Égypte : L'armée torture - Des bâtiments de la sécurité d'État pris d'assaut - 5 mars
Des bâtiments de la sécurité d’État pris d’assaut en Égypte
Des bâtiments de la sécurité d'État ont été pris d'assaut samedi en Égypte par des manifestants à la recherche de preuves d'abus commis par ce puissant appareil dépendant du ministère de l'Intérieur, dont des militants exigent la dissolution, ont indiqué des témoins.
Environ 2.500 manifestants ont fait irruption dans le bâtiment de la sécurité d'État à Nasr City au Caire «s'emparant de documents officiels avant que les responsables ne les brûlent ou les déchirent», a dit un responsable des services de sécurité.
À Cheikh Zayed, dans la banlieue du Caire, des centaines de manifestants ont tenté de pénétrer dans le siège local de la sécurité d'État. Des employés ont tiré des coups de feu en l'air avant que l'armée ne s'interpose pour empêcher que le bâtiment soit pris.
La dissolution de ces services, accusés par des organisations de défense des droits de l'Homme d'abus et de torture, est l'une des principales revendications des militants pro-démocratie.
L'un des manifestants a affirmé à l'AFP que le but était de s'emparer des dossiers de la sécurité d'État «de crainte que les preuves de violations ne soient détruites». «On pouvait voir la police à l'intérieur en train de brûler des papiers», a-t-il dit.
«Les fenêtres étaient ouvertes et des papiers s'envolaient par les fenêtres», a ajouté un autre manifestant, joint par l'AFP par téléphone.
À Marsa Matrouh, ville située au nord-ouest du Caire sur la côte méditerranéenne, un groupe de manifestants a pu entrer dans le siège de la sécurité et s'emparer de documents, avant de mettre le feu au bâtiment d'où s'élevait une épaisse fumée noire, a rapporté un témoin à l'AFP.
Les manifestants se sont ensuite attablés à un café non loin de là pour éplucher les papiers récupérés, a-t-il ajouté.
À Zagazig, ville du Delta du Nil, des manifestants s'en sont également pris à des bureaux de la sécurité d'État, ainsi qu'à Fayoum, au sud du Caire, selon des responsables des services de sécurité.
Vendredi, des manifestants avaient été blessés par balle lors d'un rassemblement réclamant la dissolution de la sécurité d'État à Alexandrie, la grande ville du nord de l'Égypte.
L'armée, qui gère le pays depuis la démission sous la pression populaire du président Hosni Moubarak le 11 février, avait dû intervenir pour ramener le calme.
Selon un responsable des services de sécurité, près de 100.000 personnes travaillent à la sécurité d'État, sans compter les informateurs.
Vendredi, entourant le nouveau Premier ministre Essam Charaf, les manifestants de l'emblématique place Tahrir au Caire avaient scandé «Le peuple veut la fin de la sécurité d'État».
«Je prie pour que l'Égypte soit un pays libre et que ses services de sécurité soient au service des citoyens», a répondu M. Charaf, nommé jeudi en remplacement d'Ahmad Chafic.
La colère contre les abus quotidiens et la torture par la police ont été l'un des éléments déclencheurs le 25 janvier des manifestations sans précédent contre le régime de M. Moubarak, qui était en poste depuis près de 30 ans.
Leur presse (Le Nouvel Observateur), 6 mars 2011.
Égypte : L'armée torture
Le Caire, 6 mars 2011. Depuis quelques jours, des images-choc circulent sur la toile, mais elles se font curieusement oublier par d'autres actualités plus étourdissantes encore : la forteresse de la «Sécurité d'État», la STASI égyptienne, est tombée hier soir aux mains d'un millier de manifestants. Nous venons, hier soir, de pénétrer en son sein pour y trouver des montagnes de documents broyés, et des centaines de mètres de rayonnages sur lesquels reposaient les fiches soigneusement rédigées sur des millions de citoyens.
L'armée, qui gardait les lieux comme elle garde tous les bâtiments administratifs, était pour le moins complaisante et s'est gentiment tenue à l'écart tandis que nous nous précipitions à l'intérieur, le sang glacé par ce temple du mal.
À l'arrivée du procureur général, et après avoir rempli nos yeux et nos appareils photos des mille scandales susceptibles de disparaître, nous avons laissé la justice prendre le relais.
La nouvelle est fracassante. La chute de la Sécurité d'État est plus importante encore que celle de Moubarak qui, et c'est un manifestant qui l'a hurlé en ouvrant un dossier par hasard, était fiché lui aussi.
Il est cependant essentiel de revenir sur ces images sordides qui confirment que l'armée égyptienne a bel et bien deux visages.
Ces images ont été montées sur une chanson que j'ai écrite et enregistrée. Elle sera diffusée demain dans la blogosphère égyptienne.
Traduction française des paroles :
De qui se moque l'armée égyptienne ?
Des Égyptiens, bien sûr.
Des martyrs, nous en avons assez.
Laissez-nous donc vivre en paix.
«L'armée et le peuple, une seule main»
«L'armée et le peuple…» c'est ça, ouais.
Dis moi Salma, l'armée défend qui ?
Ses confrères hommes d'affaires… ah ! j'oubliais !
Casse-toi Maréchal Tantawi !
Et sauve-nous Major Shoman ! [Le Major Shoman s'est rendu célèbre en déposant les armes, avant la démission de Moubarak, et en rejoignant les manifestants.]
C'est que le Maréchal, vois-tu, torture nos amis.
«L'armée et le peuple, une seule main»
«L'armée et le peuple…» c'est ça, ouais.
L'armée-Vodafone [Le Conseil Suprême de Armées, comme le Ministère de l'Intérieur déchu avant lui, se sert librement dans les bases de données des opérateurs Vodafone et Mobinil pour envoyer des SMS à la population. Recommandations, mise en garde, menaces. Les opérateurs aux engagements et aux obligations multiples sur la protection de la vie privée, curieusement, collaborent.], on n'en veut plus
Trouvez-nous des gens dignes de nous
Ceux qui nous attaquent au Taser
Nous leur tiendrons tête jusqu'au bout
Jeunes officiers il est temps de faire un «coup»
Fiers officiers, braves soldats, la justice n'attend pas
«L'armée et le peuple, une seule main»
«L'armée et le peuple, une seule main»
«L'armée et le peuple, une seule main»
Ah ben voilà, c'est mieux comme ça…
«L'armée et le peuple, une seule main»
«L'armée et le peuple, une seule main»
Paroles, musique et chant :
Aalam Wassef. Chanson libre de droits.
Cris d’Égypte, 6 mars.