Quand les gouvernements d'Europe font dans leur froc...
Avec la crise, la contestation gagne en Europe
La peur d’une insurrection populaire nourrie par la crise commence à s’insinuer dans les esprits des dirigeants européens. Pour l’heure, elle est irrationnelle.
La contestation ne touche actuellement que les marges de l’Union. Dans les pays Baltes, en Islande et en Bulgarie, les mouvements sociaux et la colère de foules toutefois se multiplient. Les raisons de la révolte sont d’abord nationales. Mais aucune solution n’étant vraiment discernable, ce mouvement contestataire ne risque-t-il pas de gagner, à mesure que la crise s’approfondit, l’Europe tout entière ?
Chefs d’État et de gouvernement européens ont déjà connu une grande frayeur. Réunis le 12 décembre dernier à Bruxelles, ils ont perçu la détresse de leur homologue grec, Costas Caramanlis, débordé par la révolte d’une jeunesse mettant à feu et à sang les rues d’Athènes.
À Berlin et Paris, des groupuscules ont alors tenté d’importer le conflit. Des responsables politiques, tel le socialiste Laurent Fabius, ont aussitôt suggéré que «ce que l’on voit en Grèce n’est pas du tout malheureusement hors du champ de ce qui peut arriver en France. Quand vous avez une telle dépression économique, avait ajouté l’ancien premier ministre, une telle désespérance sociale, il suffit qu’il y ait une allumette qui se mette là-dedans et tout part, surtout qu’on a quand même un gouvernement qui vis-à-vis de la jeunesse ne montre pas de compréhension.» De retour du Conseil européen de Bruxelles, Nicolas Sarkozy avait prudemment repoussé la réforme de l’Éducation nationale, qui à l’époque attisait la colère lycéenne.
Après être retombée pendant la trêve des confiseurs, la fièvre connaît actuellement quelques nouvelles poussées. Mercredi, le premier ministre islandais, Geir Haarde, s’est retrouvé coincé dans sa limousine, bombardée de canettes et d’œufs (voir la vidéo). Comme la veille, la police antiémeute a utilisé les gaz lacrymogènes, défendant et arrêtant les plus énervés parmi les 2000 manifestants qui se massaient autour du Parlement. La colère populaire ne semble toutefois pas devoir de sitôt s’apaiser dans cette petite île, dont la prospérité reposait jadis sur les opérations financières d’un secteur bancaire désormais en faillite.
«Un printemps chaud»
Jusqu’à peu encore, les pays Baltes s’enorgueillissaient également de beaux taux de croissance. Plongeant désormais dans la récession, la Lettonie et la Lituanie viennent de connaître les plus importantes manifestations de rue depuis que ces deux pays ont secoué le joug soviétique en 1991.
À Riga, quelque 10.000 personnes se sont rassemblées vendredi dernier aux abords du Parlement letton. Là encore, la pression ne paraît pas devoir retomber. «Nous ne sommes qu’au début des protestations», prédit Nils Muiznieks, politologue de l’université de Lettonie. Parmi ses collègues, les médias commencent à dénicher celui qui promet un «printemps chaud», et celui, plus ambitieux ou désespéré, qui entrevoit déjà un «nouveau mai 1968». Pour clore une liste qu’aucun gouvernement ne souhaite voir s’étendre, la Bulgarie bouge elle aussi. À la faillite économique s’ajoute encore et toujours la corruption des élites.
Évidemment, plus le peuple souffrira, moins il supportera les rémunérations, avantages et passe-droits des gens d’«en haut». Alors que les prévisions de la Commission européenne sont particulièrement sombres, les gouvernants, qui multiplient les plans de relance et nationalisent le crédit, sont désormais en première ligne, à la manœuvre. C’est à eux que la rue demandera des comptes.
Le premier ministre grec a déjà remanié son gouvernement. Sous la pression populaire, on parle de plus en plus d’élections anticipées en Islande. La même exigence a été formulée en Lettonie et en Bulgarie.
