Additif au livre de Viénet
Enragés et situationnistes dans le mouvement des occupations
I. Le retour de la révolution sociale
II. Les origines de l’agitation en France
III. La lutte dans la rue
IV. L’occupation de la Sorbonne (suite)
V. La grève générale sauvage
VI. Profondeur et limites de la crise révolutionnaire (suite)
VII. Le point culminant
VIII. Le «Conseil pour le maintien des occupations» et les tendances conseillistes
IX. Le rétablissement de l’État
X. La perspective de la révolution mondiale après le mouvement des occupations
Il nous semble que, aux pages 72 et 73, Enragés et situationnistes dans le mouvement des occupations contient une erreur de fait : il y est dit que les locaux de l’«annexe Censier» de la Faculté des Lettres furent octroyés par Pompidou, à son retour d’Afghanistan, pour que les universitaires y discutent de leurs problèmes. Bien que ceci soit finalement exact, certains documents et témoignages inclinent à conclure que l’annexe Censier avait été employée pour une réunion, sinon réellement occupée, le samedi 11 mai, vers la fin de l’après-midi ; donc plusieurs heures avant l’arrivée de Pompidou, et l’exposé de ses conceptions qui comportait ce point. Il n’en reste pas moins vrai que «pendant plusieurs jours l’atmosphère, studieuse et modérée» de ce centre porta la marque des gens qui avaient pris cette initiative si vite légalisée ; et de leurs buts réformistes pour le milieu étudiant.
En revanche, la seule inexactitude qu’un ouvrage consacré au mouvement de mai a, jusqu’ici, prétendu relever dans nos publications du moment, nous est imputée à tort. Dans le livre de Schnapp et Vidal-Naquet, Journal de la Commune étudiante, une note de la page 547, à propos d’un tract du C.M.D.O. sur Flins où il est dit qu’à la gare Saint-Lazare «les dirigeants syndicaux (…) détournèrent les manifestants vers Renault-Billancourt, en leur promettant que des camions les conduiraient de là vers Flins», commente : «Inexact : les dirigeants des syndicats de cheminots de saint-Lazare se contentèrent de refuser de fournir aux étudiants un train spécial pour Flins…» Mais le tract du C.M.D.O. ne parlait pas de dirigeants de la C.G.T. (qui, hors des meetings, dirent à certains que le courant était coupé sur les voies par la police et, à d’autres, que le sabotage des gauchgistes provocateurs empêchait de faire partir un train). Les «dirigeants syndicaux» qui ont dispersé les manifestants à Saint-Lazare par d’extravagants mensonges étaient ceux de l’U.N.E.F. et du S.N.E. Sup. Le gauchisme vulgaire, dont Schnapp et Vidal-Naquet partagent le vocabulaire illusoire, appelait en mai «dirigeants syndicaux» ceux qui combattaient ouvertement le mouvement, comme la C.G.T. Mais les Geismar et Sauvageot, qui entravaient ce mouvement de l’intérieur, étaient bel et bien des dirigeants syndicaux, aussi comiques que soient les syndicats au nom desquels ils tenaient le crachoir.
Dans le livre de Viénet, on doit signaler aussi une sous-estimation de l’action des révolutionnaires de Lyon, à propos de leurs tentatives, à demi-réussies déjà, mais à ce moment cachées par toute l’information en place, pour lancer des grèves dans l’industrie dès avant le 14 mai ; et aussi à propos de leur participation exemplaire aux luttes qui se déroulèrent ensuite à Lyon (nous avions, au moment où ce livre fut écrit, momentanément perdu tout contact avec ces camarades).
Enfin, dans les pages 19 à 21, à propos de l’agitation antérieure chez les étudiants de plusieurs pays, il aurait fallu citer le Congo, avec le remarquable cas de l’occupation de l’Université Lovanium à Kinshasa (ex-Léopoldville) en 1967, avant Turin et tout ce qui allait suivre en Europe. Là, les étudiants révolutionnaires furent cernés par l’armée dans le campus qu’ils tenaient. Ils ne purent descendre sur la ville où les travailleurs attendaient leur arrivée pour se soulever. Le régime de Mobutu prononça le lock-out de l’Université, en exigeant une réinscription personnelle de chaque étudiant, qui devait s’engager à obéir à l’avenir aux usages universitaires (technique depuis ramassée par le ministre Edgar Faure). Mais la solidarité des étudiants obligea le gouvernement à renoncer à cette mesure. On sait que, par la suite, le 4 juin 1969, l’Université Lovanium (où quelques influences situationnistes sont discernables) se souleva de nouveau, non, comme l’a prétendu le gouvernement, pour une augmentation de 30% des bourses perçues mais pour abattre le régime. Cette fois, l’armée tira ; il y eut plusieurs dizaines de morts et des centaines d’arrestations.
Internationale situationniste no 12, septembre 1969
Dossier Mai 68
Enragés et situationnistes dans le mouvement des occupations
I. Le retour de la révolution sociale
II. Les origines de l’agitation en France
III. La lutte dans la rue
IV. L’occupation de la Sorbonne (suite)
V. La grève générale sauvage
VI. Profondeur et limites de la crise révolutionnaire (suite)
VII. Le point culminant
VIII. Le «Conseil pour le maintien des occupations» et les tendances conseillistes
IX. Le rétablissement de l’État
X. La perspective de la révolution mondiale après le mouvement des occupations