À propos des manifestations du 4 septembre 2010
Ne soyons pas amnésiques
La date du 4 septembre pour cette manif antiraciste unitaire, a été choisie parce qu’elle coïncide avec le 140e anniversaire de la fondation de la Troisième République qu’il faudrait «fêter», selon les organisateurs de l’appel «citoyen» : «Non à la politique du pilori».
Curieusement, jusqu’ici aucun des historiens ou des intellectuels qui fustigent Nicolas Sarkozy pour sa manipulation ou son ignorance de l’Histoire n’a fait remarquer que la Troisième République a été fondée sur le sang des Communards, les persécutions, les condamnations à l’exil, au bagne et à la prison, quand ce n’était pas le poteau d’exécution décidé par les conseils de guerre qui siégeront pendant les quatre premières années de la Troisième République ou les cours prévôtales qui fusillaient les hommes et les femmes pris les armes à la main.
Les rédacteurs et les 30'000 signataires de l’appel «Non au pilori» ont complètement oublié les 20'000 morts de la Commune de Paris, les 38'000 arrestations, les 50'000 jugements qui se poursuivront jusqu’en 1877, les 4000 personnes expédiées au bagne, le tout pour quoi ?
Pour célébrer, le 4 septembre 2010, la Troisième République des bourreaux du peuple parisien.
Le citoyennisme, qui est l’idéologie dominante à gauche, est décidément bien un négationnisme (à peine dissimulé) de l’histoire du mouvement ouvrier et de ses combats, comme de la politique de la République.
Ne soyons pas de ceux qui oublient que la politique actuelle vis-à-vis des Roms en général, comme la menace vis-à-vis de la perte de la nationalité, se situe en fait dans le droit fil de la tradition républicaine. Ceux qui prétendent le contraire et en appellent à cette tradition contre Sarkozy sont des menteurs ou des ignorants. Cela fait plus de 200 ans que la République n’accorde pas les mêmes droits à tous ses «citoyens» et en particulier à ceux qu’elle nomme depuis 1978 les «gens du voyage» pour échapper à l’accusation de racisme.
Ce 4 septembre 2010, si nous descendons dans la rue contre ce pléonasme (faussement) naïf qu’est la «xénophobie d’État» (tout État tend à être xénophobe), rappelons au moins le nom des Communards et des pétroleuses ! N’oublions pas qui était Adolphe Thiers, le chef des Versaillais, celui qui a lancé 130'000 soldats contre les ouvriers et les artisans parisiens, le premier président de cette Troisième République qui a commencé aussi mal qu’elle a fini et que nos citoyennistes de la gauche sans mémoire voudraient que nous «fêtions» en enterrant une seconde fois les Communards.
Souvenons-nous qu’après la Commune, des conseils de guerre fusillant les Communards en septembre 1870 aux pleins pouvoirs votés à Pétain en juillet 1940 par les trois-quarts des députés socialistes, des «lois scélérates anti-anarchistes» au «Carnet B» destiné à emprisonner tout opposant à la boucherie de 1914, des massacres coloniaux aux couvre-feu imposés aux Algériens en France qui débouchèrent sur le massacre de 1961, des fichiers de l’immigration les plus sophistiqués de la planète aux lois restreignant (déjà) les droits des immigrés aux carnets antromométriques pour les «gens du voyage», la Troisième République et sa suivante la Quatrième, ont une belle continuité que les sans-mémoire de la gauche célèbrent en toute bonne (in)conscience ! Toutes ces mesures, et il y en a bien d’autres, furent des mesures légales prises dans le cadre constitutionnel qui «assure l’égalité de tous les citoyens».
Mais il ne s’agit pas seulement d’Histoire mais aussi de présent. Derrière cette amnésie se cachent à peine un objectif et une stratégie pour préparer 2012 et un grand front républicain destiné à remettre au pouvoir, à la place de l’actuel, ceux qui ont toujours mené les mêmes politiques sur tous les plans y compris celui de l’immigration, du racisme et du sécuritaire. Pour ce faire on nous refera le coup de la montée du fascisme et du racisme, comme en 2002, alors que précisément si la droite est aussi arrogante c’est parce que les 80% que lui ont accordé alors les votants ont eu valeur de quitus pour mener à bien cette offensive politique au service du patronat et des grands groupes financiers.
Il est particulièrement significatif que quelques jours après ce 4 septembre aura lieu la manifestation sur les retraites (alors que tout est déjà joué sur ce terrain, sans combattre). On sait pourtant que le seul moyen d’enrayer le racisme et le fascisme c’est précisément le développement de grands mouvements sociaux. Il ne faut pas mélanger les choses, nous dit-on… Eh bien si, justement il faut les mélanger et les mélanger encore.
Ne marchons pas dans la combine. Nous ne chasserons pas Sarko pour mettre le PS à sa place, pas plus que n’importe qui. Nous ne serons pas amnésique vis-à-vis des années de plomb que furent les années Mitterrand que l’on voudrait nous faire oublier.