Les feux ne s’éteignent pas, dans le sillage de la Grèce : l’Islande, la Lettonie, La Lituanie, la Bulgarie…
Islande, Reykjavik : Depuis le mois de décembre, en raison de la crise économique, et du chômage et des faillites qu’elle entraine (40% des ménages et 70% des entreprises seraient en difficulté), des centaines, puis des milliers de personnes se réunissent chaque semaine devant le Parlement. Mardi après-midi, 20 janvier, à Reykjavik, ils sont des milliers à s’y retrouver pour empêcher la tenue de la séance, appelant le gouvernement à démissioner. Les porcs gazent mais la foule restera jusqu’à tard dans la nuit.
Bulgarie, Sofia : 14 et 15 janvier, des milliers de manifestants (étudiants, écolos, agriculteurs…) se sont affrontés aux porcs après s’en être pris au Parlement à coups de caillasses, bouteilles, œufs, pétards, tiges de métal… Les raisons avancées par les médias terroristes : le capitalisme et sa crise qui exacerbe les ravages sociaux, et la corruption. La mort récente d’un étudiant dans une boîte de nuit serait également en cause. Les socialos ont soutenu le maire de Sofia dans sa répression contre les groupes d’anarchistes qui s’attaquaient au Parlement.
Lettonie, Riga : 14 janvier, à la suite d’une manif de 10.000 personnes dénonçant la mauvaise gestion de la crise par le gouvernement, des centaines de manifestants ont pris le Parlement d’assaut mais ont été repoussés par la flicaille, puis ont pillé des magasins du centre-ville.
Lituanie, Vilnius : Vendredi 16 janvier, 7000 personnes (d’après les porcs) se retrouvent devant le Parlement. Une partie d’entre elles s’approchent pour parler au président de la séance et se font gazer. Les pierres, les œufs et les boules de neige répondent. Le Parlement est amoché.
Après la Grèce, les pays Baltes, l’Islande et la Bulgarie connaissent des mouvements sociaux qui inquiètent l’Union européenne.
La peur d’une insurrection populaire nourrie par la crise commence à s’insinuer dans les esprits des dirigeants européens. Pour l’heure, elle est irrationnelle.
La contestation ne touche actuellement que les marges de l’Union. Dans les pays Baltes, en Islande et en Bulgarie, les mouvements sociaux et la colère de foules toutefois se multiplient. Les raisons de la révolte sont d’abord nationales. Mais aucune solution n’étant vraiment discernable, ce mouvement contestataire ne risque-t-il pas de gagner, à mesure que la crise s’approfondit, l’Europe tout entière ?
Chefs d’État et de gouvernement européens ont déjà connu une grande frayeur. Réunis le 12 décembre dernier à Bruxelles, ils ont perçu la détresse de leur homologue grec, Costas Caramanlis, débordé par la révolte d’une jeunesse mettant à feu et à sang les rues d’Athènes.
À Berlin et Paris, des groupuscules ont alors tenté d’importer le conflit. Des responsables politiques, tel le socialiste Laurent Fabius, ont aussitôt suggéré que «ce que l’on voit en Grèce n’est pas du tout malheureusement hors du champ de ce qui peut arriver en France. Quand vous avez une telle dépression économique, avait ajouté l’ancien premier ministre, une telle désespérance sociale, il suffit qu’il y ait une allumette qui se mette là-dedans et tout part, surtout qu’on a quand même un gouvernement qui vis-à-vis de la jeunesse ne montre pas de compréhension.» De retour du Conseil européen de Bruxelles, Nicolas Sarkozy avait prudemment repoussé la réforme de l’Éducation nationale, qui à l’époque attisait la colère lycéenne.
