Vandalisme comparé
Selon le Monde du 26 décembre 2006, durant les onze premiers mois de 2006, 40.270 véhicules ont été incendiés en France, contre 42.000 en 2005. En «zone police», les chiffres de la Direction centrale de la Sécurité publique (DCSP) montrent la même constante (32.695 en 2006, contre 32.669 en 2005).
Nuit du 18 au 19 décembre 2006 - parking souterrain de la Côte Joyeuse à saintClaude.
Nuit du 10 au 11 mai 1968 - rue Gay-Lussac à Paris.
«Dans l’agressivité dont ont fait preuve les masses, c’est indiscutablement le système de la marchandise qui était visé. S’il y eut peu de pillages, beaucoup de vitrines de magasins subirent la critique du pavé. Il y a longtemps que les situationnistes prévoyaient que l’incitation permanente à profiter des objets les plus divers, en échange d’une insidieuse contrepartie en argent, provoquerait la colère des masses abusées et traitées en agents consommateurs. Les voitures automobiles qui cumulent en elles l’aliénation du travail et du loisir, l’ennui mécanique, la difficulté de se déplacer et la rogne permanente de leur propriétaire, attirèrent principalement l’allumette (on est en droit de s’étonner de ce que les humanistes, habituellement prompts à dénoncer les violences, n’aient pas cru devoir applaudir à un geste salutaire qui sauve de la mort un bon nombre de personnes promises chaque jour aux accidents de la route).»
«Pas davantage nous n’avons prétendu que certaines formes d’action qu’a revêtu le mouvement des occupations — à l’exception peut-être de l’emploi des bandes dessinées critiques — aient eu une origine directement situationniste. Nous voyons, au contraire, l’origine de toutes dans des luttes ouvrières “sauvages” ; et depuis plusieurs années certains numéros de notre revue les avaient citées à mesure, en spécifiant bien d’où elles venaient. Ce sont les ouvriers qui, les premiers, ont attaqué le siège d’un journal pour protester contre la falsification des informations les concernant (à Liège en 1961) ; qui ont brûlé les voitures (à Merlebach en 1961) ; qui ont commencé à écrire sur les murs les formules de la nouvelle révolution (“Ici finit la liberté”, sur un mur de l’usine Rhodiaceta en 1967). En revanche, on peut signaler, évident prélude à l’activité des Enragés à Nanterre, qu’à Strasbourg, le 26 octobre 1966, pour la première fois un professeur d’Université fut pris à partie et chassé de sa chaire : c’est le sort que les situationnistes firent subir au cybernéticien Abraham Moles lors de son cours inaugural.»
«Le commencement d’une époque», I.S. no12, septembre 1969.
«Dans l’agressivité dont ont fait preuve les masses, c’est indiscutablement le système de la marchandise qui était visé. S’il y eut peu de pillages, beaucoup de vitrines de magasins subirent la critique du pavé. Il y a longtemps que les situationnistes prévoyaient que l’incitation permanente à profiter des objets les plus divers, en échange d’une insidieuse contrepartie en argent, provoquerait la colère des masses abusées et traitées en agents consommateurs. Les voitures automobiles qui cumulent en elles l’aliénation du travail et du loisir, l’ennui mécanique, la difficulté de se déplacer et la rogne permanente de leur propriétaire, attirèrent principalement l’allumette (on est en droit de s’étonner de ce que les humanistes, habituellement prompts à dénoncer les violences, n’aient pas cru devoir applaudir à un geste salutaire qui sauve de la mort un bon nombre de personnes promises chaque jour aux accidents de la route).»
Enragés et situationnistes dans le mouvement des occupations.
«De même que la première organisation du prolétariat classique a été précédée, à la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle, d’une époque de gestes isolés, “criminels”, visant à la destruction des machines de la production, qui éliminait les gens de leur travail, on assiste en ce moment à la première apparition d’une vague de vandalisme contre les machines de la consommation, qui nous éliminent tout aussi sûrement de la vie. Il est bien entendu qu’en ce moment comme alors la valeur n’est pas dans la destruction elle-même, mais dans l’insoumission qui sera ultérieurement capable de se transformer en projet positif, jusqu’à reconvertir les machines dans le sens d’un accroissement du pouvoir réel des hommes. Pour laisser de côté les ravages des rassemblements d’adolescents, on peut citer quelques actions des ouvriers, qui sont en grande partie incompréhensibles du point de vue revendicatif classique.
[…] Le 4 août en France, les mineurs en grève de Merlebach s’attaquent à vingt-et-une voitures stationnant devant les locaux de la direction. Tout le monde a souligné, avec stupeur, que ces automobiles étaient presque toutes celles d’employés de la mine, donc de travailleurs très proches d’eux. Comment ne pas y voir, en plus de tant de raisons qui justifient en permanence l’agressivité des exploités, un geste de défense contre l’objet central de l’aliénation consommatrice ?»
«De même que la première organisation du prolétariat classique a été précédée, à la fin du XVIIIe et au début du XIXe siècle, d’une époque de gestes isolés, “criminels”, visant à la destruction des machines de la production, qui éliminait les gens de leur travail, on assiste en ce moment à la première apparition d’une vague de vandalisme contre les machines de la consommation, qui nous éliminent tout aussi sûrement de la vie. Il est bien entendu qu’en ce moment comme alors la valeur n’est pas dans la destruction elle-même, mais dans l’insoumission qui sera ultérieurement capable de se transformer en projet positif, jusqu’à reconvertir les machines dans le sens d’un accroissement du pouvoir réel des hommes. Pour laisser de côté les ravages des rassemblements d’adolescents, on peut citer quelques actions des ouvriers, qui sont en grande partie incompréhensibles du point de vue revendicatif classique.
[…] Le 4 août en France, les mineurs en grève de Merlebach s’attaquent à vingt-et-une voitures stationnant devant les locaux de la direction. Tout le monde a souligné, avec stupeur, que ces automobiles étaient presque toutes celles d’employés de la mine, donc de travailleurs très proches d’eux. Comment ne pas y voir, en plus de tant de raisons qui justifient en permanence l’agressivité des exploités, un geste de défense contre l’objet central de l’aliénation consommatrice ?»
«Les mauvais jours finiront», I.S. no7, avril 1962.