Appel à manifester contre les violences policières
Lundi 13 juillet à 19 heures à Montreuil (93)
Pas d’appel à la dispersion, pas de sommations, pas de lacrymogènes ; mercredi soir, la répression a d’emblée pris la forme de nombreuses salves de flashball tirées à une distance de 4 à 10 mètres, selon un angle qui ne laisse aucun doute quant aux intentions des tireurs : cinq ont été blessés, tous été visés dans la partie supérieure du corps, visés au thorax, à l’épaule, au front, à la nuque, à la tête. L’un d’entre eux, touché au visage, a eu l’œil éclaté, littéralement détruit.
Toulouse, Villiers-le-Bel, Nantes et cette semaine à Montreuil : Joachim est la cinquième personne depuis le début de l’année à perdre un œil suite à un tir de flashball. On ne compte plus les fractures du nez, de la mâchoire ou des pommettes dues à ces engins de mort pour lequel le slogan du fabricant est «une arme de défense révolutionnaire». En pratique, le message est clair : la chasse aux opposants est ouverte.
La dotation en flashball de la police a été appuyée par l’argument que ces armes seraient «non létales» (taser, flashball, et maintenant «lanceur 40», plus puissant) et que leur usage serait rigoureusement encadré. Les faits démontrent qu’il n’en est rien. Que l’on habite un quartier de banlieue où la police harcèle quotidiennement la population, que l’on s’oppose aux arrestations de sans-papiers, que l’on manifeste pour contester tel ou tel aspect d’un ordre social profondément inégalitaire, il est de plus en plus fréquent de se trouver dans la ligne de mire d’un policier prêt à dégainer. Assurée de son immunité, la police utilise en effet ces flashball sans hésiter à s’en servir de manière à occasionner le maximum de dégâts.
Pour terroriser les opposants et dissuader toute insoumission, on tire à la tête, on blesse, on éborgne. Pour avoir défendu l’existence de lieux collectifs hors la loi de la propriété privée, on mutile.
Refusons cette barbarie policière et son impunité. Nous appelons chacun, avec l’ensemble des organisations et collectifs déterminés à défendre les libertés, à s’opposer à cette surenchère de la violence policière et à refuser d’être gouvernés par la peur.
À Montreuil, la police tire, un manifestant perd un œil
Située dans le centre de Montreuil, l’ancienne clinique occupée depuis janvier servait à la fois de lieu d’habitation et de lieu «ouvert» avec, entre autres, des projections de film, des ateliers sur les questions de logement, une permanence sur les droits sociaux et la rédaction d’un journal. Mercredi matin, à 6 heures, elle est évacuée sur ordre de la préfecture de Seine-Saint-Denis. En début de soirée, un rassemblement avec distribution de gnocchi est organisé, à l’initiative des résidents et de leurs amis, à l’entrée de la rue piétonne du quartier de la Croix de Chavaux pour informer les habitants de la situation. Des feux d’artifice sont tirés, non loin de là, près de l’ancienne clinique. Des manifestants s’y rendent, «sans avoir l’intention de réinvestir» les lieux. C’est ce moment que les policiers choisissent pour intervenir.
Le père de Joachim, Stéphane Gatti, dans une lettre ouverte diffusée sur internet, rapporte les propos de son fils, sur son lit d’hôpital : «Il y a eu des feux d’artifices au-dessus du marché. Nous nous y sommes rendus. Immédiatement, les policiers qui surveillaient depuis leur voiture se sont déployés devant. Une minute plus tard, alors que nous nous trouvions encore en face de la clinique, à la hauteur du marché couvert, les policiers qui marchaient à quelques mètres derrière nous, ont tiré sur notre groupe au moyen de leur flashball. À ce moment-là, je marchais et j’ai regardé en direction des policiers. J’ai senti un choc violent au niveau de mon œil droit. Sous la force de l’impact, je suis tombé au sol. Des personnes m’ont aidé à me relever et m’ont soutenu jusqu’à ce que je m’asseoie sur un trottoir dans la rue de Paris. Devant l’intensité de la douleur et des saignements, des pompiers ont été appelés.»
