Procès de X des Amandiers accusé d'outrage et rébellion
Ambiance difficile à la 29e chambre, un seul juge, la présidente, la cinquantaine affirmée, qui déroule régulièrement un ensemble de préjugés de classe devant les deux jeunes qui précèdent le copain pour lequel nous sommes venus et rappelle presque joyeusement les possibilités offertes par la loi sur la récidive et les peines planchers.
X, jeune du 20e est convoqué pour outrages et rébellion envers un policier ; celui-ci présent à l’audience, accompagné d’une avocate spécialisée dans la défense des policiers, bien connue.
X a été arrêté dans son quartier alors qu’il était au café avec des copains et après qu’ils eurent assisté à des contrôles d’identité qu’ils voyaient se dérouler à distance sur le trottoir longeant le café.
Au cours de l’audience, le policier a rappelé et maintenu qu’il l’a entendu, le traiter «d’enculé» de l’intérieur du café et à plusieurs reprises. Après l’avoir contrôlé en sortant du café, il l’a conduit dans le car de police et toujours d’après lui, X s’est rebellé, lui a envoyé des coups de têtes et des coups de pied…
Version de X : Je ne l’ai pas injurié et ce que j’ai pu dire à mes copains pour rigoler, il n’a pas pu ni me voir ni m’entendre depuis le trottoir où il se trouvait. Quant aux violences, c’est le policier qui m’a brutalisé pour me faire monter de force dans le car afin de quitter les lieux le plus vite possible alors que des consommateurs du café et des passants s’attroupaient et constataient comment j’étais traité. Résultat : lèvre fendue et deux jours d’ITT pour X.
La procureure écarte les versions contradictoires concernant l’insulte proférée, faute de preuves, elle admet au bout des lèvres qu’il est difficile d’entendre à l’extérieur, dans la rue, des injures qui seraient prononcées dans un café à porte fermée et dit que s’il n’y avait pas eu de résistance violente de sa part, elle aurait laissé tomber l’accusation. Puis se reprend, monte tout un film : lors d’un contrôle tout le monde regarde dehors dans un café, tout le monde se tait, donc les flics auraient pu entendre les injures dans la rue, malgré les vitres fermées. Elle demande d’accorder l’amende de 860 euros requise par l’avocate du policier.
Plaidoirie magistrale de l’avocat de X qui démonte complètement la version policière en rappelant l’ITT de deux jours plutôt rare, l’audition différée à trois heures du matin alors que l’interpellation avait eu lieu à 18h50, l’absence de convocation des témoins volontaires relevée par l’avocate de permanence, produit des photos du café prises par J. qui prouvent que vu les rideaux fermés et la configuration des lieux, les flics étaient dans l’incapacité d’identifier l’auteur des soi-disant insultes, enfin il souligne l’existance des versions contradictoires des policiers (4 versions), dont deux (!) différentes versions produites par le flic qui se dit victime de X. Il expose qu’il est obligé lui-même d’apporter au tribunal les témoignages écrits, les photos et de relire à haute voix les conclusions du médecin prescrivant une ITT. Il demande la relaxe au bénéfice du doute ou le report pour upplément d’information et une commission rogatoire.
Après délibération (avec elle-même) la présidente annonce la relaxe de X (à suivre).
Résistons ensemble, 28 mars 2008