Cette dictature qui vient...

Publié le par la Rédaction


Terreur d’État contre Yldune Lévy et Julien Coupat, épiciers alternatifs et militants de Tarnac toujours incarcérés à l’heure où ces lignes sont publiées. Terreur d’État permanente contre les sans-papiers. Terreur d’État contre celui qui ose encore rester debout devant l’injustice d’une expulsion. Terreur d’État devant le simple quidam pour une futilité désarmante. Elle est belle, la France de 2008. Celle de 2009 s’annonce encore plus laide. À moins que nous nous décidions à réagir.

Yldune Lévy et Julien Coupat restent incarcérés par la grâce de l’anti-terrorisme, qui nous montre sans fard son visage d’authentique terreur d’État qui vise à museler toute contestation sociale. Je ne peux m’empêcher de penser à cette phrase de Léon Werth lue dans Déposition : «fausse piste ou vraie piste, peu importe, l’important pour un régime fasciste est de terroriser». Ce livre raconte l’occupation vue par un homme, juif, réfugié et isolé à la campagne en zone dite «libre» afin d’échapper aux hordes nazies. Il évoquait là les arrestations dues aux dénonciations, la plupart du temps totalement fausses (réglements de comptes etc.).

Certes, il faut garder toute proportion, mais il y a comme une résonnance qui vous glace le sang.

Nul besoin de tester l’ADN de nos dirigeant.e.s pour voir que cette technique de gouvernement a été empruntée directement aux dictatures. On s’approche à grands pas de la détention arbitraire, administrative, «de sécurité», ordonnée par décret du ministère de l’Intérieur selon les désirs et caprices du Roi. Ça existe déjà un peu, avec cette loi de rétention de sûreté votée cette année. Sous prétexte, comme toujours, de lutter contre les pires criminels (les pédophiles) on garde les gens en rétention après leur peine s’il est estimé que, je vous le jure, il vont recommencer. Et comme toujours, cf. les fichiers ADN, toute loi anti-pédophiles sort de ce cadre et infeste rapidement le reste selon les besoins des autorités.

Aurions-nous là le prochain pas ? Le projet doit bien traîner dans un tiroir, au chaud, attendant l’heure propice. Le terrorisme, réel ou inventé, est la raison classique. L’actualité à venir fournira peut-être le prétexte, par exemple un vrai attentat terroriste bien sanglant. Au moins on arrêterait de faire semblant de faire joujou à la «Justice».

Quoiqu’ici, même pas besoin d’actualité sanglante, tout est fabriqué de toutes pièces ! Il fallait donner une leçon : «Il n’y a pas d’alternative» dixit Margaret Thatcher, égérie, avec George W. Bush, de notre bon Roi.

Résonances, résonances, jour après jour, la sale guerre est menée sans ménagements aux sans-papiers au nom d’une l’Identité nationale érigée en ministère, symbole des pans entiers du programme du FN annexés par l’UMP.

Bien entendu Lévy et Coupat ne finiront pas fusillés et les sans-papiers ne sont pas envoyés dans des camps de la mort, mais, il y a comme les échos d’un pire qui nous pourrissent l’époque. Terribles anachronismes.

Jean-Charles Marchiani, ex-préfet du Var, incarcéré pour corruption et grand serviteur de l’État et des réseaux Pasqua, gracié par sa Majesté le Roi de France, fils politique de Pasqua, ça choque ? Même pas, ça fait juste dégueuler.

La police en guerre ouverte contre toute personne ne fermant pas les yeux devant ses agissements et n’ayant pas compris que, si un policier se comporte de manière choquante, tu te dois de te taire et de regarder ailleurs, et s’il t’adresse la parole, il faut le répéter : tu baisses la tête, tu regardes par terre, et tu dis «oui monsieur, bien monsieur, tout de suite monsieur, je ne le ferais plus», et tu glisses un discret «je vous aime».

La terreur d’État, partout, et mille fois par jour… Ci-dessous quelques exemples non exhaustifs dans un communiqué de la LDH.

Philosophes, sans-papiers et police aux frontières
Après les «dangereux terroristes de Corrèze» devenus «personnes mises en cause mais présumées innocentes dans une affaire d’actes de malveillance vis-à-vis de la SNCF»…
Après les «collégiens présumés dealers» de Marciac sur lesquels des gendarmes avaient lâché un chien policier au milieu de leur classe…
Après le journaliste de Libération, accusé de diffamation par un marchand d’accès Internet, dont des policiers fouillent l’anus, l’ayant arrêté devant ses enfants à 6h30 du matin, pour vérifier disent-ils s’il n’y aurait pas caché de quoi se suicider…
Voici maintenant trois philosophes arrêtés et placés dix heures en garde à vue à leur retour de Bamako, parce qu’ils se sont, lors de leur vol aller, déclarés solidaires d’un de leurs collègues qui protestait contre une scène pourtant bien banale : un Africain menotté, encadré par cinq policiers, dangereux sans-papiers expulsé qui côtoyait des passagers libres sur un vol commercial d’Air France.
Le premier protestataire, directeur de programme au Collège international de philosophie, a été arraché de force de son siège, menotté lui aussi avec brutalité devant les autres passagers puis placé en garde à vue. Il risque cinq ans de prison et 18.000 euros d’amende pour délit de solidarité avec cet homme africain «reconduit» là où, dit-on en haut lieu, on est incapable de «s’élever vers le progrès». Sauf bien sûr, en cas de condamnation, à ce qu’il bénéficie d’une grâce présidentielle comme Jean-Charles Marchiani — lequel, il est vrai, n’est pas précisément philosophe et avait sans doute commis des infractions beaucoup moins graves que nos «délinquants de la solidarité».
Le thème du congrès de Kinshasa auxquels se rendaient les philosophes était «la culture du dialogue, les frontières et l’accueil des étrangers». La Ligue des droits de l’Homme tient à saluer la contribution que les gouvernants actuels de la République viennent ainsi d’apporter aux travaux des congressistes : elle est à la hauteur de la considération qu’appellent leurs discours satisfaits sur «la France pays des droits de l’Homme».
LDH, 23 décembre 2008.

Groupe Nada - Toulon, 24 décembre 2008.
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