Après être retombée pendant la trêve des confiseurs, la fièvre connaît actuellement quelques nouvelles poussées. Mercredi, le premier ministre islandais, Geir Haarde, s’est retrouvé coincé dans sa limousine, bombardée de canettes et d’œufs (voir la vidéo). Comme la veille, la police antiémeute a utilisé les gaz lacrymogènes, défendant et arrêtant les plus énervés parmi les 2000 manifestants qui se massaient autour du Parlement. La colère populaire ne semble toutefois pas devoir de sitôt s’apaiser dans cette petite île, dont la prospérité reposait jadis sur les opérations financières d’un secteur bancaire désormais en faillite.
«Un printemps chaud»
Jusqu’à peu encore, les pays Baltes s’enorgueillissaient également de beaux taux de croissance. Plongeant désormais dans la récession, la Lettonie et la Lituanie viennent de connaître les plus importantes manifestations de rue depuis que ces deux pays ont secoué le joug soviétique en 1991.
À Riga, quelque 10.000 personnes se sont rassemblées vendredi dernier aux abords du Parlement letton. Là encore, la pression ne paraît pas devoir retomber. «Nous ne sommes qu’au début des protestations», prédit Nils Muiznieks, politologue de l’université de Lettonie. Parmi ses collègues, les médias commencent à dénicher celui qui promet un «printemps chaud», et celui, plus ambitieux ou désespéré, qui entrevoit déjà un «nouveau mai 1968». Pour clore une liste qu’aucun gouvernement ne souhaite voir s’étendre, la Bulgarie bouge elle aussi. À la faillite économique s’ajoute encore et toujours la corruption des élites.
Évidemment, plus le peuple souffrira, moins il supportera les rémunérations, avantages et passe-droits des gens d’«en haut». Alors que les prévisions de la Commission européenne sont particulièrement sombres, les gouvernants, qui multiplient les plans de relance et nationalisent le crédit, sont désormais en première ligne, à la manœuvre. C’est à eux que la rue demandera des comptes.
Le premier ministre grec a déjà remanié son gouvernement. Sous la pression populaire, on parle de plus en plus d’élections anticipées en Islande. La même exigence a été formulée en Lettonie et en Bulgarie.
Presse policière-bourgeoise : Thierry Portes
Le Figaro, 22 janvier 2009.
Les feux ne s’éteignent pas, dans le sillage de la Grèce : l’Islande, la Lettonie, La Lituanie, la Bulgarie…
Islande, Reykjavik : Depuis le mois de décembre, en raison de la crise économique, et du chômage et des faillites qu’elle entraine (40% des ménages et 70% des entreprises seraient en difficulté), des centaines, puis des milliers de personnes se réunissent chaque semaine devant le Parlement. Mardi après-midi, 20 janvier, à Reykjavik, ils sont des milliers à s’y retrouver pour empêcher la tenue de la séance, appelant le gouvernement à démissioner. Les porcs gazent mais la foule restera jusqu’à tard dans la nuit.
Bulgarie, Sofia : 14 et 15 janvier, des milliers de manifestants (étudiants, écolos, agriculteurs…) se sont affrontés aux porcs après s’en être pris au Parlement à coups de caillasses, bouteilles, œufs, pétards, tiges de métal… Les raisons avancées par les médias terroristes : le capitalisme et sa crise qui exacerbe les ravages sociaux, et la corruption. La mort récente d’un étudiant dans une boîte de nuit serait également en cause. Les socialos ont soutenu le maire de Sofia dans sa répression contre les groupes d’anarchistes qui s’attaquaient au Parlement.
Lettonie, Riga : 14 janvier, à la suite d’une manif de 10.000 personnes dénonçant la mauvaise gestion de la crise par le gouvernement, des centaines de manifestants ont pris le Parlement d’assaut mais ont été repoussés par la flicaille, puis ont pillé des magasins du centre-ville.
Lituanie, Vilnius : Vendredi 16 janvier, 7000 personnes (d’après les porcs) se retrouvent devant le Parlement. Une partie d’entre elles s’approchent pour parler au président de la séance et se font gazer. Les pierres, les œufs et les boules de neige répondent. Le Parlement est amoché.
Divergence, 22 janvier 2009.