Des caisses de résonance
Un peu partout en France, des caisses de solidarité se montent pour agir contre la police et sa justice d’abattage, et la démarche n’est pas purement défensive.
Effet de «la crise» ou signe d’une montée des tensions, il semble que la répression se démocratise : les facs en mouvement sont assiégées et attaquées par les CRS comme peuvent l’être les banlieues, de sages citoyens finissent à poil en gardav’ pour une simple infraction au code de la route ou un échange un peu vif avec les forces de l’ordre. Et dans l’expérience de la répression, on se retrouve, un commun se dessine. Le mouvement lycéen par exemple est un moment de rencontre où les différences cessent de peser et s’agencent dans un faire ensemble. Et à ce moment précis la caisse de solidarité est l’objet autour duquel on se retrouve après des manifs énergiques (celles de décembre notamment), pour s’échanger dans l’urgence les noms de personnes en garde à vue, assurer un suivi collectif, et préparer la prochaine manif. Construire un outil qui dure, à commencer par un compte bancaire et un abonnement de portable, pour sortir du cas par cas, est une nécessité.
Mais en dehors de ces accélérations collectives, il y a aussi et surtout les affaires banales du genre «simple contrôle d’identité» qui finit mal (outrages, violences, grosses amendes, mois de sursis ou de prison ferme). L’enjeu vital dans cette situation n’est pas de dénoncer à longueur de colonnes les «abus» de la police. L’urgence est de se tenir les uns les autres. Concrètement cela signifie aller aux comparutions immédiates, rencontrer les proches des personnes qui ramassent. Trouver une façon de faire ensemble, en se refilant des contacts d’avocats pas trop pourris, en s’arrangeant collectivement pour les tunes, en faisant tourner les numéros d’écrou des amis incarcérés pour leur envoyer des lettres et de quoi cantiner. Non pas «faire dans le social» ou donner dans la charité, mais tisser des liens à partir de rencontres réelles. Et ces rencontres fortes se prolongent et s’intensifient, autour d’un repas collectif pour fêter la libération de l’un d’entre nous, lors des concerts de soutien permettant d’alimenter la caisse en argent frais. C’est aussi se revoir pour faire d’autres choses, s’échanger des plans boulots, poser collectivement la question du logement, etc.
Les caisses de solidarité, les rencontres qu’elles nécessitent et permettent, sont un des moteurs de notre auto-organisation. Si tous les incarcérés de la guerre sociale, des émeutiers aux accusés de l’antiterrorisme, reçoivent lettres et mandats, et ressentent qu’il y a du monde autour, à les attendre, la répression en devient moins insupportable (ce qui nous rend des possibilités d’agir). En même temps, on tisse les liens forts qui rendront la révolte indivisible, imprenable. En clair, les caisses ne répondent pas uniquement à l’urgence d’aider les personnes capturées, c’est aussi l’occasion de se capter, de commencer.
Rebetiko no 0, janvier 2009
Chants de la plèbe.
Lancement de la caisse de solidarité dijonaise (23/10/08)
Collectif pour l’organisation de la solidarité dans l’agglomération caennaise (12/12/08)
Les Bonnets rouges, collectif de lutte rennais contre la répression politique et sociale (12/12/08)
Kalimero (Paris, 26/02/08)
Appel à participer à une caisse de solidarité contre la répression (Lyon, 19/05/07)