La tonalité des dépêches AFP relatant les événements est tout autre. Elles reproduisent abondamment les déclarations de la préfecture, sans les confronter aux témoignages des personnes visées par les tirs. «Vers 22 heures (…), des personnes se sont dirigées vers la clinique pour la réinvestir. Les forces de l’ordre les en ont empêchées. S’en sont suivis des jets de projectiles contre la police et celle-ci a riposté en faisant usage de flashball. Il y a eu trois arrestations», indique la préfecture, «sans faire état de blessé», précise la dépêche en date du 9 juillet. Le lendemain, les forces de l’ordre changent leur version, toujours dans l’AFP : «Nous avons bien eu connaissance qu’un jeune homme a perdu son œil mais pour le moment il n’y a pas de lien établi de manière certaine entre la perte de l’œil et le tir de flashball.»
Les témoins interrogés par Mediapart n’ont aucun doute sur les liens de cause à effet. Une militante du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), présente au moment des faits, raconte : «Mercredi soir, nous devions être une trentaine à nous être rassemblés à l’entrée de la rue piétonne de Montreuil. Nous avions un butagaz et nous avions préparé des gnocchi. L’idée était de faire une cantine, après l’expulsion du matin, pour informer les gens, distribuer des tracts, mettre des banderoles et montrer que la Clinique avait été évacuée, mais que nous ne comptions pas abandonner la rue malgré l’occupation policière de la ville. J’avais repéré une voiture de police garée pas très loin, ils nous surveillaient. À un moment, des feux d’artifice sont lancés au niveau de la place du marché, près de la clinique, pas très loin de l’endroit où nous étions rassemblés. Nous nous y rendons en ordre dispersé, sans aucune intention de réinvestir les lieux. Nous restons là environ cinq minutes. Au moment où nous faisions demi-tour pour quitter la place, les policiers sont arrivés et se sont équipés. Ils étaient plus nombreux que ce que j’avais pu voir au début. Ils viennent vers nous. Tout s’est passé en l’espace de trois minutes. Il n’y a eu aucune bagarre ou confrontation avec la police, aucune sommation. Ils étaient à cinq mètres et ils ont tiré plusieurs fois avec leurs flashball. Cinq personnes touchées, toutes au-dessus de la ceinture : Joachim à l’œil, il est tombé sous le choc. Un autre au niveau du sternum, un au front, un au pouce et une autre au poignet, alors qu’elle se protégeait la nuque avec les mains en s’enfuyant. Les policiers ne se sont rendus compte de rien, ils ont continué leur traque. Nous avons dû nous-mêmes appeler les pompiers.»
Dans sa lettre ouverte, Stéphane Gatti fait lui aussi le récit de cette journée : «Le matin du mercredi 8 juillet, la police avait vidé une clinique occupée dans le centre-ville. La Clinique, en référence aux expériences venues d’Italie, avait pris la forme d’un “centro sociale” à la française : logements, projections de films, journal, défense des sans-papiers, repas… Tous ceux qui réfléchissent au vivre ensemble regardaient cette expérience avec tendresse. L’évacuation s’est faite sans violence. Les formidables moyens policiers déployés ont réglé la question en moins d’une heure (…). Ceux qui s’étaient attachés à cette expérience et les résidents ont décidé pour protester contre l’expulsion d’organiser une gigantesque bouffe dans la rue piétonnière de Montreuil. Trois immenses tables de gnocchi (au moins cinq mille) roulés dans la farine et fabriqués à la main attendaient d’être jetés dans le bouillon. Des casseroles de sauce tomate frémissaient. Ils avaient tendu des banderoles pour rebaptiser l’espace. Des images du front populaire ou des colonnes libertaires de la guerre d’Espagne se superposaient à cette fête parce que parfois les images font école. J’ai quitté cette fête à 20 heures en saluant Joachim. À quelques mètres de là, c’était le dernier jour, dans les locaux de la Parole errante à la Maison de l’arbre rue François Debergue, de notre exposition sur Mai 68. Depuis un an, elle accueille des pièces de théâtres, des projections de films, des réunions, La nuit sécuritaire, L’appel des Appels, des lectures, des présentations de livres… Ce jour-là, on fermait l’exposition avec une pièce d’Armand Gatti “L’homme seul” (…). C’était une lecture de trois heures. Nous étions entourés par les journaux de Mai. D’un coup, des jeunes sont arrivés dans la salle, effrayés, ils venaient se cacher… ils sont repartis. On m’a appelé. Joachim est à l’hôpital à l’hôtel Dieu. Il était effectivement là. Il n’avait pas perdu conscience. Son visage était couvert de sang qui s’écoulait lentement comme s’il était devenu poreux. Dans un coin, l’interne de service m’a dit qu’il y avait peu de chance qu’il retrouve l’usage de son œil éclaté. Je dis éclaté parce que je l’apprendrais plus tard, il avait trois fractures au visage, le globe oculaire fendu en deux, la paupière arrachée…»
D’autres témoignages sont mis en ligne sur le site de la Coordination des intermittents et précaires d’Île-de-France. De son côté, la mairie de Montreuil a fait savoir, vendredi 10 juillet, que l’Inspection générale des services (IGS) allait être saisie afin que la «lumière soit faite sur les circonstances». «Je constate que le travail de restauration d’une police républicaine n’est pas encore achevé à Montreuil», a déclaré Dominique Voynet, la maire de la ville. Une assemblée est prévue dimanche 12 juillet à 15 heures devant l’ancienne clinique, ainsi qu’une manifestation, lundi 13 juillet à 18 heures, à l’entrée de la rue du capitaine Dreyfus, au métro Croix de Chavaux.
