Désarmons la police !
Alors que partout en France gronde la colère (fonctionnaires, marins-pêcheurs, routiers, paysans, lycéens…), comme à son habitude, le pouvoir recourt à la police pour régler les problèmes sociaux et criminaliser les contestataires. Les lycéen.ne.s qui ont entamé, depuis plus de deux mois, un véritable bras de fer avec le gouvernement ont fait les frais de cette politique répressive. À Grenoble, au moindre pas hors des sentiers battus de la traditionnelle promenade derrière une banderole, la police n’hésite pas à transformer le centre ville en véritable champ de bataille.
Ce mois de mai a été particulièrement répressif : arrosage de gaz lacrymogène, concerts de flash ball, arrestations ciblées et «musclées». Des personnes, souvent mineures, ont été touchées par des tirs de flash ball (y compris dans les parties vitales), d’autres ont été frappées et menacées par les flics de la BAC (avec leurs armes de service), et une lycéenne a été sérieusement blessée à la jambe par un éclat de «grenade de désencerclement». Comme dans les quartiers populaires, les flics ont donc pris l’habitude d’utiliser, dans les manifs, tout leur arsenal d’armes dites à «létalité réduite»… L’expression ne fera sourire que celles et ceux qui n’ont pas été victimes de ces gadgets barbares.
À Grenoble, on recense déjà trois blessées graves en moins de deux ans par des tirs de grenade de désencerclement (grenade à fort effet de souffle qui projette des bouts de caoutchouc). Trois jeunes filles ont ainsi été mutilées à vie par ces grenades dont deux au visage, sans que quiconque ne s’en alarme (un rappel des faits, mai 2007).
Et il n’est pas besoin de le rappeler, les «forces de l’ordre» sont les premières à transgresser les lois : conçues pour un usage strictement défensif, ces grenades ont été systématiquement utilisées de manière offensive en manif… et cela depuis le CPE. Tout comme le Taser, ces grenades ont déjà démontré toute leur dangerosité.
Il est donc aussi urgent de dénoncer le surarmement policier et d’interdire les armes «soft» que de condamner les bavures mortelles de plus en plus fréquentes (Draguignan, Grasse, Paris).
La violence c’est la police ! Désarmons-la !
Indymédia Grenoble, 7 juin 2008.
Désarmons les porcs !
C’est le mois de mai en France. Pendant qu’on enterre définitivement sous une dalle de commémoration de supermarché la grande révolte de 68, c’est la fête de la répression. À Grasse, Abdelakim meurt à la suite d’une interpellation musclée [Le soir du 9 mai 2008, Abdelakim Ajiimi, 22 ans, décède lors de son transfert au commissariat de Grasse. L’autopsie a révélé «de possibles signes asphyxiques» dus à la prise d’étranglement pratiquée par les policiers lors de son arrestation.]. À Draguignan, un gendarme vide son chargeur sur un homme menotté [Vendredi 23 mai 2008, à Draguignan, un gitan de 27 ans en garde à vue, menotté, tente de s’enfuir et reçoit 3 balles dans le dos]. À Paris, après un repas trop arrosé, deux flics qui ne sont pas en service tirent sur des jeunes, en blessant un grièvement [Dans la nuit du 28 au 29 mai 2008, à Paris, lors d’une altercation avec des jeunes à la sortie d’un bar, les deux flics de la police ferroviaire bien éméchés ont utilisé leurs armes de service]. On braque les projecteurs sur ces «bavures» rapprochées et on s’interroge timidement sur la violence policière. On pointe du doigt certaines techniques d’interpellation pour lesquelles la police française a été condamnée par la Cour européenne des Droits de l’Homme. On glose sur le règlement militaire qui autorise un gendarme à faire feu sur un individu en fuite. On trouve des justifications au port d’arme permanent pour des connards alcoolisés qui sont «policiers 24 heures sur 24», comme le rappelle le responsable du syndicat de flics Alliance.
Et pendant que l’appareil judiciaire examine les raisons qui serviront à blanchir au mieux les chiens fous de l’appareil militaro-policier, se planquent dans les casernes et les commissariats les brutes qui commettront les futures bavures. Mais est-il encore approprié de parler de «bavure» ? Comme si l’on avait chaque fois affaire à un raté fâcheux, une malheureuse exception à la règle. À la fréquence à laquelle s’enchaînent les bavures, on est en droit de se demander si le crime n’est pas, pour le bras armé de l’État, la norme. On présente la bavure comme un fait exceptionnel, or c’est plutôt le fait-divers qui fait diversion. Dans l’ombre de la bavure se cache la réalité du quotidien des violences policières.
