Fin de la grève de la faim au CRA de Vincennes
Témoignages de l’intérieur du centre,
le mercredi 8 juillet 2009
Nous appelons deux fois aux cabines, les retenus ne veulent pas parler de la fin du mouvement. Puis la troisième fois quelqu’un veut bien nous parler.
Nous lui donnons des informations sur l’attitude de l’État algérien, le fait qu’il signe tous les accords anti-immigration avec la France, qu’il a même fait passer un texte de loi qui prévoit de punir de prison l’émigration clandestine.
La personne refuse de venir nous parler, nous demandons alors à notre interlocuteur revenu au bout du fil si c’est à cause de la pression de la police que personne ne veut nous parler.
Nous demandons des nouvelles des deux retenus algériens qui ont été expulsés hier et nous racontons ce qu’ils nous ont dit sur leur expulsion.
Notre interlocuteur va chercher un retenu qui pourrait nous raconter la fin de la grève de la faim.
Ce 8 juillet l’ambiance est lourde, tous semblent profondément tristes. Mais il y a semaine, le 1er juillet, les retenus nous disaient :
Les retenus ont réagi, leur grève de la faim a rendu visible leur révolte, leur colère et le fait qu’il y a des gens qui ne s’habituent pas et ne s’habitueront jamais à ça. Il ont trouvé un moyen d’enrayer la machine à expulser, que tout ne se passe pas normalement, c’est aussi pour contribuer de l’extérieur à cet enrayement que nous publions et continuerons à publier l’histoire de leurs luttes à l’intérieur. C’est ce que nous leur avons dit avant de les saluer.
le mercredi 8 juillet 2009
«On a arrêté la grève de la faim hier. Je peux rien vous raconter en ce moment. Au niveau d’en bas, j’ai eu quelques petits problèmes à cause des communications. Ils nous ont vu beaucoup téléphoner, ils m’ont averti, je préfère arrêter les communications.»
Nous appelons deux fois aux cabines, les retenus ne veulent pas parler de la fin du mouvement. Puis la troisième fois quelqu’un veut bien nous parler.
«On a arrêté, ça sert à rien. La Cimade depuis une semaine nous promet des choses, mais ils ne font rien. Pourtant c’était important, on aurait dû continuer mais personne ne prend ça en considération (…) Quand tu arrives ici, il faut trouver un moyen de sortir : faire des tentatives de suicide, avaler des lames de rasoirs ou autre chose … sinon c’est fini ; ça fait quinze jours que je suis ici, depuis, aucun Algérien n’a été libéré, seulement deux Marocains et deux Tunisiens l’ont été, par contre ils ne libèrent que des Chinois. On sait même pas comment ça marche : si c’est le consulat qui signe ou autre chose.»
Nous lui donnons des informations sur l’attitude de l’État algérien, le fait qu’il signe tous les accords anti-immigration avec la France, qu’il a même fait passer un texte de loi qui prévoit de punir de prison l’émigration clandestine.
«Pourquoi personne n’affiche tout ça ? Je comprends pas car si c’était connu, les gens se révolteraient. Je connais une association, Droits Devant, qui s’occupe bien des sans-papiers algériens, est-ce que c’est une association payée par l’État algérien ? (…) On est au centre, on est enfermés. Je sais pas ce qu’on va faire. Je vais essayer de vous passer quelqu’un qui vous raconte la fin de la grève de la faim.»
La personne refuse de venir nous parler, nous demandons alors à notre interlocuteur revenu au bout du fil si c’est à cause de la pression de la police que personne ne veut nous parler.
«Non on n’a pas de pression, on n’a pas peur de la police, on s’en fout d’eux.»
Nous demandons des nouvelles des deux retenus algériens qui ont été expulsés hier et nous racontons ce qu’ils nous ont dit sur leur expulsion.
«Moi je sais que c’est quand on arrive dans l’avion qu’il faut les emmerder comme ça ils ont peur de perdre des clients et ils te font descendre.»
Notre interlocuteur va chercher un retenu qui pourrait nous raconter la fin de la grève de la faim.
«Hier ils ont été expulsés, ça a été fait. Dommage. Ils nous ont appelé de l’avion vers 16 heures, on a su qu’ils ont été expulsés. Alors, hier au centre ils ont pas voulu continuer. Tout le monde a peur vis-à-vis de ce qu’ils ont fait aux autres. Tout le monde a peur. Ce sont des pauvres gens. Tout le monde a mangé. Personne ne dévoile ce qu’il ressent. Les gens ne se font pas confiance entre eux. Je ne peux pas deviner leurs pensées. Moi j’étais bloqué, ils ont changé d’avis d’un moment à l’autre. J’étais bloqué, j’ai pas pu réagir. On n’a pas de possibilités, c’est très délicat.»
Ce 8 juillet l’ambiance est lourde, tous semblent profondément tristes. Mais il y a semaine, le 1er juillet, les retenus nous disaient :
«En 25 jours, il y a eu cinq tentatives de suicide. L’ambiance était horrible au centre. Ca devenait fou, on regardait ça tous les jours et on s’habituait, c’est fou on ne doit pas s’habituer à des gens qui s’automutilent et se suicident tous les jours. Il fallait réagir à ça. On était en train de devenir des monstres, on réagissait plus. On s’est dit il faut réagir autrement, ne pas s’habituer.»
Les retenus ont réagi, leur grève de la faim a rendu visible leur révolte, leur colère et le fait qu’il y a des gens qui ne s’habituent pas et ne s’habitueront jamais à ça. Il ont trouvé un moyen d’enrayer la machine à expulser, que tout ne se passe pas normalement, c’est aussi pour contribuer de l’extérieur à cet enrayement que nous publions et continuerons à publier l’histoire de leurs luttes à l’intérieur. C’est ce que nous leur avons dit avant de les saluer.