Ce drame pose, une nouvelle fois, la question de l’usage des armes dites «non-létales». Il documente aussi les méthodes de communication des pouvoirs publics dans ce genre de cas, ainsi que le fonctionnement des médias. «Tristement, note la revue Vacarme sur son site Internet, la course de vitesse que la préfecture de Seine-Saint-Denis a engagé auprès des agences de presse pour diffuser des informations manifestement erronées, nous rappelle cet autre communiqué, (…) relatif à la mort de Mohammed Berrichi, en mai 2002. Comme si chaque fois que des incidents mettent en jeu la police, l’essentiel, pour le préfet, pour l’État, consiste à vaincre sur le front sordide de l’opinion publique. Un accident est toujours possible. La mécanique communicationnelle de l’État, elle, est systématique.»
À bout portant et sans sommation, la police exécute ses basses œuvres. Mercredi 8 juillet à la nuit tombée, les forces du maintien de l’ordre ont massivement tiré au flashball sur les participants au rassemblement de soutien aux expulsés de la Clinique, un immeuble de Montreuil (93) occupé collectivement depuis quelques mois. La Clinique, en référence aux expériences venues d’Italie, avait pris la forme d’un «centro sociale» à la française : logements, projections de films, journal, défense des sans-papiers, repas…
Pas d’appel à la dispersion, pas de sommations, pas de lacrymogènes ; mercredi soir, la répression a d’emblée pris la forme de nombreuses salves de flashball tirées à une distance de 4 à 10 mètres, selon un angle qui ne laisse aucun doute quant aux intentions des tireurs : cinq ont été blessés, tous été visés dans la partie supérieure du corps, visés au thorax, à l’épaule, au front, à la nuque, à la tête. L’un d’entre eux, touché au visage, a eu l’œil éclaté, littéralement détruit.
Toulouse, Villiers-le-Bel, Nantes et cette semaine à Montreuil : Joachim est la cinquième personne depuis le début de l’année à perdre un œil suite à un tir de flashball. On ne compte plus les fractures du nez, de la mâchoire ou des pommettes dues à ces engins de mort pour lequel le slogan du fabricant est «une arme de défense révolutionnaire». En pratique, le message est clair : la chasse aux opposants est ouverte.
La dotation en flashball de la police a été appuyée par l’argument que ces armes seraient «non létales» (taser, flashball, et maintenant «lanceur 40», plus puissant) et que leur usage serait rigoureusement encadré. Les faits démontrent qu’il n’en est rien. Que l’on habite un quartier de banlieue où la police harcèle quotidiennement la population, que l’on s’oppose aux arrestations de sans-papiers, que l’on manifeste pour contester tel ou tel aspect d’un ordre social profondément inégalitaire, il est de plus en plus fréquent de se trouver dans la ligne de mire d’un policier prêt à dégainer. Assurée de son immunité, la police utilise en effet ces flashball sans hésiter à s’en servir de manière à occasionner le maximum de dégâts.
Pour terroriser les opposants et dissuader toute insoumission, on tire à la tête, on blesse, on éborgne. Pour avoir défendu l’existence de lieux collectifs hors la loi de la propriété privée, on mutile.
Refusons cette barbarie policière et son impunité. Nous appelons chacun, avec l’ensemble des organisations et collectifs déterminés à défendre les libertés, à s’opposer à cette surenchère de la violence policière et à refuser d’être gouvernés par la peur.
