Ballade de soutien aux inculpés de Villiers-le-Bel
Après le rassemblement d’hier samedi 19 juin organisée par le collectif Respect Vérité Justice à Pontoise où les flics étaient en majorité des civils très costauds qui exhibaient avec fierté leurs brassards oranges, tonfas, gazeuses, pistolets (sic) et leurs tronches de fafs, la ballade qui s’est déroulée aujourd’hui dans le quartier de Belleville avait tout d’une sinécure.
Le rendez-vous avait été donné pour 15 heures, métro Belleville ; manque de pot, nous nous sommes retrouvés en plein milieu d’une manifestation de la communauté chinoise de Belleville. Le thème : «la sécurité pour tous». Quand les Chinois se font agresser dans leur quartier, ils descendent à 3000 (estimation personnelle) dans la rue avec des drapeaux français, chinois, européens et des sifflets pour demander le droit à la tranquillité et la sécurité.
Heureusement pour nous, les Chinois ne font pas trop peur aux flics. Service minimum de la maréchaussée qui a envoyé, en tout, une petite dizaine de camions de CRS et quelques civils.
Mais comme dit le dicton, les flics c’est comme la gale, on sait jamais quand on s’en est débarrassé. Mieux vaut prendre quelques précautions : on se retrouve donc à une station de métro plus loin pour discuter de l’itinéraire et attendre le préposé à la colle (pour les affiches).
À 16 heures la quarantaine de personnes se regroupe pour partir. Direction rue Jean Pierre Timbaud. Pas assez nombreux pour bloquer complètement la route, mais largement assez pour recouvrir les murs des rues d'affiches et de graffitis. Des tracts sont distribués aux passant et aux gens attablés en terrasse.
La plupart de la bande n'est pas masquée. Pendant une demi-heure, on se promène avec un sentiment d’impunité quasi-total jusqu’à ce qu’on repère un girophare bleu rue de la Fontaine au Roi. Pas de soucis, les bleus sont coincés dans des embouteillages et ils ne nous ont pas remarqués. Quelques tags, et hop on fait marche arrière. On marche encore dix minutes jusqu’à un MacDo où le type de la sécurité s’agite à cause des affiches collées sur les vitres de son délicieux restaurant dont il possède de nombreuses parts de marché.
Un skin bâti comme un buffle déchire le tract que lui donne un copain. Quelques esprits téméraires s’échauffent. Il est question de lui taguer la tronche, mais la rue est trop passante, le skin trop costaud…
Arrivé à République, le groupe se sépare. À une prochaine !
Courriel, 21 juin 2010.
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Villiers-le-Bel : le procès de cinq jeunes accusés d’avoir tiré sur des policiers s’ouvre aujourd’hui
Cinq jeunes sont jugés à partir de lundi par la cour d’assises du Val-d’Oise, accusés d’avoir tiré sur des policiers à Villiers-le-Bel en novembre 2007 lors d’émeutes consécutives à la mort de deux adolescents.
Ce procès devrait s’ouvrir dans un climat tendu, au moment où des commissions mises en place par le ministère de l’Intérieur s’alarmaient cette semaine d’un «dialogue rompu» dans les banlieues difficiles entre jeunes et forces de l’ordre.
Pour ce procès programmé pour deux semaines, quatre jeunes, incarcérés, sont jugés pour tentative de meurtre en bande organisée sur des policiers dans les nuits des 25 et 26 novembre 2007 à Villiers-le-Bel, ainsi que pour détention et port d’arme prohibés. Le cinquième, sous contrôle judiciaire, soupçonné d’avoir fourni un fusil à pompe, comparaît pour complicité.
Le 25 novembre 2007, la mort de deux adolescents — Moushin et Lakamy — tués à Villiers-le-Bel dans une collision entre leur moto et une voiture de police avait provoqué deux jours d’émeutes et d’échauffourées entre jeunes et forces de l’ordre.
90 policiers parties civiles
Une centaine de policiers avaient été blessés par des tirs d’armes à feu et des jets de pierres et de bouteilles, un commissaire roué de coups, des bâtiments publics et des commerces détruits. Au moins 90 policiers se sont portés parties civiles.
Au cours de l’enquête, plusieurs interpellations avaient eu lieu grâce à des des témoignages anonymes, avec promesse de rétribution financière.
Quatre mois après les violences, le 18 février 2008, une vaste opération de police conduite par près d’un millier d’hommes — accompagnés de dizaines de journalistes — dans cette commune du Val-d’Oise avait été vigoureusement critiquée par les habitants.
