La prison tue ! Semaine de mobilisation du 2 au 8 novembre 2009
La prison, les hommes, femmes et enfants incarcérés ne sont pas des sujets de société porteurs. De Gaulle l’avait bien résumé en désignant le petit peuple écroué comme étant «les poubelles de la France».
Aujourd’hui la situation dans les prisons françaises est gravissime, insoutenable. Sachant que la prison est une machine parfaite pour la gestion de toutes les misères sociales, les plus pauvres d’entre nous se voient de plus en plus criminalisés afin de dédouaner l’État de sa responsabilité de soutien envers les classes défavorisées dont les couches populaires les plus précaires peuplent, de façon infâme, les cellules des maisons d’arrêt, des centres de détentions, des maisons centrales, des centres de rétention et des EPM véritables prisons d’enfants.
Par cette mobilisation nationale (Paris, Marseille, Toulouse, Saint-Étienne, Lyon, Valence, Grenoble, Châlons-sur-Saône etc.), nous tentons d’alerter les Français sur la réalité carcérale. Nous allons, avec des débats, des ateliers, des projections, des concerts et une manifestation démonter ou plutôt disséquer les rouages de la machine pénitentiaire et judiciaire.
L’Arppi, en partenariat avec de nombreux collectifs, associations et individus sans lesquels cette mobilisation serait impossible, comptons interpeller le Peuple français au nom duquel les tribunaux condamnent à des peines éliminatoires, au delà du jeu politico-médiatique, en surfant sur l’inconscient collectif pour fabriquer des croquemitaines, des ogres ou des «monstres», qui vont du pédophile à l’ennemi public.
Ces personnes existent indubitablement mais ne représentent qu’une infime minorité par rapport à l’immense majorité des personnes incarcérées, prévenues ou condamnées.
Pour que cesse cette machinerie, il nous faut dire clairement aux gens qu’un jour ou l’autre un de leur membre sera violemment touché par la prison et que le sacro-saint «ça n’arrive qu’aux autres», particulièrement obsolète aujourd’hui, se doit d’être définitivement éradiqué de l’esprit collectif.
Les personnes incarcérées sont pour la plus [grande] majorité des personnes détruites par la vie, l’existence, les échecs successifs (scolaires, familiaux, affectifs, sociaux) et ces populations détruites se voient compactées et achevées dans le silence des murs, de la honte, de la solitude et de l’opprobre.
Nous rappelons ici, qu’un homme, une femme, un enfant incarcéré est avant tout le survivant d’un long laminoir né de l’indifférence de chacun. Un laminoir au bout duquel, ses proches, famille et amis, sont happés par les tentacules de la prison au cœur même des familles qui se retrouvent plongées, du simple fait d’aimer ou d’assister leur conjoint (ami, frère sœur, père mère incarcéré), dans un contexte de semi-liberté. Le corps en liberté mais l’esprit en prison. La prison se partage en famille à part égale lorsque l’un de ses membres est touché.
Nous en appelons à la réflexion et à l’intelligence sur les longues peines : la mort lente par pourrissement.
Nous en appelons à la réflexion et à l’intelligence sur les peines dites de rétention : l’éradication contrainte de l’erreur judiciaire, un innocent qui, peine purgée, avouera un crime qu’il n’a pas commis face à des experts qui qualifieront le déni de l’acte comme étant un signe majeur de dangerosité et garderont la personne incarcérée d’une manière ou d’une autre.
Nous en appelons à la réflexion et à l’intelligence sur la castration dite chimique : la castration physique ou chimique fait que la personne récidivera avec des objets de substitution — arme blanche ou autre objet phallique. La gravité des viols sera suivie de mutilation ou de meurtre.
Nous en appelons à la réflexion et à l’intelligence : les EPM sont des prisons d’enfants et devraient tomber sous l’accusation de maltraitance à enfant quel que soit le délit commis. Le suicide des jeunes étant un fléau mille fois plus grand que la délinquance. Un enfant qui entre en délinquance et en révolte est un enfant qui refuse le suicide en état de légitime défense sociale. À nous adultes d’encaisser les coups, quand bien même seraient-il 400, que cette jeunesse nous porte.
Nous en appelons à la réflexion et à l’intelligence sur les aménagements de peines. Un homme suivi et libéré avant la fin de peine est préférable à un homme qui disparaît dans la nature avec sa haine, ses humiliations, sa pauvreté et sa solitude. Alchimie parfaite de la récidive.
Nous en appelons à la réflexion et à l’intelligence : sur le fichage généralisé par l’ADN dont le ciblage est bien plus politique que sécuritaire.
Nous en appelons à la réflexion et à l’intelligence : envers vous-mêmes que la peur pour vous et les vôtres enferment dans entre les murs de l’aliénation, de l’indifférence et d’un individualisme forcené qui vous poussent, tel qu’en prison, à la pharmacopée abusive (anti-dépresseur et plus), à la violence (de plus en plus de coups de folie nés du désespoir) soit au suicide (France Télécom ou Renault).
Nous en appelons à la réflexion et à l’intelligence pour une évasion citoyenne et collective des mythes, poncifs et clichés de «nos prisons», avant qu’elles ne vous tuent soit par incarcération soit par victimisation.
Catherine - présidente de l’Arppi, 27 octobre 2009.