"Redistribution de la grande distribution !"
«L’honnêteté ne consiste pas à ne jamais voler, mais à savoir jusqu’à quel point on peut voler, et comment faire bon usage de ce qu’on vole.»
Samuel Butler
Le 29 janvier était une bonne date pour entreprendre une action à l’encontre de ceux qui, à défaut de nous rendre la vie moins chère, font toujours plus de propagande publicitaire pour nous faire croire le contraire. Jour de grève générale, occasion de déployer un très large panel de revendications, de la vie chère à la casse des services publics, en passant par les licenciements et le chômage de masse, l’exploitation du plus grand nombre par une économie dévoyée et la destruction lente des moyens de production traditionnels par une grande distribution toujours plus vorace… Ce jeudi matin à 10 heures, c’est donc près d’une cinquantaine de personnes qui, à l’initiative du Collectif de Chômeurs, Chômeuses et Précaires de Lille et exaspérées comme beaucoup par les conditions de vie imposées au plus grand nombre par l’économie capitaliste, se sont données rendez-vous près d’une station de métro pour se lancer dans une opération de redistribution à l’encontre du magasin Match des Halles, au centre ville de Lille.
Depuis des mois, c’est un mode d’action qui n’a cessé d’être utilisé contre les magasins de la grande distribution partout en France, à Paris, Rennes, Toulouse ou Grenoble. Le but étant de se réapproprier les produits de première nécessité, afin de les redistribuer à ceux qui en ont le plus besoin : précaires, SDF, chômeurEs, Rroms et sans-papiers. Ces «autoréductions» sont accomplies en tout lieu où il s’avère nécessaire de redistribuer les richesses, c’est-à-dire partout : la précarité n’est plus un phénomène de marge, elle est un phénomène de masse. Méthode peu appréciée des patrons, ceux de la grande distribution contre-attaquent. Au Monoprix du Faubourg-Saint-Antoine à Paris, on accuse les «redistributeurs» d’avoir été autocratiques. À Lyon, certains ont été condamnés pour vol organisé. Mais les accusations ne doivent pas cacher la réalité : les voleurs ne sont pas chez les précaires, ils sont chez ceux qui fixent les prix…
À Lille ce jeudi, il fallait tout d’abord attendre qu’à l’intérieur, des camarades remplissent leurs caddies de victuailles et produits de première nécessité, avant que l’invasion ne puisse se mettre en route. Lorsque la dizaine de chariots fut garnie, c’est-à-dire vers 11 heures, la trentaine de personnes en attente a pénétré dans le supermarché, déployé banderoles en faveur des précaires et contre le système capitaliste, tout en scandant «Contre la loi du fric et des patrons, grève, grève, réquisition !» Dans un même temps, une négociation de longue haleine a été entamée avec le propriétaire du magasin, afin qu’il laisse partir la dizaine de caddies gratuitement. Un geste pour le pouvoir d’achat, était-ce trop demander ? Les affiches du magasin annonçaient pourtant «Douze jours gratuits». Avait-on mal compris le message ? Non, on n’avait simplement pas lu la petite étoile qui, comme sur chaque mensonge publicitaire, renvoie en bas d’affiche aux conditions d’application dudit mensonge et qui ici prétendait à la seule «gratuité» de certains produits sélectionnés par l’Enseigne. C’est donc pour ça que le directeur n’a rien lâché. Alors que toutes les caisses étaient désormais bloquées, le directeur a choisit l’option d’inviter la police nationale.
Après une ultime négociation, les flics sont entrés de force dans le magasin, poussant sur les militants anti-précarité, avant d’en aligner une partie contre le mur et de filmer les visages les uns après les autres. L’autre partie, d’abord repoussée dans les rayons, a pris l’initiative de s’enfuir par les entrepôts. Mais au final, tout le monde s’est retrouvé juste devant les grilles, pendant qu’une rangée de policiers empêchait l’entrée du magasin. Pas d’arrestation. Les caddies n’ont pas pu sortir, mais on peut se rassurer, car les clients ne pouvaient plus entrer. Une matinée de perdue pour un supermarché, c’est autant de répit pour le porte-monnaie de ses clients. La dispersion n’a pas tardé, car il était temps d’aller bloquer l’ANPE : la précarité, ça ne s’arrête jamais…
Si l’on doit retenir une chose, c’est bien le mensonge des publicités. Celle de Match nous promettait que le directeur était ligoté, on s’est aperçu qu’il était assez libre pour appeler la police. On en sortira moins naïfs, mais pas moins précaires.