L’enquête avait été spectaculairement relancée en avril dernier.
La chambre de l’instruction de la cour d’appel Versailles avait en effet infirmé un non-lieu rendu par un juge d’instruction de Pontoise en faveur des policiers qui conduisaient la voiture. La justice avait ordonné un supplément d’information en vue «de la notification de la mise en examen du conducteur du chef d’homicide involontaire», selon Me Emmanuel Tordjman, avocat des familles des adolescents.
«Respect, Vérité, Justice»
Les syndicats de police avaient alors exprimé leur «surprise» et dénoncé une «décision qui s’inscrit une nouvelle fois dans cette suspicion permanente à l’égard des policiers».
Depuis deux ans, les accusés peuvent compter sur un collectif «Respect, Vérité, Justice», lequel organise depuis des semaines des concerts de soutien.
Samedi après-midi, à l’appel de ce collectif, environ 200 personnes dont de nombreux militants d’extrême-gauche ont manifesté en soutien aux cinq accusés à Pontoise, escortées par un impressionnant dispositif de policiers et de gendarmes.
«Nos amis sont enfermés sans preuve depuis deux ans. Ils ont été victimes de dénonciations anonymes et rémunérées, voilà pourquoi ils sont là-bas», a dénoncé Bachir, un porte-parole du collectif. La manifestation s’est dispersée dans le calme.
Leur presse (Libération), 21 juin.
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Villiers-le-Bel : le procès des émeutes sous haute protection
La mort de deux adolescents, fauchés par une voiture de police dans la ville du Val-d’Oise en 2007, avait entraîné des émeutes d’une rare violence.
Deux compagnies de CRS mobilisées, le Raid… C’est un procès sous haute tension qui s’ouvre aujourd’hui devant la cour d’assises du Val-d’Oise. Quatre hommes sont accusés d’avoir ouvert le feu sur les policiers, un cinquième d’avoir fourni un fusil à pompe, lors des émeutes de Villiers-le-Bel, les 25 et 26 novembre 2007, qui furent d’une violence inégalée.
Au total, 96 policiers ont été blessés par des tirs d’arme à feu, dont quatre grièvement, l’un perdant un œil. Du jamais-vu en France. Quatre-vingt-dix victimes se sont, à ce jour, constitué parties civiles. La mort de deux adolescents de 15 et 16 ans avait déclenché les événements. À 16h55, le 25 novembre, la mini moto sur laquelle circulent Moushin et Lakamy, et une voiture de police se percutent de plein fouet. Les incidents éclatent rapidement. Le commissaire de Sarcelles est roué de coups, les jets de pierre suivent, puis les premiers coups de feu claquent.
Les accusés contestent les charges qui pèsent sur eux
L’acte d’accusation détaille les tirs essuyés, parfois à quelques mètres de distance, par les policiers. Des fonctionnaires qui ont également été les cibles de couteaux de cuisine ou de fer à béton taillés en javelot. «C’est la première fois en France que l’on juge des personnes qui ont tiré sur les policiers», souligne Ludovic Collignon, responsable départemental du syndicat de police Alliance, qui réclame «des peines exemplaires».
Devant la cour d’assises, les accusés, qui contestent les charges qui pèsent sur eux, encourent la réclusion criminelle à perpétuité. Agés de 23 à 30 ans, ils comparaissent pour tentative de meurtre sur des policiers dans l’exercice de leur fonction et en bande organisée, le cinquième pour complicité. L’accusation s’appuie beaucoup sur les témoignages «sous X» de personnes à qui on a garanti l’anonymat pour éviter les représailles. Malgré la présence de 250 à 300 jeunes dans les rues, des habitants aux fenêtres, la police judiciaire a dû lancer un appel à témoins en promettant de l’argent. Ce contexte juridique promet deux semaines de débats houleux dans l’enceinte de la cour d’assises qui entendra près de 90 témoins. Samedi après-midi, des habitants de Villiers-le-Bel et les proches des cinq prévenus ont manifesté dans le calme devant le palais de justice de Pontoise. Ils sont venus réclamer «un procès équitable» et refuser «un procès pour l’exemple». La grande banderole noire qu’ils avaient déployée donne le ton : «Enfants des quartiers + témoins sous X rémunérés = ticket pour la geôle».
Leur presse (Le Parisien), 21 juin.