Parole de flic : le spectre "anarcho-autonome" dans la ligne de mire
L’extrême gauche radicale tentée par la violence
Les autorités s’inquiètent de la résurgence de groupes extrémistes auxquels elles attribuent la série d’actions criminelles de ces dernières semaines. De source policière, un millier de militants français de la gauche radicale, dont une centaine de «casseurs», ont fait le voyage en Allemagne pour y prendre part aux protestations contre le G8. À Paris, les services de renseignement s’intéressent aux agissements de cette mouvance.
«Cette poignée d’ultras nous rappellent de mauvais souvenirs : dans les années 1970, les “autonomes” ont commencé par des actions similaires et cela s’est terminé par des bombes et des assassinats.» Selon ce policier, la surveillance des groupes violents d’extrême gauche est redevenue une «priorité opérationnelle» pour les renseignements généraux alors que la police judiciaire est saisie de plusieurs dossiers liés à cette mouvance.
Une mouvance particulièrement active ces dernières semaines. Qualifiés «d’anarcho-autonomes» par les services de police, ces militants sont plusieurs centaines en France dont une cinquantaine en Île-de-France où ils occupent une demi-douzaine de squats «politiques». S’y ajoute plus d’un millier de sympathisants actifs dont 150 à 200 à Paris. Leurs lieux d’implantation (Toulouse, Rennes, Nantes, universités parisiennes de Nanterre, de Tolbiac ou de Saint-Denis…) correspondent souvent à des bastions du mouvement anti-CPE au cours duquel ils ont commencé à faire parler d’eux. Ils ont ensuite redoublé d’efforts à l’occasion de la présidentielle. En faisant dégénérer des manifestations comme ce fut le cas les 6 et 16 mai dernier. La dernière tentative en ce sens remonte à samedi dernier. C’était à Paris entre la place Blanche et le cimetière du Père Lachaise. Changeant de stratégie, ces partisans de l’action directe ont tout d’abord privilégié l’attaque de locaux de partis politiques toutes tendances confondues. En région parisienne, 35 permanences ont été prises pour cible : 21 pour l’UMP, 8 pour le PS, 3 pour les Verts et 2 pour le Parti communiste.
Chapeautés par des mentors
Seconde méthode, clairement calquée sur les violences urbaines : l’incendie volontaire. La section antiterroriste de la brigade criminelle est ainsi saisie de près de cent incendies de ce type en avril et en mai auquel il faut ajouter une tentative d’incendie de véhicules devant le commissariat de police du XVIIIe arrondissement. Des suspects ont été interpellés dans certaines affaires : la plupart sont jeunes (une vingtaine d’années) et sont chapeautés par des mentors plus âgés. Tous sont connus comme des partisans de la violence et certains ont déjà été repérés dans les récents incidents de la gare du Nord ou dans l’occupation de locaux universitaires au cours du mouvement anti-CPE.
La sous-direction antiterroriste de la police judiciaire enquête quant à elle sur l’attaque d’un centre des impôts à Toulouse et sur deux tentatives d’attentat, avec des engins incendiaires du même type, contre un pylône EDF dans les Bouches-du-Rhône et un relais TDF à Lyon. À cette violence, répond la radicalisation du discours dans les tracts et sur les blogs «amis» où l’on trouve des formules comme «on l’a pas souhaité mais c’est la guerre. Le feu ne se propagera pas tout seul» ou des hommages aux «rebelles enfermés» comme Georges Ibrahim Abdallah, condamné pour les attentats de 1986 ou les militants d’Action directe. Sont aussi évoquées «les caisses cramées» et «les violences dans les quartiers populaires» dans une tentative de séduire les banlieues. «Pour le moment sans succès», précise un policier, «on a simplement observé qu’au cours de la manifestation du 16 mai, une poignée de jeunes de cité avaient pour la première fois rejoint les militants radicaux».
Presse jaune, 8 juin 2007
(Jean Chichizola, Le Figaro).