Libérez le Cox18, L'orda d'oro n'est pas expulsable
L’expulsion d’un centre social, ici le Cox 18 à Milan, constitue une attaque contre tous ceux qui, non contents de refuser la société de concurrence, s’obstinent à fabriquer et expérimenter d’autres relations sociales, cherchant les voies d’une affirmation.
En négociations — interminables ? — avec la Ville de Paris afin d’éviter que se réalise une menace d’expulsion du local quai de Charente, la Coordination des intermittents et précaires (idf), déclare son soutien au Cox 18.
À travers la saisie du fonds d’archives accessibles au Cox 18, c’est aussi la possibilité même d’une mémoire des mouvements sociaux et politiques qui est attaquée. Pendant qu’ici comme ailleurs le ministère de la culture finance massivement la rénovation du patrimoine, cathédrales et musées partout, on pulvérise l’histoire des vaincus, l’histoire d’en bas.
L’État, seul dépositaire de la mémoire et de ses matériaux, voilà ce qui hypothéquerait davantage une difficile et fragile continuité des luttes. Escamoter des pans entiers d’une pensée insubordonnée ne vise à rien d’autres qu’à en empêcher les reprises.
Libérez le Cox18, L’orda d’oro n’est pas expulsable
Jeudi 22 janvier 2009, à la demande de la mairie de Milan, la police a pris position dans le centre social Cox 18, via Conchetta à Milan. Outre des concerts, des expositions, des rencontres, ce centre social ouvert en 1976 accueille une librairie et l’important fonds Primo Moroni, du nom du libraire-écrivain, acteur et narrateur des mouvements des années 60 et 70 qui lui a confié ses archives il y a dix ans.
Depuis, le centre social Cox 18 et ce fonds irremplaçable, véritable bibliothèque du mouvement, traces vivantes du «long mai italien», est entre les mains de la police qui en interdit désormais l’accès. On se demande du reste quel usage celle-ci pourrait bien faire de ce patrimoine collectif et public, jusqu’ici accessible à tous, à tous ceux qui, pour être venus chercher ou emprunter un livre, écouter un concert, faire une recherche, participer à une assemblée, ou simplement bavarder au bar ou dans la cour ouverte du Conchetta, ont passé la porte du centre et de sa librairie.
Lecteurs et traducteurs de L’orda d’oro — le livre que Primo Moroni et Nanni Balestrini ont écrit en grande partie à partir de cette riche bibliothèque des années 70 — rétifs à la privatisation, à l’individualisation et à la concurrence, nous exprimons notre solidarité au collectif du Cox 18 et au centre d’archive Primo Moroni, contre cette main-mise arbitraire et brutale, sur un lieu qui est aussi un outil collectif, une de ces rares lumières encore présentes dans une ville de Milan, officiellement toujours plus hostile à toute forme de lieux échappant à la normalisation, toujours promise davantage aux projets immobiliers désastreux, auxquels la municipalité propriétaire apporte ici son concours actif.
Nous ne pouvons voir, dans la mise en danger d’un outil de connaissance, de circulation des idées, de recherches et de mémoire aussi utile et rare que le centre d’archives Primo Moroni qu’une des modalités les plus sauvages de la bêtise.
Pour la liberté des lieux collectifs dans les villes, pour la libération du Conchetta, des livres de la librairie et du centre de ressources qu’il abrite, que le Cox 18 revienne à ses usagers et soit libéré au plus tôt.
Arrêt des expulsions des espaces collectifs en France comme en Italie.
Les lecteurs-traducteurs de L’orda d’oro réunis à Paris et Saint-Denis en 2009 - la librairie «Folie d’encre» de Saint-Denis - l’association «Les fous d’encre» à Saint-Denis - la Coordination des intermittents et précaires d’Île-de-France