Oublions seulement nos nationalités et construisons un internationalisme contre les patrons, contre le capitalisme, pour le communisme.
Organisation communiste libertaire, 27 août 2010.
4 septembre 2010 : «fêter» l’anniversaire de la IIIe République ou honorer les Communards ?
Une grande manif doit se tenir le 4 septembre 2010, convoquée par toute la gauche, les syndicats, les associations antiracistes ou de soutien aux travailleurs immigrés, etc.
Cette date a été choisie parce qu’elle coïncide avec le 140e anniversaire de la fondation de la Troisième République qu’il faudrait «fêter» selon les organisateurs de l’appel «Non à la politique du pilori» (on trouvera cette pétition insipide [Comme me le fait remarquer justement un lecteur perspicace, cet appel contient des expressions inadmissibles comme la référence au «nécessaire respect de l’ordre public» (comme quoi la gauche nous prend pour des imbéciles quand elle prétend dénoncer la politique sécuritaire de Sarkozy) et au respect de «la Constitution». On rappellera aux sans-mémoire de gauche que deux réformistes bon teint, Messieurs François Mitterrand et André Chandernagor, dénoncèrent, il y a déjà 40 ans, l’un dans Le coup d’État permanent (1964), l’autre dans Un parlement pour quoi faire (1967), la Constitution de la Cinquième République comme totalement et viscéralement antidémocratique et propice aux coups d’État et à toutes les manœuvres autoritaires du gouvernement contre les «élus de la nation». Même si nous ne croyons guère aux vertus de la démocratie bourgeoise, la vacuité de cet appel permet de mesurer la régression politique de cette gauche réformiste qui a oublié même ses petits combats contre la Constitution de la Cinquième République… et de l’extrême-gauche (le NPA en tête) qui lui emboîte allégrement le pas. Quant à la phrase qui conclut l’appel et fait mention d’une «République que nous voulons plus que jamais, libre, égale et fraternelle» on se demande sur quelle planète vivent les rédacteurs et les signataires de cet «appel». La République des Bisounours, sans doute...], pardon cet «appel citoyen», sur le site nonalapolitiquedupilori.org).
Curieusement, jusqu’ici aucun des historiens ou des intellectuels qui fustigent Nicolas Sarkozy pour sa manipulation ou son ignorance de l’Histoire n’a fait remarquer que la Troisième République a été fondée sur le sang des Communards, les persécutions, les condamnations à l’exil, au bagne et à la prison, quand ce n’était pas le poteau d’exécution décidé par les conseils de guerre qui siégeront pendant les quatre premières années de la Troisième République ou les cours prévôtales qui fusillaient les hommes et les femmes pris les armes à la main.
Les rédacteurs et les 30'000 signataires de l’appel «Non au pilori» ont complètement oublié les 20'000 morts de la Commune de Paris, les 38'000 arrestations, les 50'000 jugements qui se poursuivront jusqu’en 1877, les 4000 personnes expédiées au bagne, le tout pour quoi ?
Pour célébrer, le 4 septembre 2010, la Troisième République… des bourreaux du peuple parisien.
Le citoyennisme, qui est l’idéologie dominante à gauche, est décidément bien un négationnisme (à peine dissimulé) de l’histoire du mouvement ouvrier et de ses combats.
Le 4 septembre 2010, si vous tenez à descendre dans la rue contre ce pléonasme (faussement) naïf qu’est la «xénophobie d’État» (tout État est xénophobe, sinon il ne remplit pas sa fonction essentielle : défendre la nation), criez au moins le nom des Communards et des pétroleuses !
Ayez une pensée pour le général Dombrovski mort sur les barricades près de la rue Myrrha, Théophile Ferré, Louis Rossel et tous les anonymes exécutés par cette Troisième République que les rédacteurs de l’appel «Non au pilori» voudraient nous voir «fêter» le 4 septembre 2010.
N’oubliez pas qui était Adolphe Thiers, le chef des Versaillais, celui qui a lancé 130'000 soldats contre les ouvriers et les artisans parisiens, le premier président de cette Troisième République qui a commencé aussi mal qu’elle a fini et que nos citoyennistes sans mémoire voudraient que nous fêtions en enterrant une seconde fois les Communards.
Des conseils de guerre fusillant les Communards en septembre 1870 aux pleins pouvoirs votés à Pétain en juillet 1940 par les trois quarts des députés socialistes, de la guerre du Rif aux massacres et aux bagnes d’Indochine en passant par les interventions des armées françaises contre la révolution russe, des fichiers de l’immigration les plus sophistiqués de la planète aux lois restreignant (déjà) les droits des immigrés, la Troisième République a une belle continuité que les sans-mémoire de la gauche s’apprêtent à «fêter» en toute bonne (in)conscience !
Yves Coleman - Ni patrie ni frontières, 26 août 2010.