Des armes à «létalité réduite»
La violence policière ce n’est pas seulement les balles qui tuent, c’est le quotidien des contrôles au faciès et des humiliations, c’est l’abomination des rafles de sans-papiers, c’est les coups qui s’abattent dans les véhicules de police et les commissariats, c’est le mépris du peuple et le fichage des insoumis. La violence policière c’est également toutes ces armes dites à «létalité réduite». Tout comme le ridicule du jargon policier, ces armes ne tuent pas… complètement. Tonfas, flash ball et nouveau «lanceur 40», lance-grenades (Cougard), grenades de désencerclement, pistolet à impulsion électrique (Taser), nouvelles balles en caoutchouc dur («gomme-cogne»), fusils à pompe, etc., font partie d’un véritable arsenal d’armes dont l’usage se banalise dangereusement. La dangerosité, justement, il n’en est question que pour la minimiser. On oublie qu’une arme comme le flash ball peut tuer à bout portant. On vante les vertus du Taser dont Alliot-Marie veut équiper les 17.000 flics municipaux [La ministre de l’Intérieur vient de signer un décret qui autorise les 17.000 policiers municipaux de France à utiliser le Taser X-26 dès l’été 2008], en omettant de préciser que l'ONU a jugé que le Taser était une «arme de torture» et que plus de 200 personnes sont mortes aux États-Unis après s’être faites «taserisées»… 50.000 volts, ça tétanise et parfois ça tue !
Des grenades qui mutilent : une spécialité grenobloise ?
Depuis qu’ils sont dans la rue, les lycéens de Grenoble sont confrontés de près à la répression et peuvent observer le vrai visage de la police. Arrosage systématique de gaz lacrymogène, pluie de flash ball (dans les parties vitales), coups, menaces et extorsions d’aveu de la part des flics de la BAC, humiliations en garde-à-vue. Comme les quartiers populaires, les manifestations de rue sont désormais le théâtre privilégié de l’emploi des gadgets barbares de la flicaille. Alors qu’à Grenoble, en moins de deux ans, on dénombre déjà trois blessées graves (dont deux au visage) à cause d’éclats de grenade de désencerclement (grenades à fort effet de souffle qui propulsent violemment des morceaux de caoutchouc), des flics osent dire que ces armes ne sont pas dangereuses. Interrogé par France Bleu Isère après qu’une jeune femme ait perdu un œil et le sens de l’odorat un soir de manifestation anti-Sarkozy (16 mai 2007), un policier affirme que ces grenades ne sont pas «faites pour blesser» [France Bleu Isère, 25 mai 2007, journal de 8 heures (Anne Chovet)]. Tout comme un an auparavant (1er juin 2006), la grenade balancée à l’aveugle dans la foule et qui a transpercé, en éclatant, la joue d’une camarade lors d’une manifestation contre Minatec, n’était pas «faite pour blesser» [Le 1er juin 2006, lors de la manifestation contre l’inauguration de Minatec, la police réprime sauvagement les manifestants. Lors d’une charge, place Saint-Bruno, une grenade de désencerclement est tirée en l’air en direction des manifestants. Clémentine reçoit un éclat en plein visage qui lui transperce la joue.]…
Ces dénégations sont insultantes. Les victimes apprécieront. Un poil moins malhonnête, Jean-Claude Borel-Garin, le patron de la police en Isère et ancien numéro 2 du RAID, déclare, dans une interview révérencieuse accordée par le Daubé, torchon local, que les grenades de désencerclement sont «étudiées pour ne pas tuer» mais que «les tirs de flash ball, de grenade de lacrymogène ou de désencerclement peuvent évidemment occasionner des blessures» [Le Daubé, 20 mai 2008]. Devenu un expert en communication policière, Borel-Garin, précise que ces armes sont utilisées pour «éviter d’en arriver à l’affrontement physique et à l’utilisation du bâton de défense (tonfas) qui peut blesser beaucoup plus sérieusement». Des blessures plus graves que celles subies par les trois jeunes femmes… on se demande à quel niveau de boucherie Borel-Garin fait référence. Et les journalistes du Daubé, copains comme cochon avec les porcs, ne daignent pas dire un seul mot sur la blessure d’une lycéenne, sérieusement touchée à la jambe, le 15 mai dernier, encore une fois par un tir de grenade. Rien non plus sur l’emploi offensif de cette grenade sensée être à usage strictement défensif. Ni les négligences professionnelles des journalistes, ni l’arrogance de la police ne resteront sans effet. Nous leur ferons bouffer les caoutchoucs qui ont entraîné tant de mutilations !
On n’a pas besoin d’armes, ni de police !
On ne s’étonne plus que la réponse apportée à la contestation de l’ordre établi et aux problèmes sociaux soit avant tout policière. Après chaque émeute comme après chaque crise sociale majeure, les rapports tombent. La sécurité publique et les CRS déplorent le manque de moyens, la prétendue inefficacité de leur armement et réclament toujours plus d’armes, toujours plus de moyens de contrôle. Systématiquement, l’État tient compte de leurs doléances et accepte d’armer un peu plus les porcs qui défendent la société contre les pauvres et les idéalistes qui n’aspirent qu’à la changer… à la racine. Létales ou non, toutes les armes de la police sont barbares. Et les armes à «létalité réduite» le sont peut-être davantage que leurs grandes sœurs, armes létales, qui ont le mérite de dire leur nom. Utilisée en soutien aux dispositifs de contrôle social (fichage ADN de la population, vidéosurveillance, hélico et drônes, etc.) pour maintenir un climat de terreur permanent dans nos rues et nos quartiers, ces armes servent à mater les précaires, les insoumis et les militants. Elles meurtrissent les corps et visent à couper le vent de la révolte et à briser nos rêves fous de changer le monde.
Indymédia Grenoble, 31 mai 2008.