Depuis des mois, c’est un mode d’action qui n’a cessé d’être utilisé contre les magasins de la grande distribution partout en France, à Paris, Rennes, Toulouse ou Grenoble. Le but étant de se réapproprier les produits de première nécessité, afin de les redistribuer à ceux qui en ont le plus besoin : précaires, SDF, chômeurEs, Rroms et sans-papiers. Ces «autoréductions» sont accomplies en tout lieu où il s’avère nécessaire de redistribuer les richesses, c’est-à-dire partout : la précarité n’est plus un phénomène de marge, elle est un phénomène de masse. Méthode peu appréciée des patrons, ceux de la grande distribution contre-attaquent. Au Monoprix du Faubourg-Saint-Antoine à Paris, on accuse les «redistributeurs» d’avoir été autocratiques. À Lyon, certains ont été condamnés pour vol organisé. Mais les accusations ne doivent pas cacher la réalité : les voleurs ne sont pas chez les précaires, ils sont chez ceux qui fixent les prix…
À Lille ce jeudi, il fallait tout d’abord attendre qu’à l’intérieur, des camarades remplissent leurs caddies de victuailles et produits de première nécessité, avant que l’invasion ne puisse se mettre en route. Lorsque la dizaine de chariots fut garnie, c’est-à-dire vers 11 heures, la trentaine de personnes en attente a pénétré dans le supermarché, déployé banderoles en faveur des précaires et contre le système capitaliste, tout en scandant «Contre la loi du fric et des patrons, grève, grève, réquisition !» Dans un même temps, une négociation de longue haleine a été entamée avec le propriétaire du magasin, afin qu’il laisse partir la dizaine de caddies gratuitement. Un geste pour le pouvoir d’achat, était-ce trop demander ? Les affiches du magasin annonçaient pourtant «Douze jours gratuits». Avait-on mal compris le message ? Non, on n’avait simplement pas lu la petite étoile qui, comme sur chaque mensonge publicitaire, renvoie en bas d’affiche aux conditions d’application dudit mensonge et qui ici prétendait à la seule «gratuité» de certains produits sélectionnés par l’Enseigne. C’est donc pour ça que le directeur n’a rien lâché. Alors que toutes les caisses étaient désormais bloquées, le directeur a choisit l’option d’inviter la police nationale.
Après une ultime négociation, les flics sont entrés de force dans le magasin, poussant sur les militants anti-précarité, avant d’en aligner une partie contre le mur et de filmer les visages les uns après les autres. L’autre partie, d’abord repoussée dans les rayons, a pris l’initiative de s’enfuir par les entrepôts. Mais au final, tout le monde s’est retrouvé juste devant les grilles, pendant qu’une rangée de policiers empêchait l’entrée du magasin. Pas d’arrestation. Les caddies n’ont pas pu sortir, mais on peut se rassurer, car les clients ne pouvaient plus entrer. Une matinée de perdue pour un supermarché, c’est autant de répit pour le porte-monnaie de ses clients. La dispersion n’a pas tardé, car il était temps d’aller bloquer l’ANPE : la précarité, ça ne s’arrête jamais…
Si l’on doit retenir une chose, c’est bien le mensonge des publicités. Celle de Match nous promettait que le directeur était ligoté, on s’est aperçu qu’il était assez libre pour appeler la police. On en sortira moins naïfs, mais pas moins précaires.
11 heures. On déploie les banderoles.
Jour de grève générale. L’occasion de revendiquer autrement
la redistribution des richesses.
Jour de grève générale. L’occasion de revendiquer autrement
la redistribution des richesses.
Les caddies sont remplis de produits de première nécessité.
Couches et lait pour bébé, nourriture de base, etc
«Profitez-en ! On a attaché notre directeur.»
Le collectif de précaires souhaite négocier avec le directeur, et non passer en force. Mais la direction du magasin ne lâchera rien : «On n’aime pas la méthode». Et va même jusqu’à mentir : «On donne au Resto du cœur» — ce qui n’est pas vrai, nous disent discrètement les employés du magasin…
Les caisses sont bloquées deux heures au total.
Le magasin perd plusieurs heures de chiffres d’affaire, mais préfère ne rien céder. Pourtant, laisser les dix caddies passer et continuer à faire tourner le magasin aurait été à l’avantage du magasin en termes financiers.
On bloque l’entrée du magasin avec des caddies.
La direction a appelé la police. Le collectif de précaires souhaite résister.
Les forces de l’ordre entrent en force…
… et réquisitionnent consciencieusement les caddies réquisitionnés.
13 heures. Les forces de l’ordre bloquent l’entrée du magasin.
Match ferme ses portes. Au total, le supermarché aura perdu trois heures.
Eunous (texte), Julie Rebouillat (photos)
Contre-Faits, Collectif de photographes, reporters,
activistes & auteurs, 30 janvier 2009.