein succès.

Le 7 décembre 1954
Internationale lettriste

Cette note n’a été portée à la connaissance que des membres de l’Internationale lettriste, et de certains de ses correspondants.


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L’hiver en Suisse

Les lettristes suisses qui s’étaient manifestés en octobre et novembre dans leur pays doivent être considérés comme de purs et simples provocateurs.

Notre rupture avec eux a fait l’objet d’une note en date du 7 décembre diffusée à l’intérieur de l’Internationale lettriste, et auprès de quelques amis étrangers. Nous rappelons à ce propos que le recours à des violences personnelles est imbécile, et que nous ne doutons pas d’un règlement plus général des conflits où nous nous trouvons impliqués.

Potlatch no 15, 22 décembre 1954.


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Le rouleur et le commissaire

Le soir du 13 juillet, au café «Bonaparte» à Germain-des-Prés, Mohamed Dahou se trouva fortuitement en présence du Suisse Liardon, un des fondateurs, en octobre 1954, de l’ex-Groupe suisse de l’Internationale lettriste.

Sans plus attendre, Dahou traîna le provocateur jusqu’à la rue et entreprit de l’assommer.

Liardon, ayant inutilement hurlé devant plusieurs centaines de témoins que la responsabilité des événements de novembre 1954 incombait à on ne sait quels Suisses absents, chercha son salut dans la fuite.

Mohamed Dahou se jeta à sa poursuite, et l’aurait infailliblement rejoint au coin du boulevard Germain, si Liardon ne s’était placé sous la protection de policiers qui veillaient en cet endroit à la bonne marche de leur fête nationale.

Réfugié au commissariat de la rue de l’Abbaye, où il avait vainement essayé de faire incarcérer Dahou, Liardon refusa franchement d’en sortir par crainte d’autre mauvaise rencontre.

Peut-être y est-il encore à présent, ayant finalement trouvé sa voie, et sa carrière sociale ?

Potlatch no 22, 9 septembre 1955.

Publié dans Debordiana

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