Dijon : Amora toujours bloquée
Les salarié-e-s d’Amora Maille maintiennent la pression.
Depuis plus d’une semaine, ils bloquent les deux usines de Dijon et d’Appoigny, et surtout le site de Chevigny. En effet, alors que les deux premières doivent fermer d’ici la fin de l’année et tournent au ralenti voire plus du tout, la dernière usine Amora de la région est le seul endroit où les ouvrier-e-s peuvent taper Unilever au portefeuille. Une partie des salarié-e-s de l’usine sont en grève, et le piquet à l’entrée s’assure que les autres ne rentrent pas, et surtout empêche les camions de venir charger les cinq semaines de stock que la direction avait mis de côté en prévoyance du conflit.
Devant l’usine, merguez-apéro le midi, classique. Les responsables de l’usine sont postés un peu plus loin, et notent la présence des non-grévistes qui se contentent de venir pointer. «Pour eux, le blocage, ça change rien par rapport à d’habitude, ils font le même boulot, ils surveillent. Ils oseraient pas traverser la rue… Et si le directeur il se pointe dans sa voiture ici, y a plus de voiture et y a plus de directeur…» Le mot tourne que les cadres ont été rapatriés sur l’usine de Dijon et qu’ils continuent à bosser là-bas. Sur leurs ordinateurs, évidemment, et c’est sûrement pas eux qui feront tourner les machines, mais quand même, ça vaudrait le coup de bloquer aussi ce site…
Les gens sont déterminés, se faire jeter comme un malpropre après des années de boîte par un groupe qui fait cinq milliards de bénéfices en 2008, ça fout les boules, c’est sûr. Et puis, y a aussi le contexte, Barry Callebaud, Euroflaco à côté, le soutien de la population locale, les grosses grèves du 29 janvier et du 19 mars, les Antilles, la crise qui sert de prétexte aux gros groupes pour faire encore plus de bénef, Sarkozy et son bouclier fiscal pour ses petits copains… Tout ça, ça fait monter la colère, mais aussi le sentiment de force, et personne ne craint une intervention des flics pour déloger le piquet : d’abord, selon eux, il y a peu de chance que le préfet prenne le risque de faire intervenir des CRS contre des ouvriers à l’heure actuelle, craignant un embrasement généralisé en France. Au pire, si ça devait arriver, ils savent qu’ils peuvent compter sur la population locale pour faire face, notamment les autres boîtes du coin menacées, «le téléphone, Internet, l’info elle circule vite, comme dans les banlieues…» «Et ça ferait un sacré coup médiatique.»
En attendant, le conflit risque de durer. Pour l’instant, les négociateurs que leur envoie la direction n’ont aucune marge de manœuvre et c’est le siège d’Unilever à Rotterdam qui décide au final. Alors les salarié-e-s préparent la suite, d’autres actions, des contacts avec les autres boîtes du groupe en lutte en ce moment (Knorr par exemple).
Les salarié-e-s se préparent à passer une nuit de plus sur le piquet.