La Chauve-Souris ouvre ses ailes à Liège
Compte-rendu d’un médiactiviste sur les lieux la nuit du vendredi au samedi
Depuis ce matin, ça s’affaire à nettoyer le lieu et y amener du matériel pour l’ouverture de demain. L’idée est d’officialiser l’occupation de cette ancien centre d’aide pour handicapés par quelques personnes depuis maintenant deux semaines. C’est l’occasion de briser la glace quoi, de faire connaissance avec le voisinage, leur expliquer pourquoi ils squattent et qu’est-ce qu’ils désirent faire de ce bâtiment inoccupé depuis probablement deux ans. Situé dans une cité petite-bourgeoise, le va-et-vient dans le bâtiment interloque les voisins mais sans plus. Quoique.
En soirée, aux alentours de 23 heures, deux individus arrivent en voiture et revendiquent leur droit à la propriété. Et pour la défendre un d’eux sort du coffre de sa Bmw une batte de base ball (qu’il rangera vite en apercevant une caméra d’une fenêtre braquée sur lui). Arrivent plus ou moins rapidement deux combis de flics, débarquant en croyant probablement avoir à régler un cambriolage. La négociation se passe du premier étage d’un ton calme et rassurant. Les flics eux sont très agressifs et essayent d’ouvrir les portes en tournant autour de la propriété. Une femme se faisant passer pour la propriétaire arrive également en grosse berline et commence à insulter les squatteurs. «J’ai travaillé 25 ans avec des délinquants. J’en ai marre de gens comme vous ! Je préfère passer un buldozer sur le bâtiment.» Quand on leur répond que le bâtiment appartient à une Asbl, elle répond : «Je suis la propriétaire du bâtiment, j’ai tous les droits, c’est le monde à l’envers», etc. Les flics somment d’ouvrir la porte où ils la défonceront. On leur répond qu’ils n’ont pas le droit d’entrer comme ça, qu’une lettre a été envoyé à l’Asbl à qui appartient le lieu, qu’ils veulent négocier, etc. trois autres combis arrivent.
00h35. Arrive le commissaire qui calme les jeunes collègues excités et leur explique la loi sur le logement. On ne va pas défoncer la porte, on va négocier. Un petit groupe de soutien dehors fait un travail de lobbying et de négociation. Les forces de l’ordre se résignent à réveiller un magistrat pour avoir un avis d’expulsion en urgence. Demande qui sera reportée à lundi prochain.
01h43. Le gros des troupes vient de se barrer, le commissaire avec sa petite division tente une dernière percée en négociant une visite à l’intérieur, «juste pour voir que tout se passe bien et faire son rapport». Demande qui lui est poliment refusé. «Mais si vous vous êtes domiciliés ici, vous devrez tout de même laisser rentrer un officier de police dans le bâtiment.» — «Un policier en journée, pas de problème, mais pas vingt policiers à deux heures du matin avec un proprio armé d’une batte en plus…»
2h00. Propriétaires et forces de l’ordre s’en vont vaquer à leurs occupations. La Chauve-Souris maintient son ouverture publique demain après-midi et fera un communiqué sur les événements de cette soirée.
La Chauve-Souris, une grande bâtisse blanche d’un étage
au pied d’une tour, rue Chauve-Souris à Liège
(haut du Laveu, carrefour saintGilles).
Centre de médias alternatifs de Bruxelles, 4 octobre 2008.
Communiqué de presse des chauves-souris
Deuxième jour d’occupation
Alors que le gouvernement se permet d’utiliser onze milliards d’euros d’argent public pour sauver les banques, la précarisation de la majorité de la population continue. À l’heure de la flexiblité débridée et de la compétitivité exacerbée, les CDD sont sans lendemain, le chômage est l’horizon et le mot «logement» appelle celui de «crise». À Liège, les immeubles habitables et inoccupés côtoient les logements insalubres et les loyers prohibitifs, sans que cela ne suscite de réaction politique forte. C’est une situation d’urgence où un nombre croissant de personnes sont sans logement tandis que d’autres, avec ou sans emploi, ne peuvent plus assumer leur loyer.
De plus, il y a deux ans, le dernier squat / centre social liégeois a fermé. Depuis cette fermeture, plusieurs collectifs d’activistes souffrent de nomadisme. S’il existe encore quelques cafés et lieux alternatifs à Liège, il n’existe pas de centre autonome qui rassemble des projets dans une optique explicitement politique, en essayant de critiquer le système capitaliste et de construire des alternatives.
C’est pourquoi un certain nombre de personnes ont décidé d’agir et de se réapproprier le bâtiment, vide et inoccupé depuis 2005, situé 62 rue Chauve-Souris.
«Nous ouvrons aujourd’hui un centre social autogéré pour vivre dans un lieu un peu plus libre, où la coopération remplace la compétition. Nous voulons vivre ici et nous souhaitons développer différents projets, par exemple une bibliothèque commune, un cinéclub, un atelier vélo ou un centre de médias alternatifs. Notre objectif est de rénover et habiter cet espace abandonné, de transformer ce lieu mort en un lieu vivant et ouvert.»
Le projet des chauves-souris vise à articuler logement collectif et diverses activités, elles espèrent ainsi pouvoir participer à la vie du quartier du Laveu.
Un premier contact a été établi avec les propriétaires, les chauves-souris sont disposées à négocier un compromis sur l’utilisation raisonnée et raisonnable du bâtiment.
Liste francophone de diffusion
d’infos relatives aux squats, 4 octobre 2008.
Centre social occupé «La Chauve-Souris»
rue Chauve-Souris 62 4000 Liège (laveu)
Numéro de téléphone : 04 84 85 82 40.
Venez nous rejoindre ce samedi 4 octobre à partir de midi. Restauration végétarienne et café zapatiste la journée. Discussion contre le fermé de Vottem. Le soir, souper et ouverture du bar.