Se rassembler, se ressembler

Publié le par la Rédaction

Tract trouvé à Tours

 

«La niaiserie de l’angoisse est infinie.» (Bataille)

 

Faut bien se lavouer, on en a tous la nausée des ballades syndicales. Mais puisquil faut bien «faire quelque chose». Aussi curieux que cela puisse paraître, il existe un certain degré de contagion à ce raisonnement dépressif…

 

Décidément des siècles dexploitation et daliénation doivent nous avoir rendu quelque peu obtus, pour accepter ainsi dêtre gouvernés dans la crainte, et être réduits à une si faible qualité critique sur nos conditions de vie et nos pratiques révolutionnaires… Le capitalisme semble fasciner et façonner à ce point nos modes de vie, quil gère désormais lintégralité de nos pulsions, de nos pensées et de notre langage. Dès lors comment changer de vie quand on est aussi rigide quun cadavre ? « La niaiserie de langoisse est infinie.»

 

Lillusion de la croissance permanente et la sacro-sainte croyance dans la possibilité même dun État-de-Droit nous garantissant la paix sociale, nous a tous foutus dedans ! LEurope renoue avec ses vieux démons fascistes ?… Quelle surprise ?!… La violence et la xénophobie d’État sont et ont toujours été, non pas à titre exceptionnel mais en tant que tels, des modes de gouvernance… Expulser pour mieux exploiter, tout comme le chantage à la pénurie sont des éléments essentiels à la bonne gestion de toutes formes desclavages. Avec la bourgeoisie, le capital est arrivé à sa forme de domination réelle, cest-à-dire à faire triompher le processus économique comme sil était un processus naturel, donc incontournable.

 

Ce spectacle auquel nous nous croyons à tort obligés de participer, réduit lhomme à une absence rentable. La société marchande et son contrôle social achève de tronquer les individus en les séparant peu à peu de leurs richesses passionnelles, créatives et émotionnelles. La compétition stérile et les rôles dans lesquels nous nous figeons, nous séparent de nous-même, de lautre et par là-même du reste de la communauté. Sans individus libres et agissants, pas de collectivité possible. Lindustrialisation et la mécanisation de nos conditions dexistence participent au même processus de dépossession qui accroît la névrose économique et les tendances fascistes de nos sociétés. Pensé autrement le progrès technique pourrait permettre de libérer lhomme de la dictature du marché économique. Penser autrement pourrait permettre à lhomme de sortir de cette animalité prédatrice et de tendre enfin vers une réelle égalisation de ses conditions de vie…

 

Pour pallier à leffritement de leur système idéologique, les magasins du capital ont replacé au centre des préoccupations sociales, la crainte de la pénurie. Cette clé de voûte anxiogène permet de faire avaler la pilule des pires mesures réactionnaires. Cette peste émotionnelle glace le sang et anesthésie, nous laissant là à regarder bouche bée le flot de ces centaines, de ces milliers dhommes, de femmes et denfants catalogués comme criminels, et déportés par des policiers français. Les sans-papiers, volontairement précarisés et exclus constituent ainsi une réserve bien utile de main dœuvre. Ceux qui refusent ou qui ne peuvent jouer ce rôle sont donc sans «valeur», et sont pris en chasse afin dassurer un exutoire aux conflits qui menacent la rigidité cadavérique de cet ordre social. Tout ceci bien évidemment, au nom et dans lintérêt du Peuple français…

 

La démocratie spectaculaire fondée sur le consensus de ses spectateurs déguisés en citoyens, célèbre avec eux leurs dépossessions chaque fois quelle justifie sa propre violence comme une mesure de protection ou une réponse sécuritaire à la violence très souvent présumée déléments dits subversifs. La peur du désir refoulé et langoisse du plaisir condamné sont un puissant moteur défensif tant pour l’État, que pour les représentants de la protestation spectaculaire qui se laissent intégrer et reproduisent les mécanismes du pouvoir et de la domination. Aucun deux na réellement dintérêts à permettre la conjugaison des subjectivités individuelles, et par là-même le dépassement de la société de classe… Rien dhumain ne sera réalisé tant que les individus ne se décideront à reprendre radicalement en mains leurs volontés de vivre.

 

La contestation de la société actuelle dans son ensemble est donc le seul critère dune libération authentique. Quelques-unes des manifestations de cette lutte pour la vie seraient le blocage et le sabotage des flux, la multiplication dexpériences subversives, le soutien aux sans-papiers dans la clandestinité. Mais aussi la réappropriation : réappropriation collective de lespace, du temps, des denrées ; réappropriation individuelle de nos corps, pensées et langages. Nos pratiques renouant désormais avec la spontanéité du jeu et de la fête révolutionnaire doivent déborder sur toutes les sphères de notre activité humaine. La créativité et la solidarité sont encore les meilleures armes contre la cruauté et les forces mortifères de ce monde…

 

Communiqué de lAnti-Monde (contact)
Indymedia Nantes, 29 septembre 2010.

 


Publié dans Agitation

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