Manifestation lundi 13 juillet à 19 heures
Rdv à l’entrée de la rue du capitaine Dreyfus (la rue piétonne), à Montreuil (93). Métro Croix de Chavaux
À Montreuil, la police tire, un manifestant perd un œil
Joachim Gatti a 34 ans, il est réalisateur et habite Montreuil depuis plusieurs années, où il participe à différentes luttes, comme la résistance aux arrestations des sans-papiers. Il a été atteint d’une balle de Flashball en plein visage, tirée par un policier, mercredi 8 juillet à Montreuil. Hospitalisé à Paris, il a perdu l’usage de son œil droit et doit subir diverses opérations pour réparer les fractures. Quatre autres personnes, réunies le même jour après l’expulsion d’un squat dans la ville, ont été visées «au-dessus de la ceinture», indiquent plusieurs témoins.
Située dans le centre de Montreuil, l’ancienne clinique occupée depuis janvier servait à la fois de lieu d’habitation et de lieu «ouvert» avec, entre autres, des projections de film, des ateliers sur les questions de logement, une permanence sur les droits sociaux et la rédaction d’un journal. Mercredi matin, à 6 heures, elle est évacuée sur ordre de la préfecture de Seine-Saint-Denis. En début de soirée, un rassemblement avec distribution de gnocchi est organisé, à l’initiative des résidents et de leurs amis, à l’entrée de la rue piétonne du quartier de la Croix de Chavaux pour informer les habitants de la situation. Des feux d’artifice sont tirés, non loin de là, près de l’ancienne clinique. Des manifestants s’y rendent, «sans avoir l’intention de réinvestir» les lieux. C’est ce moment que les policiers choisissent pour intervenir.
Le père de Joachim, Stéphane Gatti, dans une lettre ouverte diffusée sur internet, rapporte les propos de son fils, sur son lit d’hôpital : «Il y a eu des feux d’artifices au-dessus du marché. Nous nous y sommes rendus. Immédiatement, les policiers qui surveillaient depuis leur voiture se sont déployés devant. Une minute plus tard, alors que nous nous trouvions encore en face de la clinique, à la hauteur du marché couvert, les policiers qui marchaient à quelques mètres derrière nous, ont tiré sur notre groupe au moyen de leur flashball. À ce moment-là, je marchais et j’ai regardé en direction des policiers. J’ai senti un choc violent au niveau de mon œil droit. Sous la force de l’impact, je suis tombé au sol. Des personnes m’ont aidé à me relever et m’ont soutenu jusqu’à ce que je m’asseoie sur un trottoir dans la rue de Paris. Devant l’intensité de la douleur et des saignements, des pompiers ont été appelés.»
La tonalité des dépêches AFP relatant les événements est tout autre. Elles reproduisent abondamment les déclarations de la préfecture, sans les confronter aux témoignages des personnes visées par les tirs. «Vers 22 heures (…), des personnes se sont dirigées vers la clinique pour la réinvestir. Les forces de l’ordre les en ont empêchées. S’en sont suivis des jets de projectiles contre la police et celle-ci a riposté en faisant usage de flashball. Il y a eu trois arrestations», indique la préfecture, «sans faire état de blessé», précise la dépêche en date du 9 juillet. Le lendemain, les forces de l’ordre changent leur version, toujours dans l’AFP : «Nous avons bien eu connaissance qu’un jeune homme a perdu son œil mais pour le moment il n’y a pas de lien établi de manière certaine entre la perte de l’œil et le tir de flashball.»
Les témoins interrogés par Mediapart n’ont aucun doute sur les liens de cause à effet. Une militante du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti), présente au moment des faits, raconte : «Mercredi soir, nous devions être une trentaine à nous être rassemblés à l’entrée de la rue piétonne de Montreuil. Nous avions un butagaz et nous avions préparé des gnocchi. L’idée était de faire une cantine, après l’expulsion du matin, pour informer les gens, distribuer des tracts, mettre des banderoles et montrer que la Clinique avait été évacuée, mais que nous ne comptions pas abandonner la rue malgré l’occupation policière de la ville. J’avais repéré une voiture de police garée pas très loin, ils nous surveillaient. À un moment, des feux d’artifice sont lancés au niveau de la place du marché, près de la clinique, pas très loin de l’endroit où nous étions rassemblés. Nous nous y rendons en ordre dispersé, sans aucune intention de réinvestir les lieux. Nous restons là environ cinq minutes. Au moment où nous faisions demi-tour pour quitter la place, les policiers sont arrivés et se sont équipés. Ils étaient plus nombreux que ce que j’avais pu voir au début. Ils viennent vers nous. Tout s’est passé en l’espace de trois minutes. Il n’y a eu aucune bagarre ou confrontation avec la police, aucune sommation. Ils étaient à cinq mètres et ils ont tiré plusieurs fois avec leurs flashball. Cinq personnes touchées, toutes au-dessus de la ceinture : Joachim à l’œil, il est tombé sous le choc. Un autre au niveau du sternum, un au front, un au pouce et une autre au poignet, alors qu’elle se protégeait la nuque avec les mains en s’enfuyant. Les policiers ne se sont rendus compte de rien, ils ont continué leur traque. Nous avons dû nous-mêmes appeler les pompiers.»
Dans sa lettre ouverte, Stéphane Gatti fait lui aussi le récit de cette journée : «Le matin du mercredi 8 juillet, la police avait vidé une clinique occupée dans le centre-ville. La Clinique, en référence aux expériences venues d’Italie, avait pris la forme d’un “centro sociale” à la française : logements, projections de films, journal, défense des sans-papiers, repas… Tous ceux qui réfléchissent au vivre ensemble regardaient cette expérience avec tendresse. L’évacuation s’est faite sans violence. Les formidables moyens policiers déployés ont réglé la question en moins d’une heure (…). Ceux qui s’étaient attachés à cette expérience et les résidents ont décidé pour protester contre l’expulsion d’organiser une gigantesque bouffe dans la rue piétonnière de Montreuil. Trois immenses tables de gnocchi (au moins cinq mille) roulés dans la farine et fabriqués à la main attendaient d’être jetés dans le bouillon. Des casseroles de sauce tomate frémissaient. Ils avaient tendu des banderoles pour rebaptiser l’espace. Des images du front populaire ou des colonnes libertaires de la guerre d’Espagne se superposaient à cette fête parce que parfois les images font école. J’ai quitté cette fête à 20 heures en saluant Joachim. À quelques mètres de là, c’était le dernier jour, dans les locaux de la Parole errante à la Maison de l’arbre rue François Debergue, de notre exposition sur Mai 68. Depuis un an, elle accueille des pièces de théâtres, des projections de films, des réunions, La nuit sécuritaire, L’appel des Appels, des lectures, des présentations de livres… Ce jour-là, on fermait l’exposition avec une pièce d’Armand Gatti “L’homme seul” (…). C’était une lecture de trois heures. Nous étions entourés par les journaux de Mai. D’un coup, des jeunes sont arrivés dans la salle, effrayés, ils venaient se cacher… ils sont repartis. On m’a appelé. Joachim est à l’hôpital à l’hôtel Dieu. Il était effectivement là. Il n’avait pas perdu conscience. Son visage était couvert de sang qui s’écoulait lentement comme s’il était devenu poreux. Dans un coin, l’interne de service m’a dit qu’il y avait peu de chance qu’il retrouve l’usage de son œil éclaté. Je dis éclaté parce que je l’apprendrais plus tard, il avait trois fractures au visage, le globe oculaire fendu en deux, la paupière arrachée…»
D’autres témoignages sont mis en ligne sur le site de la Coordination des intermittents et précaires d’Île-de-France. De son côté, la mairie de Montreuil a fait savoir, vendredi 10 juillet, que l’Inspection générale des services (IGS) allait être saisie afin que la «lumière soit faite sur les circonstances». «Je constate que le travail de restauration d’une police républicaine n’est pas encore achevé à Montreuil», a déclaré Dominique Voynet, la maire de la ville. Une assemblée est prévue dimanche 12 juillet à 15 heures devant l’ancienne clinique, ainsi qu’une manifestation, lundi 13 juillet à 18 heures, à l’entrée de la rue du capitaine Dreyfus, au métro Croix de Chavaux.
Ce drame pose, une nouvelle fois, la question de l’usage des armes dites «non-létales». Il documente aussi les méthodes de communication des pouvoirs publics dans ce genre de cas, ainsi que le fonctionnement des médias. «Tristement, note la revue Vacarme sur son site Internet, la course de vitesse que la préfecture de Seine-Saint-Denis a engagé auprès des agences de presse pour diffuser des informations manifestement erronées, nous rappelle cet autre communiqué, (…) relatif à la mort de Mohammed Berrichi, en mai 2002. Comme si chaque fois que des incidents mettent en jeu la police, l’essentiel, pour le préfet, pour l’État, consiste à vaincre sur le front sordide de l’opinion publique. Un accident est toujours possible. La mécanique communicationnelle de l’État, elle, est systématique.»
À lire également l’article de Mogniss Abdallah
sur «L’affaire Youssef Khaïf dans les médias».
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Carine Fouteau - Mediapart, 12 juillet 2009.
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